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L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré — 1.1868

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https://doi.org/10.11588/diglit.3702#0012
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L'ECLIPSE

Par tSécI&Son cï© Rfi. S© préfet <î© police
en «lai© fSia SSS51 elécewalbiif© l©®^, B*a vent©
feuir la voie puliïtcpte a été accordée s*bï
journal B'feOLIK^SE.

AU PUBLIC

11 y avait une fois — il n'y a pas si longtemps — un
journal qui, dans un genre où devaient se produire
tant d'imitations, avait su se créer une spécialité nou-
velle, hardie, originale, et rencontrer en même temps
un succès exceptionnel, incontestable et mérité.

Ce genre — passé dans nos mœurs depuis Grand-
ville, Gavarni et Daumier —ce journal l'avait relevé
de l'indifférence et de l'oubli en lui infusant le jeune
talent d'André Gill.

Aussi lui aviez-vous fait son succès, vous qui aimez
à voir la pointe du crayon et le bec de la plume s'ai-
guiser en fine et décente ironie...

Vous le lui aviez fait, parce qu'il avait tenu tout ce
qu'il avait promis, et parce qu'au milieu de tant de
concurrences imparfaites, il était resté fidèle au bon
goût, au choix piquant et juste des sujets et à l'excel-
lence des procédés d'exécution...

On sait par suite de quelles circonstancescejournal
a dû disparaître—au moment où le chiffre toujours
croissant de ses abonnés et de ses acheteurs semblait
lui assurer une existence durable et prospère.

Nous venons essayer de prendre sa place dans la
curiosité et la bienveillance du public.

A cet effet, nous nous sommes adressés à l'ancienne
administration de la Lune...

Elle nous a cédé ses bureaux, ses vendeurs, ses
abonnés, ses primes et les traités qui lui attachaient
des dessinateurs et une rédaction dont on a pu appré-
cier l'esprit.

Afin de mettre tout le monde à même de s'assurer
de la réalité de ce que nous annonçons, nous avons —
moyennant les plus grands sacrifices — fixé momen-
tanément le prix du numéro de I'Eclipse à UN SOU!!!

Ce prix — qui popularisera forcément notre feuille
dans les masses — nous le maintiendrons jusqu'à ce
que I'Eclipse compte CENT MILLE acheteurs...

Et elle les comptera, —■ nous en avons pour garantie
la faveur que le lecteur n'a jamais cessé d'accorder à
quiconque prend souci de ses plaisirs !...

Instruits par de récents exemples, nous apporterons
une prudence extrême dans l'accomplissement du
programme que nous nous sommes tracé. Nous nous
ferons donc une loi de rester dans les limites qu'il
nous est interdit de franchir. Nous voulons vivre, —
vivre le plus longtemps possible, ■— pour la satisfac-
tion des autres... et pour la nôtre !...

La Lune faisait bien ; I'Eclipse fera mieux :

Pour les amateurs désireux de collectionner les
actualités que Gill clouera à sa première page, elle
publiera une édition de luxe, — dessins tirés en noir
avec le plus grand soin ou rehaussés d'un riche
coloris.

Prix d'abonnement pour ces épreuves d'artiste :

REPRISE DE BARBE-BLEBE

Depuis samedi, M, Cogniard a recommencé a dire à son cais-
sier :

— Frère Anne, que voyez-vous venir?

Et frère Anne répond imperturbablement :

— Je vois la queue qui s'amasse à la porte du théâtre et l'or
qui ruisselle à la lumière du gaz, et nos confrères qni verdoient.

En effet, Barbe-Bleue, un excellent homme qui n'aimait pas
qu'on fouillât dans son passé, et que Perrault a si rudement ca-
lomnié, a reparu sur les planches du théâtre des Variétés, sous
les traits insensés de Dupuis, son coupe-tête à la main.

Son indiscrète épouse, Mlle Schneider, plus charmante que
jamais, continue également de lui chanter de jolis airs, et d'ex-
citer sa colère conjugale d'une façon ravissante.

11 serait vraiment dommage que le mari offensé décollât une
si jolie tôle de dessus des épaules aussi aimables.

Et pourtant, si le fait avait Heu, entre ces belles épaules et
cette tête spirituelle, j'en sais plus d'un que l'embarras du choix
retiendrait immobile, comme l'âne de Buridan, entre ses deux
picotins d'orge mondée.

En somme, un succès mérité, et dû presque entièrement à
l'entrain d'enfer des interprètes de îa";piôcQ.

En voilà pour trois mois, au moïas, k voir la môme affiche à la
porte du théâtre.

Mais elle n'est pas à fiche à la porte, celle-là.

l'Etoile.

se jouent régulièrement devant un auditoire composé du muni-
cipal de service, et qu'il faut réveiller ce fonctionnaire à la fia
de chaque représentation, on sera bien forcé de mettre la sainte
tradition au rang des briquets phosphoriques et des seringues en
étain de nos ancêtres.

Du reste, ajoutons que le Sénat passe invariablement à l'ordre
du jour â chacune de ces êlucubrations, en tenant non moins'in-
variablement compte au pétitionnaire de « ses bonnes intentions. »

H doit être doux pour celui -qui a sué cinq cents lignes sur
papier ministre avec l'intention bien arrêtée de sauver son pays
de s'entendre dire : "'

-; — Le Sénat est persuadé'quevous aimez bien votre mère- mais
il trouve que vous n'avez pa3 le sens commun.

Lkon BtENVEMJ.

LE DRâRflE DE LA BUE SMT-BEIQIT

UN AN

Egaras.....

Départements,

1 fjp.

3 Si

Prix d'un exemplaire : 30 centimes.

Cette édition ne peut manquer de répondre aux
goûts du plus grand nombre de nos lecteurs...

Nous n'en voudrions pour preuve que l'estimation
élevée dans laquelle sont tenues actuellement les trop
rares collections de la Lune.

Celles de I'Eclipse commencent aujourd'hui. Hom-
mes et choses du temps y passeront, et la caricature
de l'époque se détachera tout entière sur le disque de
l'astre assombri, — illuminée par le sourire du des-
sinateur et des écrivains....

L'Eclipsé. »

LES CLASSIQUES

jOe^ant le @ésisit

Il y a une classe de citoyens qui fait ma joie : ce sont les péti-
tionnaires au Sénat.

Ces braves gens-là ■— qui paraissent, d'ailleurs, animés des
intentions les plus pures — doivent avoir été inventés, je le
suppose, pour jeter un peu de gaieté dans le quartier du
Luxembourg.

Si on ne leur accordait pas cette petite utilité,» il ne resterait
plus qu'à les faire abattre.

Pétitionner fait, pour eux, partie du régime hygiénique.
Ils pétitionnent comme d'autres se purgent.
Quand ils ont déjeuné et fait leur barbe, ils disent :
— Il fait un temps de chienï... Pas moyen de sortir!... si j'a-
dressais une pétition au Sénat... ça occuperait mon après-midi.

El

Cette innocente toquade leur suggère quelquefois de bonnes
idées ; mais, souvent aussi, do bien cocasses.

Dernièrement il y en avait un qui demandait tout simplement
au Sénat d'établir un impôt sur les poètes.

Il prétendait que c'était le seul moyen de mettre un frein à ce
flot de poésies immondes qui inonde les cafés-concerts.

[S

Je ne sais pas si ce pétitionnaire indigné avait bien creusé son
idéo avant de la coucher sur la feuille de papier qui ne lui avait
pourtant rien fait.

Maie, je crois que son impôt sur les poètes n'eût pas enrayé
d'une façon bien efficace la production des : Va dire à ta mère
qu'ai'mouche!.,, ou des ; C'est dans l'nes qu'eu mïdialouille, qui
paraissent l'offusquer.

Comme, de nos jours, il n'y a guère que les mauvaises poésies
qui puissent se placer et que la composition d'une chanson pour
Thérésa rapporte à son auteur environ quarante-cinq fois autant
de droits qu'une tragédie en cinq actes, les mauvais poètes res-
teraient toujours les seuls à même de payer leur patente.

L'intervention du fisc en cette circonstance n'aurait donc pour
effet que d'augmenter Je prix des consommations à l'Alcazar et à
l'Eldorado.

Je ne vois pas clairement ce que la France aurait à y gagner.

Kl

Aujourd'hui, voilà un autre pétitionnaire qui demande que le
Théâtre-Français et l'Odéou soient tenus de jouer plusieurs fois
par semaine, — et à prix réduits — du Regnard, du Corneille, du
Molière et du Racine.

ES

Ceiui-là est tout bonnement splendide.

Il s'est sans doute tenu ce raisonnement :

— Voilà deux théâtres qui jouent le répertoire classique deux
fois par mois avec un succès qui varie de trente à trente-deux
francs de recette par soirée; forçona-ies à jouer ces vieilleries
trois fois par semaine, en diminuant îe prix de leurs places, et
ils se rattraperont. 3ur la quantité.

Kl

Je ne sais pas si, comme combinaison artistique, le raisonne-
ment de ce pétitionnaire pourrait se soutenir avec quelque
succès. t

Mais que le diable m'emporte si messieurs de Ghilly et Thierry
en apprécient jamais le côté financier.

La Revue des Deuœ-Mondu, — vous savez, ce groB et lourd
recueil couleur saumon -mal. cjiit, que personne ne lit, hormis
le gardien des Catacombes, et qui traîne si piteusement sur les
tables des cafés, —eh bien, la Son» des Deux-Mondes a changé de
domicile.

Il y a bientôt un mois que M. Buioz, son directeur, élève et
seul successeur de Polyphème, a quitté le n° 20 de la rue Saint-
Benoît pour aller établir ses bureaux,, j'allais dire sa caverne,
rue Bonaparte, n° 17.

On doit attribuer à cet événement inattendu la récente congéla-
tion des eaux de la Seine. ■

| Le nouvel antro do M. Buioz, orné partout de festons magnifi-
ques, et d'astragales, étonne surtout les yeux du voyageur égaré
sur la rive gauche du fleuve, par les grilles austères qui, au rez-
de-chaussée, interdisent coniplétement-ain; poètes l'accès de ce
dernier rempart de la saitia'rôson. et du style pâteux.

Les murs de ce temple littéraire sont couverts de citations em-
pruntas à nos meilleurs auteurs classiques: '"'

M. Buloz, par exemple, a fait graver en lettres d'or, au-dessus
de la. porte de son cabinet de travail, ce,vers de Boileau, légère-
ment modifié pour les hesoins de sa cause, et dont la portée n'é-
chappera à personne :

Qui ne sut

■1er [se sot j\mais écrire.

L'amour de la tradition est une belle chose.

Cependant, le jour où l'on s'apercevra que la Thêbaîdeoi Phèdre

Enfin, dans le vestibule, le buste'en marbre de feu de Mars le
fidèle secrétaire, à été placé dernièrement, afin que-le maître de
l'établissement pût encore le torturer en effigie, tons les jours, de
dix à quatre.

Mais c'est bien de tout cela qu'il s'agit I

Ce que je tenais à vous dire-, c'est la mort mystérieuse d'un
des nouveaux locataires du n° 20 de ia rue Saint-Bsnoît, nouvelle
sinistre que toue les journaux de 'Paris ont enregistrée la semaine
passée, comme une chose toute sîrapje et sans l'accompagner de
commentaires indispensables.

. Ces commentaires,- nous tenons à les formuler. Nous sommes
allés, trois romantiques, deux réalistes et moi, aux renseigne-
ments, h>er. Voici le résultat da nos investigations :

Pendant la nuit du 9 au 10 janvier, M. X., abonné de fEclipse
{n>$ compliments à la famille du défunt), emménagé depuis peu
dans l'un des anciens appartements que M. Saiut-René-Taillan-
dier louait à RI.Bu.loz, sa sentit soudain oppressé. 11 se fit un
ï verre d'eau très sucrée, regarda une charge de Gi^'et se recou-
cha soulagé. Il s'endormit de nouveau. Mais un'-malaise indéfi-
nissable ne tarda pas cependant à s'emparer de lui. Etonné, il se
leva, et comme une violente odeur de moisi qui semblait sortir
par les fnntes d'une armoire voisine, lui arrivait au nez vio-
lemment, il défonça, n'ayant pas do olef, les pannaauXide cette
armoire pratiquée dans le mur, et méchamment dissimulée sous
un papier à trois trois sous le rouleau.

Horreur! Plusieurs manuscrite oubliés là par M. Baloz s'é-
.chappèîont bizarrement de l'infernale cavité, cptameun vol
■ d'orfraies et de hiboux, et vinrent frapper M. X... en plein
visage. Le malheureux tomba, accablé sous une pluie épaisse de
'feuillets numérotés. Il voulut lutter, repousser d'une main
défaillante ses atroces ennemis. Vainj efforts!

jGt les manuscrits tombaient toujours !

Ecrasé sous des articles de plomb tels que — V Ànlropomor-
phisme et ses conséquences en Allemagne. ■+- les influences du système
de Wegsckeider. — Gibbon, set vie, ses œuvres, sa mort. -— Le rationa-
lisme Scandinave. — De l'attitude du parti whig pendant la dernière
séance du Parlement anglais. — Dequelques auteurs groènlandais. —
Vindustrie et le Ramayana, poème, etc., etc., le 'pauvre M. X...
essaya, maïs inutilement, de se dégager ; sa jambe- gauche était
prise sous un amas de — Considérerions nouvelles air la décadence
et la chute de V empire rornaii, —Réflexions critiques S sur le tamoul,
le bengali, Vhindousiani, île cachemire, le mahrate, U malabar et le
Winga — Victor Jacquemont, ses amours dans l'Inde et en Europe, —
De la synthèse en matière politique, eta.

Bientôt l'affreux ennui, comme un poison volatil, s'infiltra
dans les veines de M. X... — Le parfum d'un Traité d'économie
polUiqtte à l'usage des aliénés, par M. Baudrillart, acheva de réduire
M. X.., à zéro.

Comme il touchait aux portes du tombeau, un long soupir se
Ût entendre dans la chambre..Ce soupir épais, suivi bientôt de
plusieurs autres, glaça d'effrqi le reste de sang de M. X... Puis
une voix s'éleva dans le silence et dans la profonde horreur de
la nuit. Elle disait :

<t— Je suis la voix de l'ombre d'un rédacteur de la Revue, J'é-
« lais jeune, fringant, quand je connus M. Buloz. Cet homme
« m'a pris ma force, mes cheveux, mon talent. Il a fait de moi,
« écrivain rempli d'avenir, un pondeur de copie surannée, rancie.
« Me payant peu, il me faisait croire que mes articles, — de vé-
« ritables plum-puddings, — étaient goûtés dans le grand monde.
« Quelle erreur 1 — Dans ls grand monde on s'abonne à la Revue
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