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L'SCLIPS!

jiiwai i^ija^ijiftiMiiii^ijakU'^

LA NOUVELLE HYDHE

Fort justement alarmées, les monarchies européennes ont
traduit à la barre des nations la nouvelle hydre à cent têtes, qui
menace de les dévorer, c'est à-dire YInt'rnationale.

La vieille Licorne britannique, qui craint pour son Oligarchie
croulante, s'est chargée de dresser et de lire l'acte d'accusation.

Elle a eu cependant la loyauté d'écarter des chefs d'accusa-
tion, parmi les innombrables forfaits reprochés à l'Association
des travailleurs, des faits tels que le massacre des innocents
— la desiructioa dùtemple d'Ephèse, — l'incendie de la biblio-
thèque u'Alexan Iris — la Saint-Barthélémy — la conquête de
l'Espagne par Napoléon I" — la Terreur blanche de 1818 et le
Coup d'état du 2 Décembre.

Le pauvre Lion bel<re a été nommé greffier d'office C'est la
patteà coco qui enregistre les demande» des juges et parfois
les réponses des prévenus.

Le représentant royal de l'empire républicain de France est
le premier témoin à charge qui élève-la vois contre le fameux
monstre, préalablement enchaîné. Le Vautour prussien fait
chorus avec lui, du sang au bec, et la serre crispée encore sur
la dernière victime qu'il a volée, spoliée, violée, après l'avoir
égorgée traîtreusement.

L'Espagne, taureau qui a peur d'être d'être le bœuf, jette un
regard méchant à l'accusé. L'Italie crie : A l'/usassin. 1 et de-
mande la mort de l'horrible polycéphale, qui lui rappelle
bien mal à propos le visage des conspirateurs qui l'ont faite ce
qu'elle est.

Froid comme un glaçon, l'Ours russe assiste aux débats sans
y prendre une part active. On peut vendre sa peau, mais il se
passera du temps avant qu'on ne l'ait mis par terre.

Quant à l'Aigle à deux têtes d'Autriche, il glapit comme un
o-eai pour ne pas fâcher la Prusse, juge suprême des choses de
ce monde, et qui n'est pas bonne du tout quand elle met son
bonnet de travers.

Bleu-Blanc-Rouge.

LE RETOUR D'UN RURAL

J>AT>TS SES FOYERS

CHAPITRE I".

DE VERSAILLES A CRÉTÏGNY-LES-BONNES-ROTJLES. — M. BIDALOT,
DÉPUTÉ, RÉPÈTE SON DISCOURS. — PROJETS DE U. BIDALOT. —
INCIDENTS. — RÊVES D'A VENIR; — ARRIVÉE A CRÉTIGNY.

Il y a quelqu s minutes à peine que la dernière séance de
l'Assemblée vient d'être levée; un homme entre deux âges, gras
et frais, costume 'de voyage soigné, un rouleau de papier sous
le bras, demande a la gare une première pour Crétigny-les-
Bonnes-Boules.

C'est le député Bidalot, un des couteaux à papier les plus
distingués de la droite, qui retourne dans ses foyers recevoir
les félicitations 'de ses électeurs, après huit mois de travaux
surhumains.

Le député Bidalot est rayonnant. On devine en lui un homme
dont la conscience est tranquille.

Il est en régie avec ses électeurs ; pendant la session, son
nom a été imprimé deux fois à YOfflciel. Une fois, il a crié à
M. Ganibetta : Dictateur l... Une autre fois, il a demandé que
l'on fermât un vasistas qui faisait un courant d'air. Le député
Bidalot peut donc'se présenter la tête haute à ses mandants de
Crétigny-les-Bonnes-Boules ; on ne l'accusera pas de n'avoir
jamais rien .dit à la Chambre.

M. Bidalot-hésite longtemps avant de monter en wagon;
aucun compartiment ne sembla lui convenir : c'est qu'il en
cherche un qui soit vide.

Pourquoi donc veut-il être seul ?

Mystère!.*. Nous le saurons tout à l'heure,
n trouve Un et' s'y installe. On part.

Le député Bidalot paraît enchanté de cette solitude. Ah!.,,
c'est qu'il a bien des choses à se dire !...

Grand monologue. — Enfin!... je puis donc7, m'admirer en
toute liberté!... Quel triomphe!... Et l'ai-je assez roulé, le père
Thhrs !... J'ai fait tout ce qu'il a voulu... J'ai voté tout ce qu'il
m'a dit de voter... J'ai rejeté tout ce qui ne lui plaisait pas ..
Mais quelle puissance dans cette docilité méphistophélétique...
Quelle profondeur de vues... Quelle sûreté de main pour le ré-
sultat final ! Ah ! Bidalot 1 tu es un grand diplomate I

Le train s'arrête.

Le conducteur. — Station de Courgeron!... les voyageurs
pour Courte;on!... Courgeron !-,. Cuurgeron!...

M. Bidalot. — Ah! mon Dieu .. pourvu qu'il ne monte per-
sonne !...

Il se met à la portière pour faire croire que le compartiment
est plein. t

Ou repart— Sriuvé!...

Gui te :
■ ports m";
sera pave
fleurs bu
lot !.,. V
' ces trans

;; g ■ rrj -., . ■. g E — Quels succès!... quels trans-
,te ■ . • ■ • Très-certainement, la gare

^filles, en blanc viendront jeter des
i d du vat^im... On criera : Vive Bida-
... ■. . .. quelle contenance tiendrai-je devant
_ orts d'enthousiasme ? car il s'agit d'être à la fois mo-
deste et imposant. "D'abord, répétons le petit discours de l'arri-
53 en fan-s. . .

En prononçant cesmots, M.Bidalui se lève vivement ; son cha-
peau qui rencontre le haut 'lia compartiment s'enfonce jusque
sur son

. — Sapristi !... Ces wagons soB,t bien peu confortables ; pas
moyeu dé . un effet

A ce • :, . : ,' . lonneau-en-Vexi-n.

tpe u de dessus ses yeux.
Çaiorci . : i; tire, le chapeau cède, maïs la

coiffe décousue lui , La tète *oas forme, d'un ban-

dea-u de e ,■ , ■ ■, :-,r. Bidalot, décalé par le

train qui repart, s';> i&ied au hasard de la secousse et tombe vu

plein sur les genoux d'une dame qui vient de monter à la sta-
tion, et qui porte un perroquet dans une cage. La cage est tant
soit peu aplatie; Jacquot 'se fâche et, à travers les barreaux,
donne à M. Bidalot un coup de bec dans le gras en lui criant :
« Sacré j... f... de Versailtcux\.. » La dame rougit, aide M. Bi-
dalot à se débarrasser de sa coiffe et lui fait des excuses sur la
grossièreté de son perroquet, en lui expliquant que c'est son
mari qui s'est amusé à apprendre cette phrase à l'intéressant
animal.

M. Bidalot, très vexé de ne plus avoir la jouissance de son
compartiment pour y répéter son discours, balbutie un compli-
ment baual et s'installe dans un coin pour préparer mentale-
ment son entrée triomphde âla Crétigny-les-bonnes-Boules.

Le perroquet, qui a de la rancune, ne quitte pas de son œil
furieux le député de la droite; et chaque fois que celui-ci a le
malheur de remuer le pied, le genou, le bras ou la tête, il se
précipite vers les barreaux de sa cage en criant : Ran tan 'plan!
ran tan planl... Sacré j... /"..... de Versailteuxl... Vive la Républi-
que !... ran tan plan !. .

Pour la formera dame dit de temps en temps au perroquet :
Veux-tu te taire, coco I — Au fond, elle rit aux larmes.

M. Bidalot, que les interpellations du perroquet gambettiste
impressionnent visiblement, profite du premier arrêt pour
changer de compartiment.

Il tombe en plein dans une bande de voyageurs de commerce,
et comme la conversation de ces messieurs est rarement inté-
ressante, il ne tarde pas à s'endormir dans son coin et à se
sentir bercé par un doux rêve.

11 voit, en songe la gare de Crétigny-les-Bonnes-Boules où
il arrive; le maire lereçoit àîa tête des pompiers, et le curé-
l'embrasse devant toute la population II se voit ensuite sié-
geant au conseil général, puis, de retour à l'Assemblée de Ver-
sailles tu, sur sa demande, on vote d'urgence la restauration
dii comte de Paris, qui le fait séance tenante ministre de l'a-
griculture et grand'croix de la Légion d'Honneur.

Pendaat ce rêve qui dure huit stations, il parle tout haut et
gesticule d'une façon insensée, selon les phases du songe ; cela
amuse beaucoup ses «ompagnons de voyage. Avant de des-
cendre de wagon, ceux-ci, qui ont à peu près saisi le sens de
son rêve par les phrases entrecoupées qu'il a prononcées, lui
passent autour du cou un grand cordon rouge pris dans la boîte
de l'un d'eux, voyageur en rubans ; pendant qu'un autre, voja-
geur en épicerie, a'taehe à ce cordon une large croix de la Lé-
gion d'honneur sculptée à la hâte dans un échantillon de fro-
mage de gruyère.

Une heure après, M. Bidalot est réveillé en sursaut par ce cri
du chef du train : .

— Crétigny-les-Bonnes-Boules !. .. Crétigny-les-Bonnes-
Boules !.. _.\ -

Il deseend du wagon et cherche des yeux le maire, les auto-
rités, les oriflammes et les arcs-de-triomphe
. Au moment où le train rep-irt, une voix aigre arrive à son
oreille. C'est le perroquet de son premier compartiment qui l'a
aperçu et qui lui crie avec fureur :

— Vive la République!... Kantanpîan !... Sacré j...f..... de

Yersailîeux !. .

Au même moment, un chien qui passe à sa portée s'arrête
un instant, lève le nez en l'air, lui saute au cou et se sauve en
emportant 9a croix de la Lésion d'honneur.

M. Bidalot prend ce mouvement de.gloutonnerie pour un élan
du cœur et pense que ce chien qui l'a reconnu et qui file à tou-
tes jambes vers le vdlagc, va prévenir les habitants de son arri-
vée, pour que lecortége vienne au-devant de lui.

■ " ' CHAPITRE II '

DÉSILLUSIONS AMÈRES, — SUITE DES DÉSILLUSIONS AMÈRES
MONSIEUR BIDALOT SUCCOMBE A LA DOULEUR

Hélas! que de déboires attendront monsieur Bidalot !...

D'abord, en entrant da^ts le village, il remarque sur les phy-
sionomies comme tin petit air crâné et dégagé qu'il né connais-
sait pas .à ses habitants.

On le -salue bien encore, mais plus aussi obséquieusement
qu'avant son départ de Crétigny.-

Tout cela commence à jeti-.r. quelque trouble dans ses idées.

Il va bientôt avoir d'autres surprises.

Il rencontre-le facteur.

— Bonjour, père Cochet !...

— Mes respects, monsieur Bidalot t... Alors vous voilà re-
venu ?

— Mais ouh.. Eh bien, comment ça vR-t-il ici ?

■'—Pas trop mal... Ah! par exemple, nous avons un événe-
ment..

— Bah!... Quoi donc?

— Vous savez. . ie gros Potu qui recevait le Petit Journal
depuis cinq aa^?

— Oui... eh bien ?...

— En. bien !... il a lâché le Petit Journal et il s'est associé
avec les deux Cottin, Poisson et plusieurs autres pour s'abon-
ner âti Siècle.., lis prétundent que c'est moins'panade.

I ÎnL Bjdalot dissimule de .'son mieux ane affreuse grimace.

— AlaW eQ,.tïn te le pè/e QOch t, vous comprenez... On se
réuuit le soât dans la Saltâ au grand Tonchaid, et on lit le
journal en fui:lL .. Ah: i; y u du bon là-dedans... Pas vrai
que c'e^t pour rire, n'o.st-ce pas, monsieur Bidalot, ce que vous
avez dit l'autre jour à la Chambre ?

— Quoi donc ?

— Que vous alliez faire une constitution.,. D'abord, c'est pas
votre ouvrage... Le Siècle explique très bien ça tous les juurs.

En quittant le pere Cochet, M. Bidalot devient songeur. Quel
changement s'est donc opéré daus nos saines campagnes, se
dit il ; ou ne m'acelam i pie. ■ $&&& retour , on y lit le Siè.:le et
on ne me prend pas au e rVuS comme contiitii: ni ?

En s'arreiant un instant contre le mur d'une grange dans la*
quelle on travaille, M Bidalot saisit ce lambeau de dialogue :

— Vois-tu, Pinson, tout ça c'est toujours des mauvais rac-
commodages... Les rois, faut le.-j cbaîiger tous les dix ans... Il
vaut bien mieux avoir la République tout de suite.

— Ab bbm, plus souvent !... qu'ils vont te la voter, ta Répu-

blique, tous les vieux empaillés de Versailles, notre Bidalot en
tête!...

— Faudra bien !... Sans ça... du balai!...

Monsieur Bidalot s'éloigne et ne demande pas son reste.

Il se rend cbez le maire de Crétigny.

Là, il en apprend de belles 1... Depuis son départ, l'esprit de
la population est complètement changé. Le portrait de Gam-
betta est dans presque toutes les maisons. Aux dernières élec-
tions du conseil municipal, on a nommé Cabot le vétérinaire
et Jean Cireux le perruquier, qui sont les démagogues de la
localité, les batteurs de grains de Crétigny ont frit grève ■ le
4 septembre il y a eu des drapeaux aux feuêtres, etc., etc.

M. Bidalot, atterré par ces découvertes successives, renonce
pour ce jour-là à ses visites ofàcielles et prend 1 chemin de
son habitation pour aller embrasser sa famille qu'il n'a pas vue
depuis huit mois.

Au moment où il entre dans le salon, pour surprendre Mme Bi-
dalot, il aperçoit celle-ci en train de lire la collection du Père-
Duckène qu'elle a fait venir de Pans. Il demeure pétrifié.

Au même moment, il entend ses deux petits garçons qui jouent
dans la pièce à côté :

— Nous allons jouer au député, dit l'un.

— Oui, c'est ça... Je monte à la tribune; c'est toi le rural
comme papa.

— Ah! ta m'embêtes !... C'est toujours moi qui fais les rôles
d'imbécile... J'jouv pas...

M. Bidalot tombe anéanti sur un fauteuil.

CHAPITRE III

SERMENT D'AMOUR

Quand M. Bidalot revient à lui, M"* Bidalot lui fait servir à
dîner. Après le dessert, elle lui allume une bougie et dit au
domestique :

■— Constant, vous conduirez monsieur à sa chambre.

— Comment!... à ma chambre?... Nous avons donc deux
chambres, maintenant?

— Oui. monsieur... Je les' ai fait installer pendant votre ab-
sence... C'est ma manière à moi de siéger à Versailles.

— Alors, tu me dêcapUalisesl

— Provisoirement,:, c'est, le mot à la mode.

Ces allusions ironiques ébranlent M. Bidalot, qui se pen-
che tendrement à l'oreille de sa lerume.

— ???

— Non... non...

— Mais pourtant...

—Non... non... non...

— ???

— Rien !... La levée de l'état de siège, la rentrés à Paris «t
reconnaissance de la République... J'ai dit.

— Je le jure !...

Léon Bienvenu.

UN DIZAIN DE CHANOINES

On lit dans la Oloche :

« Que va dire M. Veuillot? Un titre de chanoine de Saint-
Denis.est vacant depuis la fin de 1870. On propose de suppri-
mer le traitement-qui y est afférent. »

Que dira M. Veuillot de cette suppression? Parbleu je gage-
rais qu'elle ne.le satisfera point.

Eh bien, faut-il l'avouer, moi non plus, je n'en serai pas
content.

Non, je ne serai pas content, parce qu'au lieu de voir suppri-
mer un chanoine de Saint-Denis, j'en voudrais voir suppri-
mer dix.

Car ils sont dix à_Sam>Deni8, dix bons chanoines doucement
affligés-dû'mê-ùe traitement dont l'Etat songerait à bénéficier
par suite du décès de l'un d'eux, — un pauvre traitement de
dix mille francs, soit cent mille francs pour eux dix,

Cent mille francs, une' misère ! Oh! la vilaine chose que l'é-
conomie !

Encore faut-il savoir à quel titre les excellents chanoines
perçoivent depuis vingt ans Cette petite somme*
Ecoutez cela ;

A titre de gardiens de la sépulture des empereurs !
C'est en 1852 que l'Empire, eyunir à verser ses faveurs sur
quelques membres du haut clergé, imagiua ces fonctions idéa-
les clignes de rivaliser avec celles, déjà légendaires, de portier
de l'obélisque et d'amiral suisse.
Gardiens de la sépulture des empereurs!
Quelle adorable trouvaille 1

On en est surtout charmé au dernier point quand on songe
que nous comptons tout juste dans notre histoire troia em e*
reurs : que le premier, Oharlemagne, est enterré à AixTla-Ch,a-
pelle; que le second, Napoléon I6r, repose sous le dôuie des In- ■
Valides; et que lé troisième, actuellement en villégiature, a
décliné jusqu'ici les honneurs du catafalque.

Alors, que diable les gardiens de Saint-Denis peuvent-ils
bien garder?
Est-ce une sépulture à venir?

Je l'ignore, mais il eBt peu probable qu'on soit obligé dô
faire bonne garde auprès d'uu tombeau non occupé pour em-
pêcher I<-s farceurs de mauvais goût d'y venir établir domicile.
Suus l'empire on pouvait admettre encore que le souwnii*1
trouvât plaisant d entretenir à grands frais une dizaine du cha-
noines dont toute l'occupation devait se borner à le guigner
du coin de l'œil eu murmurant :
— En bien, voyous, nods ne nous décidons pas ?
Mais aujourd'hui il n'y a plus d'empereur à qui faire les veux
doux.

Et quant à échanger leur titre de gardiens de la sépulture des
ernperuuri contre celui de gardiens de li sépulture de <a ll<v,>u-
b,lique,- je n'j pense pas que les bous chanoines songeûfi à perpé'
trer une aussi sanglante épigramme.

D'ai.ord îa vérité est qu'ils n'ont jamais songé à autre chose
jusqu'à présent qu'à jouir béatement des petites rentes que le
ciel, ami de l'empire, leur envoyait.

VOIES

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