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L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré — 8.1875

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https://doi.org/10.11588/diglit.6768#0174
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Prime extraordinaire et gratuite de l'Eclipsé

DONNÉE A TOCS LES NOUVEAUX ABONNÉS D'UN AN OU AUX ABONNÉS ACTUELS QUI RENOUVELLERONT LEUR ABONNEMENT D'UN AN PAR ANTICIPATION

VÊCLIPSE a acquis le droit d'offrir en prime à ses abonnés la publication à succès du moment : Y édition illustrée de LA FILLE
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LA 5F LETTRE RÉPUBLICAINE

DE GERVAIS MARTIAL

Ouvrier.

AU CITOYEN ROGER , son camarade d'atelier.

Où Gervais Martial convient bien que son
camarade Roger avait un peu raison de se
refuser à danser de joie le 25 février der-
nier, mais essaie, en même temps, de lui
prouver que les choses ne sont peut-être pas
en aussi mauvais état qu'il le croit, et lui
indique en tous cas le seul moyen qui reste
aux républicains de les rendre meilleures.

Citoyen Roger,

Qui nous eût dit, après le 25 février, époque vers laquelle
je t'ai adressé une de mes premières lettres, que les choses
tourneraient comme elles ont tourné depuis cette époque?

Il soufflait alors un tel vent de concorde, chacun semblait
avoir fait avec tant d'empressement le s crifice de ses pré-
tentions au profit de la France, que la République parais-
sait enfin fondée.

Et nous étions tous dans une grande joie.

Moi, du moins.

Car je me souviens que toi, citoyen Roger, tu continuais
à bouder, et que j'ai même dû t'écrire une lettre dans
laquelle je m'efforçais de te faire voir les choses en rose.

Tu étais loin d'être satisfait, ce que je comprenais très-
bien d'ailleurs; mais tu te refusais à considérer comme sé-
rieux cet étonnant mouvement de détente qui s'était pro-
duit, et tu me répétais sans cesse avec mauvaise humeur :

— Bah!... laisse-moi donc tranquille... Je te dis que nous
n'y gagnerons rien à tout cela, c'est toujours les mêmes
b'-ilançoir-s.

Moi, j'avais plus confiance quetoi.etj'éssayaisdetelafuire
partager.

Il me semblait qu'au point où en étaient arrivées les cho-
ses, qu'après que les partis y avaient mis tant de bonne
volonté chacun de son côté, tout allait marcher comme sur
des roulettes.

Je croyais qu'une fois engagés dans la voie républicaine,
les uns par amour, les autres par raison, tous ceux qui
avaient fait la Republique allaient, marcher carrément dans
ce sens, et qu'avant six mois nous aurions fait déjà un assez
joli bout de chemin.

Je voyais dans ua avenir très-rapproché :

La mise en disponibilité de tous les anciens fonctionnai-
res impériaux ;

La levée de l'état de siège ;

La liberté rendue à la presse ;

La loi municipale révisée ;

Les/élections préparées avec impartialité;

La dissolution;

L'amnisiie;

Et enfin, la venue d'une nouvelle Assemblée qui eût
sanctionné toutes ces mesures au nom de la France, solen-
nellement et librement consultée.

Je voyais tout cela, citoyen Roger.

Toi, tu ne le voyais pas.

Et nous avions, à ce sujet, de grosses discussions.

Aujourd'hui, j'en conviens, les événements paraissent
t'avoir donné raison.

Et tu me disais l'autre soir, en sortant de la paie, avec
ton air pas mal gouailleur :

— Eh bien !.., Gervais-le-Sentimental... où en es-tu de
tes beaux rêves de concorde, de réconciliation?... As-tu con-
servé encore quelques illusions sur ton 25 février, qui « fer-
mait l'ère des haines et des discordes ?... »

Et, comme je ne répondais pas gratid'choie, tu m'accablais
en ajoutant :

— Ta République les a bien mis en disponibilité les an-
ciens fonctionnaires de l'empire.

Elle a bien levé l'état de siège, ta République 1...
Elle a bien donné la liberté de la presse!...
Elle a bien rendu aux citoyens le droit de choisir leurs
maires!...
Elle a bien fait voter l'amnistie!...

Ah!... elle a bien imposé silence aux partis monarchi-
ques!... Elle les a bien forcés à la reconnaître et à la respec-
ter, ta République!... Je te fais mon sincère compliment.

Que Veux-tu que je réponde à tout cela, citoyen Roger;
tout ce que tu me dis est malheureusement exact.

J'ai été plus naïf que toi; j'en conviens.

Mais, ai-je vraiment eu tort de l'être, et tout ca qui se
passe depuis huit mois était-il dans les choses probables?

Qui pouvait supposer que nous tomberions de de Broglie
en Buffet.

Qui pouvait supposer que la République dûment procla-
mée et reconnue, il se trouverait un ministre qui s'impose-
rait pour tâche unique de saper l'œuvre qui l'avait porté au

pouvoir, de braver à tout instant l'opinion publique et de
profiter, enfin, de l'absence de l'Assemblée qui avait établi
la République pour démolir petit à petit son œuvre?

11 n'était permis à personne, citoyen Roger, à personne
d'admettre une chose aussi invraisemblable.

Oui, tu es dans le vrai.

Nous sommes, en apparence du moins, beaucoup moins
en République aujourd'hui que nous ne l'étions avant le 23
février.

Jamais le personnel de l'administration n'a été si complè-
tement hostile à la forme républicaine.

Jamais l'exisfence de la Republique n'a été contestée avec
autant d'audace et de furie par les feuilles bonapartistes.

Jamais les républicains n'ont été plus injuriés, plus in-
sultés, plus calomniés, plus humiliés, plus écartés, plus
honnis.

Jamais, depuis Sedan, les bonapartistes n'ont été si proté-
gés, si arrogants si menaçants...

Oui, tout cela est vrai, citoyen Roger.

Mais crois-tu que nous soyons pour cela plus loin du
but.

Et ne penses tu pas que tout ce tapage que font nos enne-
mis, et que l'on peut prendre à distance po r des cris de
victoire, n'est pas plutôt, en réalité, un hurlement d'effroi?

Je cois qu'il faut bien se garder, citoyen Roger, de con-
sidérer tout ce qui s'est passé de fâcheux depuis que l'As-
semblée est en vacances, comme un pas en arrière.

La faveur obstinément irritante dont a pu jouir un préfet
détesté, la rigueur de laquelle les républicains ont été vic-
times, la complaisance incroyable qui s'est étendue sur des
feuilles chislehurtiennes au point de laisser imprimer les
appels aux coups d'Etat;

Tout cela, citoyen Roger, n'est pas le moins du monde
une manifestation de l'opinion publique.

C'est la simple conséquence de l'entêtement et du mauvais
vouloir d'un homme, d'un ministre fatalement choisi.

La cause républicaine, sois-en bien convaincu, n'a pas
perdu un pouce de terrain depuis le 23 février.

Il est même hors de doute qu'elle a bénéficié — cela est
dans l'ordre naturel—de tous les actes d'arbitraire qu'elle
a dû essuyer, de toute la résistance que le régime du bon
vouloir lui a fait subir.

Des obstacles!... Parbleu!... elle en rencontrera encore...
et beaucoup.

Pas plus que toi, je n'ai jamais cru que laRépublique de-
viendrait l'enfant gâtée de parents qui l'ont enfantée un peu
malgré eux.

Je sav is très-bi n, citoyen Roger, qu'ils ne mettraient
pas la petite dans du coton, qu'ils ne l'allaiteraient pas d'une
façon bien confortable. J

Je me doutais bien qu'ils la chaufferaient peu, la vêti-
raient mal, ne lui donneraient pas de jouets, pas de gâ-
teaux... En un mot qu'ils l'élèveraient à la dure. •

Mais je me disais, et je me dis encore, citoyen Roger :

— Bast! — Ce ne sont pas les bébés les plus choyés qui
ont le meilleur tempérament : ayant souffert, la petite n'en
sera que plus rustique.

Et puis, citoyen camarade, je comptais sur cette circons-
tance exceptionnelle — et sur laquelle je compte encore.

C'est que la maman qui a mis au monde la petite étant
déjà vieille n'a plus de lait et qu'elle va être naturellement
forcée de remectre l'enfant à une nourrice.

C'est cette nourrice -à, citoyen Roger, qui décidera de la
santé de la petite.

Aussi, nous allons tâcher de la bien choisir. N'est-ce pas?

Salut et fraternité.

GERVAIS MARTIAL,
Ouvrier.

LES FAITS DIVERS

Les faits divers constituent l'histoire au jour le jour et
anecdotique de Paris.

Les journaux peuvent supprimer le bulletin politique,
l'article de fond, les variétés, le cours de la Bourse, les an-
nonces ; ils peuvent même supprimer le feuilleton. Tant que
les faits divers seront alignés on bon ordre, le rédacteur en
chef pourra dormir tranquille sur la mise en pages, et dou-
bler le cap du réabonnement avec une satisfaction légitime.

Pour la politique, il restera la télégraphie.

Les variétés e le feuilleton feront des livres.

Le cours de la Bourse se vendra sur les boulevards.

Les annonces tapisseront les murailles.

Mais, sous peine de mort, un journal ne peut chasser les
faits divers de ses colonnes.

De l'avis des directeurs les plus expérimentés, le fait divers
est le grand ressort de l'horloge, la charpente de l'édifice, le
squeletie du corps politique.

Le reste est la draperie.

On ne s'attend pas à nous voir rechercher les origines
du fait divers depuis Bachaumont jusqu'au Constitutionnel,

Il y a sept faits divers principaux que nous allons exami-
ner dans leur ordre :

Le fait divers officiel. — Il comprend le résumé des décrets,
les mutations dans la magistrature et autres corps de l'Etat,
les coupes de bois, les emprunts, les voyages des souverains,
princes, ambassadeurs, etc

Dans son cadre rentrent la nécrologie, les bals, les récep-
tions officielles, etc., etc.

Édilitè. — Où serait l'histoire du vieux Paris, si le modeste
fait divers ne racontait pas tous les jours, rue par rue, mai-
son par maison, pierre par pierre, l'histoire des expropria-
tions, des démolitions, des reconstructions et des modifica-
tions opérées dans l'enceinte des fortificatio s?

Si les archives de la ville de Paris brûlaient, on les re-
construirait avec une collection de journaux.

Accidents. — Et maintenant, pour nous servir d'une for-
mule oratoire de Bossuet, venez, sinistres terrestres et mari-
times, feu, terre, eau, ciel, incendies et noyades; venez, pui-
satiers engloutis vivants dans les mines; venez, bonnes
femmes écrasées par les voitures, et vous aussi, hospitaliers
pharmaciens, venpz, chevaux abattus, navires engloutis et
avariés; viens, tonnerre, toi qui, par un seul fait divers,
change le sexe des agriculteurs de notre belle patrie ; venez,
imprudents nageurs, et vous, pâles habitants des dalles hu-
mides de la morgue ; venez, enfants perdus et retrouvés,
femmes disparues, couvreurs tombés des échafaudages, vous
tous qui, circulant dans la grande usine parisienne, avez
été saisis, éclopés, broyés dans le terrible jeu di ses engre-
nages, venez dire qui se serait souvenu de votre accident, si
le fait divers n'avait pas f >it verser des larmes sympathiques
sur vos obscures destinées.

Vous aussi, vous avez une page dans l'histoire. Tous,
nous sommes égaux devant la loi du fait divers, car la voi-
ture qui passe sur le corps d'un homme ne lui demandepas
ses parchemins. Ri< he ou pauvre, il n'y a plus de castes et
de distinctions sociales, il n'y a que des écrasés.

Elle est longue, la liste des malheureux enregistrés cha-
que jour, mais on s'y nabi ue vite. On ne peut pas, non
plus, mourir de douleur, drapé dans un numéro de son
journal du soir.

Tribunaux. — Venez aussi, pendant que nous y sommes,
filous et voleurs assermen és près les diverses chambres delà
police correctionnelle, vagabonds, faux-monnayeurs, récidi-
vistes, rôdeurs de barrière, escarpes, aimable bataillon qui
avez au bagne votre état-major.

Bien avant que la lessive sanglante de votre conscience
et de vos excentriciiés se fît dans les journaux de France
et de l'étranger, le fait divers précurseur anno çait l'aurore
de votre acte d'accusation et jetait la consternation dans les
localités les plus lointaines.

"Vingt-sept victimes. —i Huit ménages empoisonnés par une do-
mestique de dix-neuf ans. — Curieux et horribles détails. —
Révélations de l'accusée. — Elle avait une mère. — Deux cent
quatrevingt-trois témoins, etc., etc.

« Un drame épouvantable, qui laisse bien loin derrière
lui tout ce que les annales criminelles, etc. »

Dans les cordes plus éoliennes, il y a les personnages se-
condaire, ligures un peu pâles, un peu effacées à eôtô des
premiers rôles de la cour d'assises :

« Un vol inqualifiable. »

Ou bien :

« Un vol des plus ingénieux. »

Bientôt les filous demanderont un brevet pour les trucs
inédits.

Le fait divers liégeois. — Et toi, baromètre de l'ingénieur
Chevalier, à quel roi fait-on mieux les honneurs d'une pu-
blicité journalière? Tes plus légères oscillations sont calcu-
lées, pesées, enregistrées par les observatoires, par les jour-
naux, par les badauds. 0 thermomètre I tu es populaire
comme Henri IV, qui te regarde. Tu gouvernes les éléments
et les parapluies. Je t'admire.

Te voilà à la température des vers à soie. Arrête-toi, ne va
pas plus loin, car au-dessus du Sénégal tu ne serais plus un
thermomètre, tu serais un jet de mercure.

C'est le fait divers atmosphérique qui entretient nos plus
chères illusions. Au réveil de la nature, il nous annonce que
jamais la moisson n'a donné de si belles esplrances, que
la vigne ne sera pas malade, que les céréales effondreront
nos magasins.

Avec quelles précautions le fait divers laisse entrevoir,
soupçonner que l'oïdium pourrait bien relever la tête dans
les Charentes. Il est tombé un peu de grêle dans le Poitou*
Enfin, après les ménagements les plus discrets, les périphra-
ses les plus dôlicatis, les circonlocutions les plus adroites, il
arrive à nous apprendre, tout doucement, que les récoltes
sont perdues, les vignes empoisonnées sur toute la ligne, et
que l'oïdium attaque les tuteurs eux-mêmes.

Le fait divers, sur de telles bases, s'élève à la hauteur
d'une institution. C'est un sacerdoce, ma parole d'honneur.
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