LE CHARIVARI
psychologiques et physiologiques du volume ne
nous effarouchaient nullement, pourquoi nous ne
partagions pas le bégueulisme de certains criti-
ques effarés.
Nous expliquâmes aussi comment l’œuvre avait
des virilités et des originalités auxquelles l’art
trouvait son compte.
M. Bergerat conviait, l’autre jour, à une épreuve
curieuse.
Le Viol, conçu d'abord sous forme dramatique,
puis devenu livre, redevenait pièce à l’Ambigu.
Je n’ai pas à vous raconter, vous l’ayant déjà
dite, l’histoire de Gilberte, violée par le domesti-
que de son mari, qui l'avait narcotisée au préala-
ble, non plus que les angoisses de ce mari,
dégoûté de celle qu'il adorait depuis cette interpo-
sition fâcheuse.
Mais le drame s’est présenté au public de cette
unique représentation avec des variantes qui en
font presque une comédie.
Dans la version nouvelle, le domestique Brutus
n’a pas le moins du monde consommé l’outrage
sur la personne de sa maîtresse. Il se contentait
d’endormir celle-ci afin de pouvoir gagner sans
être vu la chambre de la servante, dont il était
l’amant.
De sorte que toutes les émotions et toutes les
péripéties roulent sur un quiproquo.
Je ne vois pas ce que l'auteur a cru pouvoir ga-
gner à cette substitution, mais je vois tout ce qu’il
y a perdu.
Avec l’audace il n’est pas d’accommodement.
Quand on prend un tel sujet, il faut en subir toutes
les conséquences. C'est ce que M. Bergerat avait
fait dans son roman.
Il a eu tort de ne pas le faire aussi à la scène. Il
ne désarmera pas, par cette concession inutile, les
colères des routiniers, et il déconcerte les oseurs.
On a écouté Flore de Frileuse avec une attention
froide, mais non malveillante. On était, j’en suis
convaincu, tout disposé à accepter les violences,
et l'on a été plutôt déçu en les trouvant si miti-
gées.
Epreuve qui ne prouve rien ni pour ni contre.
Le talent de M. Bergerat, qui s’était affirmé dans
le volume, reste hors de cause.
Les interprètes n’ont pas fait grand’chose pour
le seconder, d’ailleurs.
En somme, je m’attendais à une bataille, et l’on
n’a eu qu’une escarmouche.
Pierre Véron.
APÉRITIF «HIER d’hon», 40 médUa* or, vermeil, etc.
_ _ — lu tins iirande coneorrraea
01 DIRA. POURQUOI 84* Ruo Richelieu, 94.
AVIS IMPORTANT
Sur la demande de nombreux abonnés, nous venons de
faire tirer une nouvelle série de nos MENUS CHARI-
VARIQUES, le grand succès du jour, la gaieté des dîners
de la saison.
Cette série de VINGT DESSINS DE GRÉVIN est
tirée avec luxe sur carton teinté et doré. D’un côté, le
croquis avec légende et la place pour le nom du convive ;
de l'autre, la place pour écrire le menu.
Nous livrerons ces menus aux abonnés et lecteurs du
Charivari à un prix exceptionnellement réduit de moitié sur
le prix du commerce, soit :
LA SERIE DE VINGT DESSINS, 5 fr., dans une
boîte élégante.
La même, FINEMENT COLORIÉE, 6 fr.
(Ajouter, pour le port, 30 centimes par boîte.)
■O"
CHRONIQUE DU JOUR
Où le canard va-t-il se nicher !
Un farceur a trouvé drôle de répandre une nouvelle si-
nistre, aux termes de laquelle M. Meissonier fils aurait été
mordu par un chien enragé.
Et ce n’était qu’une horrible plaisanterie.
Quel plaisir peut-on bien trouver à des petites combinai-
sons de ce genre ?
Pour de l’audace, voilà de l’audace.
On annonce la prochaine publication d’une revue à 20
francs le numéro.
Vous avez bien lu. A 20 francs!
Dans un pareil moment, quand tout languit, il faut avoir
le diable au corps pour courir une semblable aventure.
Jamais, .jamais en France, nous ne serons gens à dépen-
ser un louis périodiquement pour un recueil, quel qu’il
soit.
Vous verrez si je me trompe.
Les inondations de la Seine prennent fin.
Et, en lisant que l’eau avait envahi comme les années
précédentes et, comme les années précédentes, tant soit
peu démoli un certain nombre de maisons d’Alfortville et
des environs, chacun de se dire :
•— Comment diable les gens vont-ils s'amuser à rebâtir
sur ces terrains-là ? Comment d’autres gens viennent-ils y
demeurer?
Au premier abord, en effet, cela semble absurde. Mais
si l’on veut y réfléchir, on s’aperçoit que tous nous ne fai-
sons pas autre chose dans ce bas monde.
A qui l’expérience a-t-elle jamais servi ? Est-ce que per-
pétuellement on ne recommence pas à se faire duper et
ruiner par des drôlesses qui ne changent pas de méthode ?
Est-ce qn’on ne recommence pas perpétuellement à se faire
étriller à la Bourse? Est-ce que...
Je n’en finirais pas, si je voulais compléter le dénom-
brement.
Ne rions donc pas des inondés. Nous leur ressemblons
trop.
C’est, assure-t-on, un décret du high-life. Les gants re
deviennent à la mode pour les hommes dans les théâtres et
dans les soirées".
Vous savez qu’on en avait supprimé l’usage.
On se contentait d’en avoir une paire qui servait indé-
finiment et qu’on fourrait dans son gibus ou dans son
giiet.
Des inamovibles !
C’était économique. Et le personnage sentimental de
VHonneur et l'Argent ne pouvait plus gémir son fameux •
Moi qui n’ai pas dîné pour acheter des gants !
Mais la mode va recommencer à exiger que les gants
soient portés et salis.
Elle tourne perpétuellement dans le même cercle h
mode.
Un roman.
Le Jeu des vertus, par Henri de Bornier.
Ce titre-là n’attirera pas la clientèle des momentanées.
Mais le livre n’en est pas moins intéressant.
Assez bizarre d’allures, les amateurs de violences litté-
raires le trouveront peut-être un peu édulcoré pour eux -
mais il réussira près de ceux qui cherchent les émotions
douces et la morale saine.
Un syndicat vient de se former, qui nous parait pour-
suivre une tâche méritante.
Composé d'industriels, de propriétaires, de négociants et
de commerçants, ce syndicat a pour but de combattre les
inconvénients et les abus offerts par la plupart des offices,
agences et bureaux de placement, et de porter remède
aux réels dangers résultant pour les intéressés de leur
fonctionnement défectueux.
H a tenu hier soir une importante séance.
Les abus des bureaux de placement sont tels, qu’on doit
encourager toute tentative faite pour en remplacer le fonc-
tionnement, qui laisse trop à désirer par toute autre com-
binaison meilleure.
Et je crois qu’il ne saurait y en avoir de pire.
Nous reviendrons sur la question. Elle mérite d’occuper
l’attention du public et de la presse.
Le comble de la prudence maternelle.
La mère se prépare à sortir. Les deux petits enfants vont
rester seuls.
La mère a peur qu'ils ne mettent le feu eu son absence.
Que fait-elle ?
Elle va chercher deux paquets d’allumettes de la Régie
et les leur donnant :
— Mes enfants, dit-elle, jouez avec ça.
Et elle s’en va rassurée.
X... est la bêtise et la suffisance réunies.
Aussi, sans voir sa poutre, déblatère-t-il sans cesse
contre toutes les pailles d’alentour.
— Cet imbécile, disait quelqu’un, passe sa vie à mettre
le bonnet d’âne aux autres.
— Alors, il doit bien s’enrhumer.
Dans un bureau de téléphone.
Un vieux monsieur entre.
L’AGBÉMENT Ml MÉNAGE
COMÉDIES ET TRAG DIES CONJUGALES
I
LA TRAGÉDIE DU BUDGET
Décor. — Une maison de campagne aux environs de Paris.
La scène se passe dans le jardin, au mois de mai.
M. Théobald Flirt fume un cigare en lisant le journal.
Mme Clémence Flirt vient de passer la revue des fleurs.
Mme Flirt. — Monsieur Flirt, êtes-vous disposé à m’é-
couter?
M. Flirt. — Toujours, chère amie; seulement, je ne puis
m’empêcher de remarquer que vous choisissez en général
le moment psychologique de la digestion pour traiter les
affaires désagréables.
— Qu’appelez-vous les affaires désagréables, monsieur
Flirt? Celles qui concernent votre fils et vos filles?
— Non, les affaires d’argent.
— Vous ne voulez pas qu’on vous parle d’argent; je ne
peux cependant pas vous parler de la pluie et du beau
temps, à la fin du mois.
— Nous n’y sommes pas encore, puisque le journal porte
la date dn 24 juin, et vous auriez bien pu me laisser finir
l'article du Salon.
— Je crois que si je ne m’y prenais pas à l’avance, vous
ne vous inquiéteriez guère de savoir comment je m’arrange
pour nouer les deux bouts, et si j’ai besoin d’argent pour
régler les comptes. Vous n’imaginez pas que j’en fais ou
qu’il en tombe des nues et que nous vivons de l’air du
temps? Je comprends que vous trouviez agréable d’avoir
bonne table et le reste à l’avenant; en attendant, vous
saurez que j’ai dépensé mon dernier sou et que demain est
le jour du marché; si vous voulez dîner, tâchez de ne pas
l’oublier.
— Ce serait difficile, et, pour éviter toute discussion, je
vais vous offrir le mois courant. (M. Flirt s’éloigne et revient
au bout de quelques instants.) Cette fois, vous ne direz pas
que je suis en retard.
— Oh! vous n’ètes jamais en retard, surtout pour vos
dépenses personnelles.
— Mes dépenses personnelles? Des cigares, un journal,
de temps en temps un livre, une stalle au théâtre, ce n’est
pas ruineux.
— Et quand vous allez à Paris, vous ne comptez pas les
déjeuners au café et les dîners en ville?
— C’est une rare exception.
— Enfin, monsieur Flirt, voulez-vous, oui ou non, me
donner de l’argent?
— Je ne demande pas mieux que de satisfaire à toutes
les exigences; mais enfin, je voudrais savoir à quoi m’en
tenir une bonne fois. Tous les mois, c’est à recommencer,
et il y a toujours dans votre budget de ménage des cha-
pitres supplémentaires, complémentaires et extraordi-
naires.
— A vous entendre, on dirait que l’argent de la maison
passe eu rubans, en dentelles et en colifichets.
— La question n’est pas là.
— Si, elle est là : de quoi vous plaiguez-vous?
— Je ne me plains pas.
— Vous ne faites que cela du matin au soir. Est-ce que
je le gaspille? Est-ce que je le mange, moi, l’argent? J ai
encore acheté des livres pour Félix, des gants à Edwige, un
chapeau à Renée et des cravates pour vous. Je vous ferai
remarquer aussi que je manque de tout et que je ne m a-
chète rien. Quand je sors avec mes filles, on doit me
prendre pour leur femme de chambre.
— Pour leur sœur aînée.
— Oh! gardez vos compliments pour d’autres.
— Encore une fois, fixez un chiffre. Comme, en lin de
compte, il faut toujours en arriver là, cela m’épargnera
des scènes énervantes que je sais par cœur. Voulez-vous
600 francs ?
— Vous vous moquez de moi, Flirt.
—■ Voulez-vous 700 francs?
— On voit bien que vous êtes un musicien, un virtuose,
et qu’en dehors de cela, enfin, vous ne comprenez rien
aux choses pratiques, comme tous les artistes.
— Vous saurez, pour votre gouverne, que je suis ferre
à glace sur l’économie domestique, et de force à coller au
psychologiques et physiologiques du volume ne
nous effarouchaient nullement, pourquoi nous ne
partagions pas le bégueulisme de certains criti-
ques effarés.
Nous expliquâmes aussi comment l’œuvre avait
des virilités et des originalités auxquelles l’art
trouvait son compte.
M. Bergerat conviait, l’autre jour, à une épreuve
curieuse.
Le Viol, conçu d'abord sous forme dramatique,
puis devenu livre, redevenait pièce à l’Ambigu.
Je n’ai pas à vous raconter, vous l’ayant déjà
dite, l’histoire de Gilberte, violée par le domesti-
que de son mari, qui l'avait narcotisée au préala-
ble, non plus que les angoisses de ce mari,
dégoûté de celle qu'il adorait depuis cette interpo-
sition fâcheuse.
Mais le drame s’est présenté au public de cette
unique représentation avec des variantes qui en
font presque une comédie.
Dans la version nouvelle, le domestique Brutus
n’a pas le moins du monde consommé l’outrage
sur la personne de sa maîtresse. Il se contentait
d’endormir celle-ci afin de pouvoir gagner sans
être vu la chambre de la servante, dont il était
l’amant.
De sorte que toutes les émotions et toutes les
péripéties roulent sur un quiproquo.
Je ne vois pas ce que l'auteur a cru pouvoir ga-
gner à cette substitution, mais je vois tout ce qu’il
y a perdu.
Avec l’audace il n’est pas d’accommodement.
Quand on prend un tel sujet, il faut en subir toutes
les conséquences. C'est ce que M. Bergerat avait
fait dans son roman.
Il a eu tort de ne pas le faire aussi à la scène. Il
ne désarmera pas, par cette concession inutile, les
colères des routiniers, et il déconcerte les oseurs.
On a écouté Flore de Frileuse avec une attention
froide, mais non malveillante. On était, j’en suis
convaincu, tout disposé à accepter les violences,
et l'on a été plutôt déçu en les trouvant si miti-
gées.
Epreuve qui ne prouve rien ni pour ni contre.
Le talent de M. Bergerat, qui s’était affirmé dans
le volume, reste hors de cause.
Les interprètes n’ont pas fait grand’chose pour
le seconder, d’ailleurs.
En somme, je m’attendais à une bataille, et l’on
n’a eu qu’une escarmouche.
Pierre Véron.
APÉRITIF «HIER d’hon», 40 médUa* or, vermeil, etc.
_ _ — lu tins iirande coneorrraea
01 DIRA. POURQUOI 84* Ruo Richelieu, 94.
AVIS IMPORTANT
Sur la demande de nombreux abonnés, nous venons de
faire tirer une nouvelle série de nos MENUS CHARI-
VARIQUES, le grand succès du jour, la gaieté des dîners
de la saison.
Cette série de VINGT DESSINS DE GRÉVIN est
tirée avec luxe sur carton teinté et doré. D’un côté, le
croquis avec légende et la place pour le nom du convive ;
de l'autre, la place pour écrire le menu.
Nous livrerons ces menus aux abonnés et lecteurs du
Charivari à un prix exceptionnellement réduit de moitié sur
le prix du commerce, soit :
LA SERIE DE VINGT DESSINS, 5 fr., dans une
boîte élégante.
La même, FINEMENT COLORIÉE, 6 fr.
(Ajouter, pour le port, 30 centimes par boîte.)
■O"
CHRONIQUE DU JOUR
Où le canard va-t-il se nicher !
Un farceur a trouvé drôle de répandre une nouvelle si-
nistre, aux termes de laquelle M. Meissonier fils aurait été
mordu par un chien enragé.
Et ce n’était qu’une horrible plaisanterie.
Quel plaisir peut-on bien trouver à des petites combinai-
sons de ce genre ?
Pour de l’audace, voilà de l’audace.
On annonce la prochaine publication d’une revue à 20
francs le numéro.
Vous avez bien lu. A 20 francs!
Dans un pareil moment, quand tout languit, il faut avoir
le diable au corps pour courir une semblable aventure.
Jamais, .jamais en France, nous ne serons gens à dépen-
ser un louis périodiquement pour un recueil, quel qu’il
soit.
Vous verrez si je me trompe.
Les inondations de la Seine prennent fin.
Et, en lisant que l’eau avait envahi comme les années
précédentes et, comme les années précédentes, tant soit
peu démoli un certain nombre de maisons d’Alfortville et
des environs, chacun de se dire :
•— Comment diable les gens vont-ils s'amuser à rebâtir
sur ces terrains-là ? Comment d’autres gens viennent-ils y
demeurer?
Au premier abord, en effet, cela semble absurde. Mais
si l’on veut y réfléchir, on s’aperçoit que tous nous ne fai-
sons pas autre chose dans ce bas monde.
A qui l’expérience a-t-elle jamais servi ? Est-ce que per-
pétuellement on ne recommence pas à se faire duper et
ruiner par des drôlesses qui ne changent pas de méthode ?
Est-ce qn’on ne recommence pas perpétuellement à se faire
étriller à la Bourse? Est-ce que...
Je n’en finirais pas, si je voulais compléter le dénom-
brement.
Ne rions donc pas des inondés. Nous leur ressemblons
trop.
C’est, assure-t-on, un décret du high-life. Les gants re
deviennent à la mode pour les hommes dans les théâtres et
dans les soirées".
Vous savez qu’on en avait supprimé l’usage.
On se contentait d’en avoir une paire qui servait indé-
finiment et qu’on fourrait dans son gibus ou dans son
giiet.
Des inamovibles !
C’était économique. Et le personnage sentimental de
VHonneur et l'Argent ne pouvait plus gémir son fameux •
Moi qui n’ai pas dîné pour acheter des gants !
Mais la mode va recommencer à exiger que les gants
soient portés et salis.
Elle tourne perpétuellement dans le même cercle h
mode.
Un roman.
Le Jeu des vertus, par Henri de Bornier.
Ce titre-là n’attirera pas la clientèle des momentanées.
Mais le livre n’en est pas moins intéressant.
Assez bizarre d’allures, les amateurs de violences litté-
raires le trouveront peut-être un peu édulcoré pour eux -
mais il réussira près de ceux qui cherchent les émotions
douces et la morale saine.
Un syndicat vient de se former, qui nous parait pour-
suivre une tâche méritante.
Composé d'industriels, de propriétaires, de négociants et
de commerçants, ce syndicat a pour but de combattre les
inconvénients et les abus offerts par la plupart des offices,
agences et bureaux de placement, et de porter remède
aux réels dangers résultant pour les intéressés de leur
fonctionnement défectueux.
H a tenu hier soir une importante séance.
Les abus des bureaux de placement sont tels, qu’on doit
encourager toute tentative faite pour en remplacer le fonc-
tionnement, qui laisse trop à désirer par toute autre com-
binaison meilleure.
Et je crois qu’il ne saurait y en avoir de pire.
Nous reviendrons sur la question. Elle mérite d’occuper
l’attention du public et de la presse.
Le comble de la prudence maternelle.
La mère se prépare à sortir. Les deux petits enfants vont
rester seuls.
La mère a peur qu'ils ne mettent le feu eu son absence.
Que fait-elle ?
Elle va chercher deux paquets d’allumettes de la Régie
et les leur donnant :
— Mes enfants, dit-elle, jouez avec ça.
Et elle s’en va rassurée.
X... est la bêtise et la suffisance réunies.
Aussi, sans voir sa poutre, déblatère-t-il sans cesse
contre toutes les pailles d’alentour.
— Cet imbécile, disait quelqu’un, passe sa vie à mettre
le bonnet d’âne aux autres.
— Alors, il doit bien s’enrhumer.
Dans un bureau de téléphone.
Un vieux monsieur entre.
L’AGBÉMENT Ml MÉNAGE
COMÉDIES ET TRAG DIES CONJUGALES
I
LA TRAGÉDIE DU BUDGET
Décor. — Une maison de campagne aux environs de Paris.
La scène se passe dans le jardin, au mois de mai.
M. Théobald Flirt fume un cigare en lisant le journal.
Mme Clémence Flirt vient de passer la revue des fleurs.
Mme Flirt. — Monsieur Flirt, êtes-vous disposé à m’é-
couter?
M. Flirt. — Toujours, chère amie; seulement, je ne puis
m’empêcher de remarquer que vous choisissez en général
le moment psychologique de la digestion pour traiter les
affaires désagréables.
— Qu’appelez-vous les affaires désagréables, monsieur
Flirt? Celles qui concernent votre fils et vos filles?
— Non, les affaires d’argent.
— Vous ne voulez pas qu’on vous parle d’argent; je ne
peux cependant pas vous parler de la pluie et du beau
temps, à la fin du mois.
— Nous n’y sommes pas encore, puisque le journal porte
la date dn 24 juin, et vous auriez bien pu me laisser finir
l'article du Salon.
— Je crois que si je ne m’y prenais pas à l’avance, vous
ne vous inquiéteriez guère de savoir comment je m’arrange
pour nouer les deux bouts, et si j’ai besoin d’argent pour
régler les comptes. Vous n’imaginez pas que j’en fais ou
qu’il en tombe des nues et que nous vivons de l’air du
temps? Je comprends que vous trouviez agréable d’avoir
bonne table et le reste à l’avenant; en attendant, vous
saurez que j’ai dépensé mon dernier sou et que demain est
le jour du marché; si vous voulez dîner, tâchez de ne pas
l’oublier.
— Ce serait difficile, et, pour éviter toute discussion, je
vais vous offrir le mois courant. (M. Flirt s’éloigne et revient
au bout de quelques instants.) Cette fois, vous ne direz pas
que je suis en retard.
— Oh! vous n’ètes jamais en retard, surtout pour vos
dépenses personnelles.
— Mes dépenses personnelles? Des cigares, un journal,
de temps en temps un livre, une stalle au théâtre, ce n’est
pas ruineux.
— Et quand vous allez à Paris, vous ne comptez pas les
déjeuners au café et les dîners en ville?
— C’est une rare exception.
— Enfin, monsieur Flirt, voulez-vous, oui ou non, me
donner de l’argent?
— Je ne demande pas mieux que de satisfaire à toutes
les exigences; mais enfin, je voudrais savoir à quoi m’en
tenir une bonne fois. Tous les mois, c’est à recommencer,
et il y a toujours dans votre budget de ménage des cha-
pitres supplémentaires, complémentaires et extraordi-
naires.
— A vous entendre, on dirait que l’argent de la maison
passe eu rubans, en dentelles et en colifichets.
— La question n’est pas là.
— Si, elle est là : de quoi vous plaiguez-vous?
— Je ne me plains pas.
— Vous ne faites que cela du matin au soir. Est-ce que
je le gaspille? Est-ce que je le mange, moi, l’argent? J ai
encore acheté des livres pour Félix, des gants à Edwige, un
chapeau à Renée et des cravates pour vous. Je vous ferai
remarquer aussi que je manque de tout et que je ne m a-
chète rien. Quand je sors avec mes filles, on doit me
prendre pour leur femme de chambre.
— Pour leur sœur aînée.
— Oh! gardez vos compliments pour d’autres.
— Encore une fois, fixez un chiffre. Comme, en lin de
compte, il faut toujours en arriver là, cela m’épargnera
des scènes énervantes que je sais par cœur. Voulez-vous
600 francs ?
— Vous vous moquez de moi, Flirt.
—■ Voulez-vous 700 francs?
— On voit bien que vous êtes un musicien, un virtuose,
et qu’en dehors de cela, enfin, vous ne comprenez rien
aux choses pratiques, comme tous les artistes.
— Vous saurez, pour votre gouverne, que je suis ferre
à glace sur l’économie domestique, et de force à coller au