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L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré — 6.1873

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L'ÊGLIPSB

PRIME 8IATUITE DE L'ÉCLIPSÉ

Avoir tout Paris dans sa poche et sous les yeux dans la per-
sonne de ses Physionomies les plus curieuses et les plus origi-
nales et sous forme de charmants petits volumes-bijoux, illustres
par le crayon humouristiqut de Morin, de Benassis, de Vermer,
de Coock,"d'Humbert, etc , etc., etc., et dus à la plume de nos
plus spirituels et de nos plus fins observateurs :

Les Joueuses,

Les Artistes et Rapins,

Les Industriels du macadam,

La Parisienne,

Les Usuriers,

par Paul Perret, Louis Leroy, Adrien Paul, Élie FrébauU, etc.,
etc., etc., — tel est le privilège qu'offrs l'Éclipsé :

A quiconque prendra un abonnement d'un un,

Ou à quiconque, à dater de ce jour, renouvellera son abonne-
ment,

Sans autre déboursé que le prix d'envoi : un franc.

Nous recommandons tout particulièrement au public ces
esquisses fidèles et pittoresques des types les plus singuliers
qui émaillent la capitale. Ils se rapprochent, par le faire et le
genre, des anciennes Physiologie! si courues autrefois et si
recherchées aujourd'hui. C'est le Paris moderne, animé et
vivant.

LES CLICHÉS POLITIQUES

COURTE PRÉFACE

Si vous causez politique quelquefois, cher lecteur, vous
n'êtes pas sans avoir remarqué que ce genre de conver-
sation se composa exclusivement d'une série de vingt ou
ving-t cinq phraseâ cliehées dans lesquelles vous vous
cognez invariablement au bout de cinq secondes de dis-
cussion.

***

Comme, en gomme, il y a beaucoup de gens eur terre
à qui leurs occupations, ou leurs facultés intellectuelles,
ne permettéfet pas d'examiner les choses sur lesquelles ils
ont besoin de se faire une opinion,

Ils vont au plus court et s'en procurent une toute faite.

Tour cela, ils ramassent dans leur journal ou dans la
conversation d'un de leurs amis, une bonne grosse for-
mule bien ronronnante, bien lourde et bien bête.

Ils se la cousent sur la langue pour être sûrs de ne pas
la perdre.

Et ils ne sortent plus de là.

Vous pouvez désormais les attaquer sur le point qu'ils
viennent de fortiûïr.

Vous n'obtiendrez jamais aucun autre argument que
celui qu'ils ont appris par cœur ad hoc.

» *

En moins de trois mois, un boutiquier d'une intelli-
gence moyenne, et qui veut s'en donner la peine,a fait sa
provision de clichés pour toutes les questions politiques
possibles.

Une fois son clavier complet, il est inexpugnab'e.

Vous pouvez souvent, en y mettant de l'adresse et de
la persistance, instruire un ignorant, convaincre un in-
cré Iule, ramener un égaré, échauffer un indifférent,
triompher d'une erreur, rectifier un faux jugement, etc.,
etc...

Mats extirper du cervebt étriqué d'un bourgeois
bouffi un seul des clichés qu'il a figés dans sa graisse,
jamais... jamais... jamais. .

*

Aussi, en entreprenant aujourd'hui de passer en revue
les principaux raisonnements de confection dont les poli-
tiqueurs à treize font leurs bases d'opérations, nous
n'avons aucunement la prétention de déraciner ces lieux
communs.

C'est une simple nomenclature que nous voulons
dresser.

Une sorte de catalogue numéroté de? niaiseries qui se
débitent et reviennent régulièrement dans les conversa-
tions politiques des bonnetiers profonds qui, n'ayant pas
d'esprit à eux, raisonnent avec la bêtise des autres.

*

* *

Nous allons, &i vous le voulez, prendre et exécuter ces
rengaines, au hasard.

Cliché n° 1

M. PrudhOmme. — « La République est une très-bonne chose,
« mais elle est impossible tant que les naions voisines font en
e monarchie. »

N'est-ce pas, chers lecteurs, que vous la reconnaissez, cette
phrase-là ?

Pour mon compte, je l'ai bien entendue six cents fois depuis
deux ans.

Et le développement ne se faisait pas attendre.
Esquissons le développement :

M. Prudhomme — Oui... Essayez donc de fonder une Répu-
blique au milieu de quinze monarchies voisines, vous verrez
comment vous serez reçus... Vous ne trouverez ni sympathies,

ni argent, ni crédit, ni alliances. Vous imaginez-vous, par
hasard, que les têtes couronnées qui vous entourent donneront
l'accolade à M. Gambetta ?... Allons donc!... Tant que vous
serez en République, ne comptez sur personne. On s'éloignera
de vous... On vous montrera au doigt dans les cours étrangè-
res, comme les provinciaux montrent au doigt le monsieur qui
n'est pas marié à ïétj ise. Et toutes les puissances monarchiques
s'enten !ront pour ne'pia vous faire de bien jusqu'au jour où
elles pourront s'entendre pour vous faire du mal...

A une diBtanee de quelques kilomètres, ce cliché peut faire
quelque effet, mais il ne fout pas s'approcher: l'illusion s'éva-
nouit.

Essayons de répondre à M. Prudhomme.

— Est-ce donc une raison si la France avance d'un siècle sur
le reste de l'Europe, pour qu'elle marque le pas, en attendant
que l'Europe la rattrape.

Si la République française est obligée de se passer des sym-
pathies des monarques, qui sont un demi-quarteron en tout,
elle tâchera de se rattraper sur celles de leurs sujets qui $ont
deux cents millions au moins.

Et si la République française, enfin, ne parvient pas à gagner
l'amitié des trônes d'alentour, elle parviendra facilement à
leur inspirer une de ces frayeurs à la suite desquelles cessortes
de meubles ont généralement l'habitude de crouler dans les
soixante-douze heures.

Cliché n° 2.

M. Prudhomme. — « Je suis républicain; plus républicain que
« vous peut-être ; seulement, il me fxut un d'Orlians comme iran-
« sition ; parce que, voyez-vous, la République n'est pas possible en
« France, il n'y a pat assez de républicains. Pour faire des républi-
« eains, il nou-< faudrait une bonne République, et comme nous ne
« pouvons pas fain une République sans avoir de républicains... »

Pas de commentaires, n'est pas?

Cliché fi° 3.

M. Prubhomme. — « Avant de parler au peuple de ses droits,
« parkz-lui donc de ses devoirs. »

Celui-là, par exemple, c'est un cliché Krupp, et sur l'effet
duquel M. Prudhomme compte généralement beaucoup.

Le mot est agréablement construit, l'antithèse y est, la tour-
nure de phrase est malicieuse.

C'est aussi b.illant et aussi vide que de l'Alphonse Karr.

Si, à toutes ces qualités, ce cliché joignait seulement un peu
de sens commua, il serait parfait.

Répondons à M. Prudhomme.

Cela ne peut avoir aucune conséquence, M. Prudhomme ayant
l'habitude de se boucher hermétiquement les deux oreilles avec
ses doigts quand il a lancé une de ces phrases toutes faites,
afin de > e point entendre les objections.

Or ça, monsieur Prudhomme, nous trouvons donc que le
peuple est plus à cheval sur ses droits que sur ses devoirs, et
nous déplorons qu'il revendique ce que lui doit la société
avant d'avoir payé lui-même tout ce qu'il doit à la société.

C'est une impasse, cher monsieur Prudhomme ; l'ignorance
du peuple — et même, si voulez, son injustice — étant juste-
ment la conséquence de sa misère, plus vous le laissez misé-
rable, plus il devient injuste.

En exigeant de lui qu'il commence par devenir vertueux,
vous savez bien que vous lui demandez l'impossible.

Et c'est justement parée que vous savez bien que c'est impos-
sible que vous le lui demandez ; car derrière votre ch>hé de
moralité haut jûché, monsieur Prudhoaime, il y a votre pensée
sécrète d'égoïste bien enflanellé, et cette pensée ést celle-ci :

— Dieu!... que c'est intolérable d'entendre des gens crier
qu'ils ont faim pendant que l'on mange!... De quoi se plai-
gnent-ils en somme, les ouvriers ?... ,de manquer dé pain?...
j'en ai encore rencontré un qui était ivre samedi soir !... Avant
de réclamer une situation meilleure, que le peuplé qtii manque
de tout, commence donc par acquérir les vertus si faciles aux
gens qui ne manquent de rien!... Pendant ce temps-là, il nous
laissera digérer tranquilles...

Terminons, pour aujourd'hui, par le :

Cliché n° 4.

Un des plus usités depuis trois ans :
M. Prudhomme. — « Pas de politique devant l'ennemi. •
M. Prudhomme s'est tellement pelotonné dans ce cliché qui
fait si bien le compte de ses infirmités qu'il ne pourra plus

s'en défaire.

Le 20 septembre prochain, alors que !e dernier Prussien sera
en route pour l'Allemagne, allez demander à M. Prudhomme
ce qu'il pense de la suppression du Corsaire.

Il vous dira encore : •

— Chutj... Pas de politique deva nt l'ennemi.
Et si vous lui dites :

— Comment l'ennemi ?... Il n'y en a plus, il vient de partir.
Il ne se déconcertera pas et vous répondra :

— Eh bien, alors. . pas de politique derrière l'ennemi!...

LÉON BIENVENU.

LE REMPLAÇANT RELIGIEUX

Au moment où M. le préfet du Rhône rend le chemin' de
l'enfer si dur aux libres-penseurs, il est merveilleux de volt
les ladites qui sont faites aux catholiques pour gagneT douce-
ment le ciel.

Je m'en voudrais si aux arrêtés, sur-arrêtés et contre-arrêtés
de M. Ducros, je n'opposai3 pas ie dernier prospectus de Lour-
des.

Ce prospectus nous révèle une institution tout bonnement
admirable : celle du replacement TeligieuXi

Ça vous gêne ou ça vous enflUie d'aller à Lourdes. Qu'à si
peu ne tienne ! Vous n'avez qu'à y envoyer un autre à votre place.
Vous lui payerez le voyage ; il Pnera pour vous.et vousjouirez
sans déplacement de tous les avantages attachés au pèlerinage:
rémissioa des péchés, indulgences, bénédiction télégraphique,
etc. Sans compter que vous sauvez la France en même temps.
Ça, du reste, ça ne compte pas, c est Par-dessus le marché.
* Mais vous n'êtes pent-être pas WeH friand de vous déranger
pour chercher un remplaçant? Qu a cela Be retienne I On le cher-

chera pour vous. L'entreprise des pèlerinages ( limited respon-
sabiWy) les fournit au plus juste prix. Elle est toujours sûre
d'en trouver, selon son expression « parmi les membres, moins
« aisés de la grande famille. » Traduction en langue vulgaire :
« Il y a des gens si malheureux que, moyennant finances, il
« n'est pas de métier si étonnant qu'on ne puisse leur faire
» entreprendre. »

Il faut reconnaître qu'au moment où le remplacement mili-
taire est mis à néant par l'institution du service obligatoire,
imaginer le remplacement religieux constitue la plus heureuse
trouvaille. Il y a donc encore des beaux jours pour l'embau-
chage, et les raccoleurs vont pouvoir continuer leur intelligent
commerce à l'abri des comptoirs d'étain.

Nul doute, en effet, que les remplaçants religieux ne soient
d'ici peu très-clemandés sur la place II faudrait n'avoir pas
quarante sous dans sa poche pour se refuser la satisfaction de
taire exécuter par un autre toutes les petites cérémonies fati-
gantes qui sont la monnaie du ciel.

D'autant plus que rien n'empêche pendant ce temps-là le
remplacé, rassuré par l'idée qu'on s'humilie, qu'on se macère,
et qu'on se frappe la poitrine pour lui, de se laisser aller aux
petites douceurs de la vie accoutumée.

D'après cela, il est aisé de prévoir des vies en partie double
organisées comme suit, ou à peu près :

recommandations a moi-
même :

— Lecture au lit du dernier
roman en vogue.

— Correspondance galante.

— Bon déjeuner au café An-
glais.

— Promenade au bois.

recommandations a mon
remplaçant :
6 h. dumatin.—Messe basse.

g h.-

Midi.

Acte de contrition.
- Jeûne soutenu.

Récitation du chape-

2 h. -
let.

3 h. — Vêpres. — Sermon.

Th. — S'accuser humble-
ment de tous les péchés
que j'ai commis ; en de-
mander pardon à Dieu.

Minuit. — S'administrer, en
mon nom, quelques coups
de discipline.

- Baccarat au cercle.

- Location et occupation
d'une baignoire aux Folies-
Dramatiques.

- Aller souper chez Casca-
dette.

Je ne puis qu'applaudir, pour ma part, à cette heureuse in-
novation.
Seulement...

Ah ! voilà, il y a un seulement.

Seulement il m'apparaît tout à coup dans le système du
remplacement religieux un gros danger sur lequel les organisa-
teurs de pèlerinages {limited responsability ) feront bien d'ouvrir
l'œil.

Le danger, c'est que le bon Dieu, — qu'ils ont peut-être
négligé de prévenir de ce mode de substitutions, — c'est que
le bon Dieu, voyant le seul remplaçant s'abîmer de dévotion,
lui donne de confiance entrée dans le ciel, sans se douter que
ce pauvre diable travaillait pour un autre.

Le danger est sérieux. Je pense que les instigateurs du
remplacement religieux y songeront.

PAUL PARFAIT.

il SONGE D'UNE NUIT D'ÉTÉ

C'e<tt la nuit, une nuit de juillet, ma foi, mais dejuillet 1873.
Il pleut à torrents. Au pied d'une haute tour dont les créneaux
percent le ciel, comme dans la Dame-Blariche,ss promène,
de long en long, une sentinelle armée d'un fort sabre. On
vient de la mettre en faction, à la place d'une sentinelle de
petite taille, dont les lunettes Willaiént tout à l'heure aux
rayons de la lune, et qui était là, de planton, depuis deux ans
passés. ""'riaÉlaStP .'.->*•

Tout en haut de la tour, dans le cadré noir d'une étroite fe-
nêtre, on aperçoit une lueur qui tremble, et sur cette lueur se
découpe une ombre noire. L'ombre d'une dame coiffée d'un
bonnet phrygien.

La sentinelle se promène, de long en long, et parfois de

large en large. Il pleut à verse.

Tout à coup, sur la point* du pied, un être s'avance pru-
demment, puis, profitant d'un instant où la sentinelle a tourné
le dos, il murmure :

— Hé ! la haut?...

—- Qui m'appelle? répond une voix qui deseend de la fenêtre
de la tour.

— C'est moi, ton légitime I Ne me reconnaifl-tu pas? Je suis
ton seul amoureux.

— Mon légitime ? Qui cela ?

— Ton Henri. — Je t'aime !— Écoute, ma bien-aimée, je
brave les plus grands dangers pour te parler une seconde. J'ai
trompé la surveillance de mes amis de cabinet. Ils me croient
endormi. Mais je veille ! Viens, descends. Tu le peux. Nul
soupçon. Viens, je te ferai faire de si beaux pèlerinages ! Nous
irons en procession, à la queue leuleu. Viens donc.

— Allez vous-en ou j'appelle ! répond la voix d'en haut.

— Cruelle ( fait l'inconnu. Et moi qui ai sacrifié quatre-
vingt-deux préfets pour toi ce matin ! Cruelle !

— Passez au large ! s'écrie soudain la sentinelle de sa grosse
voix, ou je vous fourre au poste, vous, là-bas.

Henri ne se le fait pas répéter. Il s'éloigne avec vitesse, en
soupirant :

— Cette sentinelle est bien mal élevée 1

***

A peine Henri a-t-il disparu, qu'un autre individu, qui sent
la violette, et dont les éperons sonnent; s'avance, le poing sur
la hanche. Le bruit qu'il fait entortillant sa moustache résonne
dans la nuit.

— Pssst ! fait-il.

— Èh bien? riposte la voix de la tour.

— Allons, arrive ici, la petite. Ne fais pas ta tête, sacreblenl
Est-ce que tu ne me connais pas? J'arrive d'Angleterre. Je crève
de froid et de faim. Tu ne m'aimes donc plus?

— Qui êtes-vous?

— Ja suis le fils du neveu de l'autre. Je me moque pas mal
de ce qu'on dira. Les camarades du cubinet roupillent. La nuit
est noire. L'occasion est bonne. J'ai mon casse-tête. Allons,
descends ! je t'aime I Tu le sais bien. Ne me la fais pas à la
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