L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré (1.1868)

L'ÊCLIPSB

PARIS EN 18 68 — par F. REGAMEY
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Loin des censeurs moroses
Voici venus les roses
Et le temps des baisers,
Des chansons amoureuses,
Des fièvres langoureuses.
Des papillons posés !

Nous irons à Mabille
Où s'embrasent les mille
Fleurs chaudes de Paris,
Aux paradis volages
Qu'estompent les nuages
De la poudre de riz 1

MABILLE — CHANSON D'ETE

Près de la beauté blonde
Tous les millions du monde
S'y donnent des assauts ;
On aime à la rencontre, .
Et tons ont des droits contre
ïouies — hormis les sots.

C'est des amours faciles,
Des'Pamélas dociles
Le nid voluptueux
Dont les provinciales
Sèches et glaciales
Ont peur fet je le veux !).

C'est le pays des filles
Qu'abhorrent les familles
Aux lotos innocents,
Où rôde un seigneur russe
Qui dispule à la Prusse '
Un enfant de seize ans I

Où (n'en veuillez sourire)
A la chère on peut dire —
Jamais elle ne fuit —
« Madame, je vous offre
Avec la clef du coffre
Mon cœur pour une nuit I \

EUG. VfiRMERSCH'

Le matin du 4 décembre, il aperçoit un individu de faction de-
vant sa porte- Il descend.

— Monsieur, lui dit-il, vous cherchez quelqu'un. J'ai l'idée que
ce quelqu'un c'est moi.

— Vous ne vous trompez pas, je suis chargé de vous surveiller.

— Alors, faites-moi un plaisir.

— Lequel ?

— Arrêtez-moi tout de suite.

— Impossible, je n'ai pas d'ordre...Tenez-vous à ôtre mis à
l'ombre? *

—Beaucoup.

— Dame !... Alors présentez une pétition au Président.

Jeanne de Ugnerls

La réouverture de l'Odêon a été signalée par un triste présage.
Je suis arrivé, vendredi, sur ce champ de bataille d'outre-Seine
juste pour constater une défaite et ramasser les morts. L'attrait
d'une mise en scène très soignée, très exacte, et d'une décoration
— celle du second acte — qu'envierait l'Opéra, n'a pu sauver
Jeanne de Ligneris. Malgré les efforts désespérés des amis de l'au-
teur, la pièce ne fera pas long séjour sur l'affiche, et l'on peut
lui appliquer prophétiquement le : Je n'ai fait que passer, elle
n'était déjà plus.

Il faut avoir le courage de le dire à M. Marc Bayeux, qui est un
travailleur persévérant, toutes ces hystéries, développées en mé-
chants vers, exigeaient la répression des rires et des sifflets. Qu'il
revienne à la prose et au roman. Nous serions enchanté que cette
leçon sévère le forçât à, nous donner un pendant à Une Femme de
cœur. £

Mlle Jane Essler n'a pas peu contribué à enterrer son homo-
nyme de Ligneris : figurez-vous une Pasiphaë de Bullier poursui-
vant de son rut un taureau — qui n'est guère qu'un bœuf I...

Mme Victor Hugo éleva, dit-on, ses enfants avec une sage par-
cimonie.

Un jour, dans son salon de la pièce Royale, elle causait avec
Léon Gozlan, lorsque arriva François-Victor, — l'aîné de ses fils,
alors rédacteur de Y Evénement.

Celui-ci demanda au visiteur la permission d'entretenir sa mère
en particulier.

Mme Hugo et son fils se retirèrent dans l'embrasure d'une fe-
nêtre, et, par discrétion, Gozlan, se recula de quelques pas, té-
moin, mais non auditeur, d'un colloque fort animé qui avait lieu
à voix basse.

La mère paraissait aussi surprise que vivement contrariée de
la communication qui lui était faite; le fils était en proie à une
anxiété, à une angoisse profonde. Gozlan, ayant comme un
pressentiment de quelque grand malheur de famille, ne savait
s'il devait intervenir ou se retirer.

Tout à coup, Mme Hugo semble prendre une grande résolution;

elle sonne sa domestique et lui dit, d'une voix grave et légère-
ment émue :
— Fanchette. donnez vingt sous à mon fils,

Un journal belge annonce que M. Henri Rochefort se propose
d'ouvrir un débit do faro à Bruxelles.

Et pourquoi non?

Un membre des cortês espagnols fait bien vendre en France lo
vin de ses vignes par l'entremise de M. Armand Pigeon. — Or,
ce vin est excellent. — J'en ai bu, et j'éprouve d'autant plus de
plaisir à le constater, que je l'avais cru jusqu'ici non moins fan-
tastique que les flacons d'or dans lesquels l'Opéra-Comique le
tient renfermé depuis une éternité de brindisi.

Quelqu'un disait à Paul Féval : - ■

— Vous êtes donc raccommodé avec Sardou ?

— Certainement.

— Et pourquoi ?

— Parce que sa dernière pièce a eu moins de succès que les
autres.

Madame deX,,, plaide en séparation.

-*• 1) est singulier, disait-elle, que mon mari me reproche mon
caractère, car je suis au mieux avec tout le monde...
— C'est bien pour cela.

Dans un couloir de l'Opéra, deux mères de danseusoe causent
do leurs petites affaires. ,

— C'est ma fille qui en a ruiné des hommes.' fait l'une avec
un légitime orgueil.

Ce à quoi l'autre répond avec une petite moue adorable :

— Madame I la mienne en a ruiné bien plus que la vôtre !

Émilk Blondbt.

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