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LIVRE D'OR DE L'EXPOSITION
LE LIVRE
'iAiPRiMEmE n'a en Occident que
quelques siècles de date. Le
Livre est vieux comme ie monde.
Qu'est-ce que le Livre? c'est
la reproduction et la transmis-
sion du Verbe. C'est la parole
non seulement fixée par l'écri-
ture, mais annoncée à beaucoup
par un moyen quelconque de
diffusion. Aussi le Livre est né
avec le premier bégaiement du
premier Adam, dans un Eden
problématique, ou sur le rude
sous-bois d'une forêt primitive, où pied à pied l'homme
disputait une patrie à la nature.
Hiéroglyphes indéchiffrés et àjamais indéchiffrables, sur
les manches de corne des armes premières ; cunéiformes de
la Bactriane, tables de pierre de l'Inde brahmanique, ou
de Sion, cartouches de l'Égypte sacerdotale, colliers de
coquillage du Sioux ou du Pauwnie, nous vous saluons,
car vous êtes les Livres de l'humanité, hésitante au premier
pas dans la vie. Vous êtes ses Bibles et ses Zend Avesta.
C'est vous qui avez éveillé le cri de la conscience humaine,
jeté les semences de lumière et de responsabilité.
Et vous êtes aussi les chansons charmeuses, les poèmes
qui délassèrent les membres fatigués des races qui mar-
chaient vers le soleil intellectuel et matériel. Les plus
farouches, comme les plus civilisés, se sont transmis,
inscrites de cent façons diverses, les rapsodies de bardes
inconnus, à la fois prophètes, législateurs, poètes et dieux.
Le vieil Homère, peut-être né de l'imagination d'une race
postérieure, est à jamais entré dans l'immortalité par 1e
Livre, et c'est le Livre qui sous les souffles caressants des
brises ioniennes, nous redit la douce histoire de Daphniset
de Chloé.
Vous êtes le Livre aussi, manuscrits bardés de fer aux
bibliothèques monacales. Dans l'ombre des grands cloRres,
traversant les barbaries des siècles vous gardiez les tradi-
tions de sciences et de lettres de l'antiquité.
Et aujourd'hui le Livre est le roi de ce temps, 'il en est
aussi le moteur principal, rien ne se fait qu'il n'ait ébauché
et qu'il ne constate. Le Journal, ce Livre de chaque jour,
mène le monde et lui façonne ses idées, ses sentiments, ses
opinions.
Voilà pourquoi il mérite une place d'honneur et une
mention toute spéciale. On peut hardiment affirmer que
sans le Livre, l'Exposition n'aurait pu exister.
Si, ressuscité par une évocation quelconque, il pouvait
revenir sur terre, il aurait 1e droit d'être fier de son œuvre,
Maître Hans Geinflesch de Sulgelback, plus connu sous le
nom de Gutenberg.
Mais il serait, tout autant que fier, étonné des moyens de
production : les arts du Livre, les industries du Livre sont
devenu légion. Au Champ de Mars nous trouvons le Livre
partout.
11 esta la Galerie des Machines avec les papeteries, les
machines pour l'impression et les machines accessoires.
Il est dans toutes les sections étrangères, donnant un
crffermm exact des degrés de civilisation de chaque nation.
Tant vaut le Livre, tant vaut le pays.
Il est aux Arts libéraux avec les sections d'imprimerie,
de librairie, des arts graphiques, de géographie et de
photographie, etc.
Le champ du Livre, qui est lui-même le vaste champ de
l'Idée, est immense, et nombreux sont ceux qui travaillent
et, selon la belle expression des typographes parisiens,
^MC?'6/?f /g /R'fd. Nous allons voir les principaux ouvriers
de cette tâche grandiose.
Mais soyez prévenu d'abord que ce sont des humbles et
des petits. Le Livre, si lié à la vie de l'homme, est comme
l'homme sorti d'un grossier limon, c'est du contact d'un
peu de noir de fumée avec une feuille venue d'un vieux
chiffon, que jaillit le Verbe écrit, impérissablement.
De ces deux matières sans valeur il naît pour que l'hu-
manité rie, le pour qu'elle sache, le Zh'RC02??'R
RM?' A%#eY/?o&;pour qu'elle prie, TT???PaD'o?^;pour qu'elle
soit libre, le IVeM%Co?'&Per.
Et ceux qui prirent pour la fixer la pensée de Rabelais,
de Descartes, de Thomas àKempis, de Camille Desmoulins
ce sont ces hommes et ces femmes en sarreaux noirs qui
lèvent les lettres, ces gamins en cotte et bourgerons bleus
qui tirent les feuilles.
Quand le Livre parait, sonnant un glas ou une fanfare,
nul ne songe à ceux qui, lettre par lettre, page par page,
l'assemblèrent, lui donnèrent sa forme et le parachevèrent
jusqu'au /bH PD??p?M???e?', que les maîtres typographes de
jadis mettaient au bas de leurs ouvrages.
LE TAPIER
Il est d'usage de dire que le papier se fait de chiffons. La
vérité est que le papier, du moins ie papier courant, se fait
à peu près de tout, sauf des chiffons.
Les installations de papeterie de la Galerie des Machines
ne comportent pas d'autre fabrication que celle du papier
fait de pâte de bois. C'est-à-dire que le chiffon n'y joue
aucun rôle. On ne l'emploie plus aujourd'hui que dans la
fabrication de certains papiers de luxe, et encore est-on
arrivé à faire des papiers presque de luxe avec de la pâte
de bois.
L'emploi à peu près exclusif du bois a divisé l'industrie
du papier en deux industries. La fabrication de la pâte
qui a besoin d'être placée près des pays de production
forestière, s'est séparée de la fabrication du papier propre-
ment dite, qui reçoit comme matière première non plus
du bois, mais de la pâte.
Cette pâte dont on peut voir des échantillons dans une
vitrine voisine de l'exposition des papeteries d'Cssonnes, se
présente sous un aspect cotonneux, exactement, c'est la
LIVRE D'OR DE L'EXPOSITION
LE LIVRE
'iAiPRiMEmE n'a en Occident que
quelques siècles de date. Le
Livre est vieux comme ie monde.
Qu'est-ce que le Livre? c'est
la reproduction et la transmis-
sion du Verbe. C'est la parole
non seulement fixée par l'écri-
ture, mais annoncée à beaucoup
par un moyen quelconque de
diffusion. Aussi le Livre est né
avec le premier bégaiement du
premier Adam, dans un Eden
problématique, ou sur le rude
sous-bois d'une forêt primitive, où pied à pied l'homme
disputait une patrie à la nature.
Hiéroglyphes indéchiffrés et àjamais indéchiffrables, sur
les manches de corne des armes premières ; cunéiformes de
la Bactriane, tables de pierre de l'Inde brahmanique, ou
de Sion, cartouches de l'Égypte sacerdotale, colliers de
coquillage du Sioux ou du Pauwnie, nous vous saluons,
car vous êtes les Livres de l'humanité, hésitante au premier
pas dans la vie. Vous êtes ses Bibles et ses Zend Avesta.
C'est vous qui avez éveillé le cri de la conscience humaine,
jeté les semences de lumière et de responsabilité.
Et vous êtes aussi les chansons charmeuses, les poèmes
qui délassèrent les membres fatigués des races qui mar-
chaient vers le soleil intellectuel et matériel. Les plus
farouches, comme les plus civilisés, se sont transmis,
inscrites de cent façons diverses, les rapsodies de bardes
inconnus, à la fois prophètes, législateurs, poètes et dieux.
Le vieil Homère, peut-être né de l'imagination d'une race
postérieure, est à jamais entré dans l'immortalité par 1e
Livre, et c'est le Livre qui sous les souffles caressants des
brises ioniennes, nous redit la douce histoire de Daphniset
de Chloé.
Vous êtes le Livre aussi, manuscrits bardés de fer aux
bibliothèques monacales. Dans l'ombre des grands cloRres,
traversant les barbaries des siècles vous gardiez les tradi-
tions de sciences et de lettres de l'antiquité.
Et aujourd'hui le Livre est le roi de ce temps, 'il en est
aussi le moteur principal, rien ne se fait qu'il n'ait ébauché
et qu'il ne constate. Le Journal, ce Livre de chaque jour,
mène le monde et lui façonne ses idées, ses sentiments, ses
opinions.
Voilà pourquoi il mérite une place d'honneur et une
mention toute spéciale. On peut hardiment affirmer que
sans le Livre, l'Exposition n'aurait pu exister.
Si, ressuscité par une évocation quelconque, il pouvait
revenir sur terre, il aurait 1e droit d'être fier de son œuvre,
Maître Hans Geinflesch de Sulgelback, plus connu sous le
nom de Gutenberg.
Mais il serait, tout autant que fier, étonné des moyens de
production : les arts du Livre, les industries du Livre sont
devenu légion. Au Champ de Mars nous trouvons le Livre
partout.
11 esta la Galerie des Machines avec les papeteries, les
machines pour l'impression et les machines accessoires.
Il est dans toutes les sections étrangères, donnant un
crffermm exact des degrés de civilisation de chaque nation.
Tant vaut le Livre, tant vaut le pays.
Il est aux Arts libéraux avec les sections d'imprimerie,
de librairie, des arts graphiques, de géographie et de
photographie, etc.
Le champ du Livre, qui est lui-même le vaste champ de
l'Idée, est immense, et nombreux sont ceux qui travaillent
et, selon la belle expression des typographes parisiens,
^MC?'6/?f /g /R'fd. Nous allons voir les principaux ouvriers
de cette tâche grandiose.
Mais soyez prévenu d'abord que ce sont des humbles et
des petits. Le Livre, si lié à la vie de l'homme, est comme
l'homme sorti d'un grossier limon, c'est du contact d'un
peu de noir de fumée avec une feuille venue d'un vieux
chiffon, que jaillit le Verbe écrit, impérissablement.
De ces deux matières sans valeur il naît pour que l'hu-
manité rie, le pour qu'elle sache, le Zh'RC02??'R
RM?' A%#eY/?o&;pour qu'elle prie, TT???PaD'o?^;pour qu'elle
soit libre, le IVeM%Co?'&Per.
Et ceux qui prirent pour la fixer la pensée de Rabelais,
de Descartes, de Thomas àKempis, de Camille Desmoulins
ce sont ces hommes et ces femmes en sarreaux noirs qui
lèvent les lettres, ces gamins en cotte et bourgerons bleus
qui tirent les feuilles.
Quand le Livre parait, sonnant un glas ou une fanfare,
nul ne songe à ceux qui, lettre par lettre, page par page,
l'assemblèrent, lui donnèrent sa forme et le parachevèrent
jusqu'au /bH PD??p?M???e?', que les maîtres typographes de
jadis mettaient au bas de leurs ouvrages.
LE TAPIER
Il est d'usage de dire que le papier se fait de chiffons. La
vérité est que le papier, du moins ie papier courant, se fait
à peu près de tout, sauf des chiffons.
Les installations de papeterie de la Galerie des Machines
ne comportent pas d'autre fabrication que celle du papier
fait de pâte de bois. C'est-à-dire que le chiffon n'y joue
aucun rôle. On ne l'emploie plus aujourd'hui que dans la
fabrication de certains papiers de luxe, et encore est-on
arrivé à faire des papiers presque de luxe avec de la pâte
de bois.
L'emploi à peu près exclusif du bois a divisé l'industrie
du papier en deux industries. La fabrication de la pâte
qui a besoin d'être placée près des pays de production
forestière, s'est séparée de la fabrication du papier propre-
ment dite, qui reçoit comme matière première non plus
du bois, mais de la pâte.
Cette pâte dont on peut voir des échantillons dans une
vitrine voisine de l'exposition des papeteries d'Cssonnes, se
présente sous un aspect cotonneux, exactement, c'est la