C'était là le fameux marquis de Soulboeuf, un des grands
Propriétaires du pays, un chouan de la roohe antique, un bu-
Veur de cidre illustre, qui croquait un œuf dur avec la coquille
f*Qs sourciller, et nom du Christ ! vous aurait cassé la figure
* coups de fouet pour un rien, malgré ses nombreuses années,
derrière la voiture du marquis, sar une haridelle apocalyp-
tique, trottait, violemment secoué, le fils du noble Breton, l'en-
fftnt, suivant les expressions du père, — qui devait bientôt, sié-
geant à la droite de l'Assemblée, vous f... tous ces coquins de
* Français de Paris » dans la Saine, nom du Christ I
Ce futur député se manifestait de la façon suivante aux re-
gards de votre serviteur et de l'humble Jabot-Rouge, qui se
tenait presque prosterné devant ses maîtres : — Nu-tête, en
veste de droguet, la poitrine découverte, il trottait, encadrant
de ses longues jambes le squelette de sou cheval. Il portait un
Pantalon blanc très-court et des sabots gigantesques. Les
Pieds étaient dépo urvus de bas.
— C'est celui-ci qu'on va porter aux prochaines élections?
demandai-je à Delbouë.
— Lui-même, monsieur. Il fait ses vingt-cinq ans.
— Vingt-cinq ans, ce grand dadais ? mais il a l'air d'un
'Unocent.
— Oh ! que non, il est très fin, mais il ne sait pas lire.
— Pas lire 1 Le fils du marquis de Soulboeuf, un futur
député.
— Non, monsieur, il ne sait pas lire, mais comme dit mon-
sieur le marquis, à quoi que ça pourrait lui servir : il a le
cachet de la famille ! C'est assez !
C'est ainsi que, dans certains coins de la vieille Armorique,
tandis que dans le petit monde, les pères de famille se saignent
4 toutes les veines pour faire de leurs enfants des hommes et
des citoyens, certains nobles — je n'invente rien! — confits
dans la dévotion et se cramponnant aux. mœurs d'autrefois,
élèvent ceux qu'ils ont la prétention d'envoyer à, la Chambre
comme représentant des « classes dirigeantes. »
lb cousin jacques.
(Qui n'ett pai celui de la Patrie.)
GAZETTE A M. MÂÏN
Pour la plume qui ne se .trempe point dans l'enbrier des in-
térêts ou des passions politiques, pour l'observateur qui se
borne à enregistrer, —jour par jour, —les mille iet une scènes,
artistiques ou mondaines, dont se compose la grande comédie
Parisienne, deux événements, cette semaine, méditent d'absor-
ber l'attention au détriment du drame funèbre qui s'est joué là-
bas de l'autre côté de la Manche, et dont le principal acteur,
les comparses et la portée ont été — dans l'opinion comme
dans la pressa, ^ si diversement appréciés :
Je veux parler de la première représentation de la Coupe du
roi de Thulé à l'Opéra, et de la première représentation de la
Femme de Claude, au Gymnase.
lie musicien de la Coupe du roi de Thulé
.....En ce temps là, j'avais l'honneur de porter sur la man-
che de ma vareuse noire le galon brun — liseré d'or — de
sergent aux francs-tireurs à la branche de houx.
J'étais, pardessus le marché, secrétaire du commandant,
Celui-ci, au commencement de novembre, m'avait envoyé à
Paris pour recruter des volontaires, et diriger ces derniers sur
Nanterre, où nous avions nos quartiers... dans des carrières de
champignons.
Un matin, un jeune monsieur entra — comme un obus —
dans mon bureau, et, éclatant sans choc, — en une mitraille
de paroles :
— Sergent, je viens pour m'enr&ler. Vous m'acceptez, pas
Vrai ? Je ne demande pas de solde. Seulement je veux être ha-
billé lout de suite. Votre bataillon est superbe^ Il ressemble à
Zampa ou à Fra-Diavolo. Moi j'aime mieux Zampa. En musique,
Hérold pense et cause : Auber blague, — quand il ne radote
pas... la fameuse chanson des Djinns, dans le Premier Jour de
bonheur, roule sur des mesures empruntées à la ballade du
Cheval de bronze... — Pour mon équipement j'ai une carabine à
six coups, un revolver de cavalerie, un couteau catalan, une
coite de mailles, un télescope, une cantine, deux chiens et un
Vélocipède... Croyez vous que ce soit suffisant?
— Pardon, fis-je, est-ce sur votre vélocipède que vous
comptez aborder les Prussiens derrière la barricade de Rueil
ou le mur de la Malmaison ?
Les Prussiens!... Tenez, je franchis leur barricade comme
ceci____
Et, bondissant sur place, sans, élan, sur le seul ressort du
jarret, mon interlocuteur voltigea au-dessus de ma table, au-
dessus de ma tête, et s'en fut retomber à l'extrémité de la
chambre avec une élasticité dont un singe ou un chat se se-
raient montrés jaloux...
— Quant à leur mur, voyez : je l'escalade comme cela....
Il grimpa ainsi qu'une mouche le long de la boiserie vernis-
sée, s'accrocha à une moulure de la plinthe, et fit avec son
Corps l'aile de moulin à vent....
Puis, quand il eut daigné reprendre champ sur le parquet :
— Une fois, de l'autre côté de leur mur ou de leur barri-
cade, à vos satanés Allemands, j'en cueille deux à bout de
bras, et je les passe aux camarades... : — Vous n'avez pas ici
des haltères, une paire de boulets de canon ou quelques pords
de cinquante kilos, que je vous fasse voir comme j'en jongle...
— On a du biceps. Tâtez. Voulez-vous que je démolisse votre
"baraque d'un coup de poing ?
tffaêt** min
J'examinais avec surprise cette singulière recrue.
C'était un garçon de moyenne taille, avec une poitrine bom-
bée comme une cuirasse et des lacis de muscles en saillie sous
le drap. Deux grands yeux hallucinés éclairaient sa tête aux
tons chaude, dont la barbe frisée de prince assyrien et le nez
crochu de fantoche combinaient Assuérus ave4 Pulcinella.
Sien couvert, du reste. Une souplesse, une légèreté extraordi
flaires de mouvements corrigeaient ce -que sa structure avait de |
trop athlétique et de trop herculéen. Auriol dans Arpin. On
devinait qu'il pouvait tomber un bœuf comme celui-ci ou mar-
cher au plafond comme celui-là.
— Eh bien ! sergent, questionna-t-il, est-ce entendu ? Suis-
je des vôtres?
— C'est entendu. Nous partons demain à midi. Rendez-vous
général au cinquième secteur.
— Bon I je m'en vais faire mon sac...
— Un ins'.ant! un instant donc!.- Et votre engagement que
vous oubliez de signer!.. Je remplis les blancs. Attention!
Vos nom, prénom, âge, profession et domicile?
— Eugène Diaz — trente-aeux ans, — musicien compositeur
— rue Houdon, à Paris-Montmartre.
Le lendemain, le nouveau volontaire fut exact. Il avait tout
un arsenal à la ceinture et sur le dos. En outre, un chien et
une chienne de chasse, — superbes, — se trémoussaient au-
tour de cette panoplie animée. Je lui demandai :
— Est-ce que vous tenez à emmener ces deux bêtes ?
— Pourquoi non? Elles sont très-douCes. Pas dé danger
qu'elles mangent vos hommes.
— Hum! c'est le contraire que je crains: nos hommes pour-
raient bien les manger.
Diaz roula des prunelles féroces et fit claquer sous sa mous-
tache la double herse de ses quenottes.
— Qu'ils s'en avisent! c'est moi qui les mangerais, vos
hommes! Savez-vous que je soulève un cuirassier avec les
dents ?
— Gardez-les pour le biscuit de M. Jules Ferry et les rosses-
btefi de l'intendance. Elles vous serviront. En attendant, tout
le monde sur deux rangs, et allongeons lesjambesl il s'agit
d'arriver à Nanterre pour la soupe...
Diaz haussa les épaules :
— La belle affaire ! Je prends ma course. Parions que je
touche une heure avant vous à la cuisine !...
J'eus toutes les peines imaginables à l'empêcher de donner
cet échantillon de sa vitesse. Il me fallut lui présenter que,
n'ayant pas de laisser-passer, il serait infailliblement arrêté
en chemin.
Nous sortîmes de Paris par la porte Maillot. En voyageant
sous le ciel gris et sur la route glaeée de neige, me» néo-ti-
railleur m'interrogea :
— Peasez-vous' que je trouve titl piano à Nanterre.
— Dame ! il y en avait plusieurs quand nous y prîmes posi-
tion, et à moins que le bataillon ne se soit chauffé avec...
— C'est qu'il me reste encore à faire le troisième acte et le
ballet de ma Coupe du roi de Thulé...
Et il me raconta comment, au début de la guerre, il avait
« lâché » son opéra pour composer un grand hymne patrioti-
que, avec, orchestre, chœurs et soli, lequel devait être chanté
à PAcadéroie impériale, le jour de l'entrée de nos troupes à
Berlin. Naturellement, Français y rimait avec succès. Naturelle-
ment encore, la nouvelle de nos désastres avait interrompu les
répétitions de ce chauvinisme en musique.
Pour le moment, notre artiste refait de donner « le coup de
fion » à sa partition et faisant le coup de feu avec l'ennemi.
— J'écrirai, disait-il, la dernière note de mon œuvre lors-
que nous aurons opéré notre jonction avec les armées de pro-
vince.
La partition.
Je l'ai entendue, — hier, — cette œuvre.
Dans l'immortelle parade des Saltimbanques, Gringalet, em-
bouchant le trombone, s'écrie :
— Patron, je ne pourrai en tirer qu'une seule note.
— Eh bien, riposte Bilboquet, ceux qui aiment cette note-là
en seront enchantés.
Soudain, on le voit lever le bras :
Je ne suis pas démesurément enchanté de la note, — de la
seule note, — de mon ancien camarade.
Mais le reproche d'uniformité, que lui a adressé la critique,
doit en partie retomber sur son parolier. En effet,
Le poëme
De la Coupe du roi de Thulé, — tout écrit qu'il soit en vers que
ne renieraient pas les Parnassiens, — manque absolument
d'intérêt, de passion et de mouvement. Et puis, est-on en droit
d'exiger d'un conscrit l'ensemble des qualités qui distingue les
grognards, les maréchaux de l'art? Je ne le crois pas. Auber,
que M. Diaz a tort de dédaigner, n'est pas arrivé du premier
coup à la fortune, à la réputation, à la gloire. Herold, lui-
même, avait donné Marie avant de composer ces deux chefs-
d'œuyie impérissables : le Pré aux Cleres et Zampa,
Eneore qu'elle .ne se présence ni comme une révélation, ni
comme utie révolution, la musique de la Coupe du roi, dt Thulé
est très-réussie, dans certaines parties, très-soignée et très-
travaillée dans toutes. L'instrumentation renferme de jolis dé-
tails. Je regrette, toutefois, que le compositeur n'ait pas donné
une place plus large et une part plus active au ballet dans son
ouvrage. Celui-ci, déjà fort peu gai par nature, est impardon-
nablement attristé par cette omission volontaire.
La mise en scène.
Elle est splendide.
Quel dommage que Gautier, dont chaque article est un ta-
bleau aussi précieux, que la plus magistrale des toiles de sa
galerie, — quel dommage que Gautier ne soit plus là pour
peindre dans son feuilleton l'originalité de ces costumes et la
magie de ces décors !
L'interprétation
Elle ne le cède en rien à la mise en scène.
Acteur, chanteur, Faure est complet. Mesdames Bloch et
Gueymard, MM. Achard et Bataille sont suffisants. Mademoi-
selle Fiocre fait merveille dans les évolutions et les poses du
ballet. Ce dernier faillit bien ne jamais être terminé:
C'était la veille de la signature de l'armistice. Nous avions
poussé une pointe dans Saint-Cloud. Mais les Allemands
étaient demeurés invisibles,— terrés dans leurs.trous ou beau-
gés dans les caves des maisons...
La nuit descendait rapidement. On se ralliait dans le parc
Pozzo di Borgo ; le paysage se ouatait de brume...
Tout à coup, plusieurs détonations pétillent au lointain ..
En même temps, l'un des nôtres crie '•
— Quelqueichoso se meut, la-bas — dans 1Q brouillard...
Chacun épaule son arme...
Vingt carabines se braquent sur le poin* indiqué...
L'adjudant fait quelques pas au devant du danger.
— Sacrebleu! ne tirez pas! commande-t-il. C'est Diaz qui
revient! Voilà sa chienne qui sort de l'ombre 1
Et, en effet, la chienne bondit joyeusement vers nous, tandis
que, derrière elle, notre musicien émerge du crépuscule en sif-
flant l'air de son ballet...
Ah ! cet air de ballet!...
C'était à sa recherche que Diaz s'était égaré...
Oui! mais le diable d'air ne voulait pas se laisser
attraper...
Il fuyait le compositeur en l'entraînant. Il lui échappait au
moment où celui-ci espérait le saisir. Il voletait d'arbre en
arbre, de buisson en buisson, de broussaille en broussaille, de
caillou en caillou, comme l'inspiration, comme le caprice,
comme la chimère, comme l'idéal, — mieux encore, comme le
chastre dont Méry raconta jadis à Dumas la spirituelle odys-
sée, — de telle sorte qu'à la fin, le brave garçon, acharné à
son pourchas était venu donner tête baissée dans une embus-
cade ennemie...
Heureusement, il avait sa carabine à six coups et son
revolver...
Douze cartouches à brûler...
Se couvrant d'un pan de mur, il avait ouvert le feu...
Cette mousqueterie enragée avait fait croire aux Pru ssiens
qu'ils étaient attaqués par une compagnie de francs-tireurs.
Et, sans riposter, ils avaient gagné- au pied dans leurs
lignes.
C'est égal, le musicien de la Coupe du roi de Tknlê doit utt fier
collier à sa chiçnne.
STAR.
TROIS LIVRAISONS SOîHT EST EN VENTE PARTOUT
1 O centimes la livraison. — 5 O centimes la série
Une livraison à lO centimes, le mardi et le vendredi
de chaque semaine.
Une série tous les vingt jours environ
l'ouvrage sera complet en 100 livraisons et en 20 séries
Ajouter 15 centimes par série pour recevoir franco
HISTOIRE TINTAMARBE5QIJE
de
NAPOLÉON III
par
TOUCHATOUT
Extrait de l'avant-propos de l'ouvrage.
Nous ne connaissons pas de personnalité mieux faite pour
tenter la plume, d'un historien, que celle de Napoléon III.
Nous avons hésité un instant entre lui et Robert Macaire.
Mais nous n'avons pas tardé à accorder la préférence au
héros de Sedan, qui nous a paru beaucoup plus complet
dans le genre.
Ce qui nous a surtout décidé, c'est que le public, en gé-
néral, ne connaît qu'incomplètement l'histoire de l'homme
qui a reculé de cinquante années l'aiguille de notre horloge
uationale.
Jusqu'en 1848, époque à laquelle ce sinistre saltimbanque
ï réussi le tour du gobelet qu'il avait déjà raté deux fois, la
vie de Napoléon III est peu connue. Nous allons tenter de
l'esquisser.
L'histoire de Napoléon III sera naturellement aussi celle
des hommes qui ont bourdonné au-dessus de son règne
^'abattant sur leur pâture, se relevant gavés, pour bourdonner
encore, se rabattre de nouveau et se gaver toujours.
Dans cette œuvre, nous ferons une large part à l'illustra
tion, ce moyen puissant d'éclairer les masses par le manque
de respect aux idoles.
TOUCHATOUT.
OUVRAGES DE TOUCHATOUT
en vente chez tous les libraires de paris et des
départements
Histoire de France tintamarresque, illustrée d'un nom-
bre considérable de dessins noirs et coloriés. — 100 livrai-
sons à 10 centimes ou 20 séries à 50 centimes. — L'ouvrage
est également complet en un beau volume grand in-8. Prix
broché, 10 fr.; franco ; 13 fr.
Le Trombinoscope, biographies satiriques des hommes
du jour, illustrées de portraits-charge. Une livraison chaque
semaine. Prix : 15 centimes. — Le premier volume broché.
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ADOLPHE EWia, rue Taibout, 10.
Parii. — Imprimerie F. DE BONS et O, 16, rus du Croissant.
Propriétaires du pays, un chouan de la roohe antique, un bu-
Veur de cidre illustre, qui croquait un œuf dur avec la coquille
f*Qs sourciller, et nom du Christ ! vous aurait cassé la figure
* coups de fouet pour un rien, malgré ses nombreuses années,
derrière la voiture du marquis, sar une haridelle apocalyp-
tique, trottait, violemment secoué, le fils du noble Breton, l'en-
fftnt, suivant les expressions du père, — qui devait bientôt, sié-
geant à la droite de l'Assemblée, vous f... tous ces coquins de
* Français de Paris » dans la Saine, nom du Christ I
Ce futur député se manifestait de la façon suivante aux re-
gards de votre serviteur et de l'humble Jabot-Rouge, qui se
tenait presque prosterné devant ses maîtres : — Nu-tête, en
veste de droguet, la poitrine découverte, il trottait, encadrant
de ses longues jambes le squelette de sou cheval. Il portait un
Pantalon blanc très-court et des sabots gigantesques. Les
Pieds étaient dépo urvus de bas.
— C'est celui-ci qu'on va porter aux prochaines élections?
demandai-je à Delbouë.
— Lui-même, monsieur. Il fait ses vingt-cinq ans.
— Vingt-cinq ans, ce grand dadais ? mais il a l'air d'un
'Unocent.
— Oh ! que non, il est très fin, mais il ne sait pas lire.
— Pas lire 1 Le fils du marquis de Soulboeuf, un futur
député.
— Non, monsieur, il ne sait pas lire, mais comme dit mon-
sieur le marquis, à quoi que ça pourrait lui servir : il a le
cachet de la famille ! C'est assez !
C'est ainsi que, dans certains coins de la vieille Armorique,
tandis que dans le petit monde, les pères de famille se saignent
4 toutes les veines pour faire de leurs enfants des hommes et
des citoyens, certains nobles — je n'invente rien! — confits
dans la dévotion et se cramponnant aux. mœurs d'autrefois,
élèvent ceux qu'ils ont la prétention d'envoyer à, la Chambre
comme représentant des « classes dirigeantes. »
lb cousin jacques.
(Qui n'ett pai celui de la Patrie.)
GAZETTE A M. MÂÏN
Pour la plume qui ne se .trempe point dans l'enbrier des in-
térêts ou des passions politiques, pour l'observateur qui se
borne à enregistrer, —jour par jour, —les mille iet une scènes,
artistiques ou mondaines, dont se compose la grande comédie
Parisienne, deux événements, cette semaine, méditent d'absor-
ber l'attention au détriment du drame funèbre qui s'est joué là-
bas de l'autre côté de la Manche, et dont le principal acteur,
les comparses et la portée ont été — dans l'opinion comme
dans la pressa, ^ si diversement appréciés :
Je veux parler de la première représentation de la Coupe du
roi de Thulé à l'Opéra, et de la première représentation de la
Femme de Claude, au Gymnase.
lie musicien de la Coupe du roi de Thulé
.....En ce temps là, j'avais l'honneur de porter sur la man-
che de ma vareuse noire le galon brun — liseré d'or — de
sergent aux francs-tireurs à la branche de houx.
J'étais, pardessus le marché, secrétaire du commandant,
Celui-ci, au commencement de novembre, m'avait envoyé à
Paris pour recruter des volontaires, et diriger ces derniers sur
Nanterre, où nous avions nos quartiers... dans des carrières de
champignons.
Un matin, un jeune monsieur entra — comme un obus —
dans mon bureau, et, éclatant sans choc, — en une mitraille
de paroles :
— Sergent, je viens pour m'enr&ler. Vous m'acceptez, pas
Vrai ? Je ne demande pas de solde. Seulement je veux être ha-
billé lout de suite. Votre bataillon est superbe^ Il ressemble à
Zampa ou à Fra-Diavolo. Moi j'aime mieux Zampa. En musique,
Hérold pense et cause : Auber blague, — quand il ne radote
pas... la fameuse chanson des Djinns, dans le Premier Jour de
bonheur, roule sur des mesures empruntées à la ballade du
Cheval de bronze... — Pour mon équipement j'ai une carabine à
six coups, un revolver de cavalerie, un couteau catalan, une
coite de mailles, un télescope, une cantine, deux chiens et un
Vélocipède... Croyez vous que ce soit suffisant?
— Pardon, fis-je, est-ce sur votre vélocipède que vous
comptez aborder les Prussiens derrière la barricade de Rueil
ou le mur de la Malmaison ?
Les Prussiens!... Tenez, je franchis leur barricade comme
ceci____
Et, bondissant sur place, sans, élan, sur le seul ressort du
jarret, mon interlocuteur voltigea au-dessus de ma table, au-
dessus de ma tête, et s'en fut retomber à l'extrémité de la
chambre avec une élasticité dont un singe ou un chat se se-
raient montrés jaloux...
— Quant à leur mur, voyez : je l'escalade comme cela....
Il grimpa ainsi qu'une mouche le long de la boiserie vernis-
sée, s'accrocha à une moulure de la plinthe, et fit avec son
Corps l'aile de moulin à vent....
Puis, quand il eut daigné reprendre champ sur le parquet :
— Une fois, de l'autre côté de leur mur ou de leur barri-
cade, à vos satanés Allemands, j'en cueille deux à bout de
bras, et je les passe aux camarades... : — Vous n'avez pas ici
des haltères, une paire de boulets de canon ou quelques pords
de cinquante kilos, que je vous fasse voir comme j'en jongle...
— On a du biceps. Tâtez. Voulez-vous que je démolisse votre
"baraque d'un coup de poing ?
tffaêt** min
J'examinais avec surprise cette singulière recrue.
C'était un garçon de moyenne taille, avec une poitrine bom-
bée comme une cuirasse et des lacis de muscles en saillie sous
le drap. Deux grands yeux hallucinés éclairaient sa tête aux
tons chaude, dont la barbe frisée de prince assyrien et le nez
crochu de fantoche combinaient Assuérus ave4 Pulcinella.
Sien couvert, du reste. Une souplesse, une légèreté extraordi
flaires de mouvements corrigeaient ce -que sa structure avait de |
trop athlétique et de trop herculéen. Auriol dans Arpin. On
devinait qu'il pouvait tomber un bœuf comme celui-ci ou mar-
cher au plafond comme celui-là.
— Eh bien ! sergent, questionna-t-il, est-ce entendu ? Suis-
je des vôtres?
— C'est entendu. Nous partons demain à midi. Rendez-vous
général au cinquième secteur.
— Bon I je m'en vais faire mon sac...
— Un ins'.ant! un instant donc!.- Et votre engagement que
vous oubliez de signer!.. Je remplis les blancs. Attention!
Vos nom, prénom, âge, profession et domicile?
— Eugène Diaz — trente-aeux ans, — musicien compositeur
— rue Houdon, à Paris-Montmartre.
Le lendemain, le nouveau volontaire fut exact. Il avait tout
un arsenal à la ceinture et sur le dos. En outre, un chien et
une chienne de chasse, — superbes, — se trémoussaient au-
tour de cette panoplie animée. Je lui demandai :
— Est-ce que vous tenez à emmener ces deux bêtes ?
— Pourquoi non? Elles sont très-douCes. Pas dé danger
qu'elles mangent vos hommes.
— Hum! c'est le contraire que je crains: nos hommes pour-
raient bien les manger.
Diaz roula des prunelles féroces et fit claquer sous sa mous-
tache la double herse de ses quenottes.
— Qu'ils s'en avisent! c'est moi qui les mangerais, vos
hommes! Savez-vous que je soulève un cuirassier avec les
dents ?
— Gardez-les pour le biscuit de M. Jules Ferry et les rosses-
btefi de l'intendance. Elles vous serviront. En attendant, tout
le monde sur deux rangs, et allongeons lesjambesl il s'agit
d'arriver à Nanterre pour la soupe...
Diaz haussa les épaules :
— La belle affaire ! Je prends ma course. Parions que je
touche une heure avant vous à la cuisine !...
J'eus toutes les peines imaginables à l'empêcher de donner
cet échantillon de sa vitesse. Il me fallut lui présenter que,
n'ayant pas de laisser-passer, il serait infailliblement arrêté
en chemin.
Nous sortîmes de Paris par la porte Maillot. En voyageant
sous le ciel gris et sur la route glaeée de neige, me» néo-ti-
railleur m'interrogea :
— Peasez-vous' que je trouve titl piano à Nanterre.
— Dame ! il y en avait plusieurs quand nous y prîmes posi-
tion, et à moins que le bataillon ne se soit chauffé avec...
— C'est qu'il me reste encore à faire le troisième acte et le
ballet de ma Coupe du roi de Thulé...
Et il me raconta comment, au début de la guerre, il avait
« lâché » son opéra pour composer un grand hymne patrioti-
que, avec, orchestre, chœurs et soli, lequel devait être chanté
à PAcadéroie impériale, le jour de l'entrée de nos troupes à
Berlin. Naturellement, Français y rimait avec succès. Naturelle-
ment encore, la nouvelle de nos désastres avait interrompu les
répétitions de ce chauvinisme en musique.
Pour le moment, notre artiste refait de donner « le coup de
fion » à sa partition et faisant le coup de feu avec l'ennemi.
— J'écrirai, disait-il, la dernière note de mon œuvre lors-
que nous aurons opéré notre jonction avec les armées de pro-
vince.
La partition.
Je l'ai entendue, — hier, — cette œuvre.
Dans l'immortelle parade des Saltimbanques, Gringalet, em-
bouchant le trombone, s'écrie :
— Patron, je ne pourrai en tirer qu'une seule note.
— Eh bien, riposte Bilboquet, ceux qui aiment cette note-là
en seront enchantés.
Soudain, on le voit lever le bras :
Je ne suis pas démesurément enchanté de la note, — de la
seule note, — de mon ancien camarade.
Mais le reproche d'uniformité, que lui a adressé la critique,
doit en partie retomber sur son parolier. En effet,
Le poëme
De la Coupe du roi de Thulé, — tout écrit qu'il soit en vers que
ne renieraient pas les Parnassiens, — manque absolument
d'intérêt, de passion et de mouvement. Et puis, est-on en droit
d'exiger d'un conscrit l'ensemble des qualités qui distingue les
grognards, les maréchaux de l'art? Je ne le crois pas. Auber,
que M. Diaz a tort de dédaigner, n'est pas arrivé du premier
coup à la fortune, à la réputation, à la gloire. Herold, lui-
même, avait donné Marie avant de composer ces deux chefs-
d'œuyie impérissables : le Pré aux Cleres et Zampa,
Eneore qu'elle .ne se présence ni comme une révélation, ni
comme utie révolution, la musique de la Coupe du roi, dt Thulé
est très-réussie, dans certaines parties, très-soignée et très-
travaillée dans toutes. L'instrumentation renferme de jolis dé-
tails. Je regrette, toutefois, que le compositeur n'ait pas donné
une place plus large et une part plus active au ballet dans son
ouvrage. Celui-ci, déjà fort peu gai par nature, est impardon-
nablement attristé par cette omission volontaire.
La mise en scène.
Elle est splendide.
Quel dommage que Gautier, dont chaque article est un ta-
bleau aussi précieux, que la plus magistrale des toiles de sa
galerie, — quel dommage que Gautier ne soit plus là pour
peindre dans son feuilleton l'originalité de ces costumes et la
magie de ces décors !
L'interprétation
Elle ne le cède en rien à la mise en scène.
Acteur, chanteur, Faure est complet. Mesdames Bloch et
Gueymard, MM. Achard et Bataille sont suffisants. Mademoi-
selle Fiocre fait merveille dans les évolutions et les poses du
ballet. Ce dernier faillit bien ne jamais être terminé:
C'était la veille de la signature de l'armistice. Nous avions
poussé une pointe dans Saint-Cloud. Mais les Allemands
étaient demeurés invisibles,— terrés dans leurs.trous ou beau-
gés dans les caves des maisons...
La nuit descendait rapidement. On se ralliait dans le parc
Pozzo di Borgo ; le paysage se ouatait de brume...
Tout à coup, plusieurs détonations pétillent au lointain ..
En même temps, l'un des nôtres crie '•
— Quelqueichoso se meut, la-bas — dans 1Q brouillard...
Chacun épaule son arme...
Vingt carabines se braquent sur le poin* indiqué...
L'adjudant fait quelques pas au devant du danger.
— Sacrebleu! ne tirez pas! commande-t-il. C'est Diaz qui
revient! Voilà sa chienne qui sort de l'ombre 1
Et, en effet, la chienne bondit joyeusement vers nous, tandis
que, derrière elle, notre musicien émerge du crépuscule en sif-
flant l'air de son ballet...
Ah ! cet air de ballet!...
C'était à sa recherche que Diaz s'était égaré...
Oui! mais le diable d'air ne voulait pas se laisser
attraper...
Il fuyait le compositeur en l'entraînant. Il lui échappait au
moment où celui-ci espérait le saisir. Il voletait d'arbre en
arbre, de buisson en buisson, de broussaille en broussaille, de
caillou en caillou, comme l'inspiration, comme le caprice,
comme la chimère, comme l'idéal, — mieux encore, comme le
chastre dont Méry raconta jadis à Dumas la spirituelle odys-
sée, — de telle sorte qu'à la fin, le brave garçon, acharné à
son pourchas était venu donner tête baissée dans une embus-
cade ennemie...
Heureusement, il avait sa carabine à six coups et son
revolver...
Douze cartouches à brûler...
Se couvrant d'un pan de mur, il avait ouvert le feu...
Cette mousqueterie enragée avait fait croire aux Pru ssiens
qu'ils étaient attaqués par une compagnie de francs-tireurs.
Et, sans riposter, ils avaient gagné- au pied dans leurs
lignes.
C'est égal, le musicien de la Coupe du roi de Tknlê doit utt fier
collier à sa chiçnne.
STAR.
TROIS LIVRAISONS SOîHT EST EN VENTE PARTOUT
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HISTOIRE TINTAMARBE5QIJE
de
NAPOLÉON III
par
TOUCHATOUT
Extrait de l'avant-propos de l'ouvrage.
Nous ne connaissons pas de personnalité mieux faite pour
tenter la plume, d'un historien, que celle de Napoléon III.
Nous avons hésité un instant entre lui et Robert Macaire.
Mais nous n'avons pas tardé à accorder la préférence au
héros de Sedan, qui nous a paru beaucoup plus complet
dans le genre.
Ce qui nous a surtout décidé, c'est que le public, en gé-
néral, ne connaît qu'incomplètement l'histoire de l'homme
qui a reculé de cinquante années l'aiguille de notre horloge
uationale.
Jusqu'en 1848, époque à laquelle ce sinistre saltimbanque
ï réussi le tour du gobelet qu'il avait déjà raté deux fois, la
vie de Napoléon III est peu connue. Nous allons tenter de
l'esquisser.
L'histoire de Napoléon III sera naturellement aussi celle
des hommes qui ont bourdonné au-dessus de son règne
^'abattant sur leur pâture, se relevant gavés, pour bourdonner
encore, se rabattre de nouveau et se gaver toujours.
Dans cette œuvre, nous ferons une large part à l'illustra
tion, ce moyen puissant d'éclairer les masses par le manque
de respect aux idoles.
TOUCHATOUT.
OUVRAGES DE TOUCHATOUT
en vente chez tous les libraires de paris et des
départements
Histoire de France tintamarresque, illustrée d'un nom-
bre considérable de dessins noirs et coloriés. — 100 livrai-
sons à 10 centimes ou 20 séries à 50 centimes. — L'ouvrage
est également complet en un beau volume grand in-8. Prix
broché, 10 fr.; franco ; 13 fr.
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du jour, illustrées de portraits-charge. Une livraison chaque
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