Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
58

L’EXPOSITION DE PARIS

' LE

MINISTÈRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE1

v l’exposition

La part réservée à l’exposition du mi-
nistère de l’instruction publique en 1867
était assez restreinte. Quand le visiteur
avait dépassé le portique, d’assez belle
ordonnance, où se lisaient ces paroles at-
tribuées à Napoléon III : « Dans le pays
du suffrage universel, tout citoyen doit sa-
voir lire et écrire, » il ne trouvait qu’un
nombre assez peu considérable de travaux
d’élèves, de documents relatifs à l’ensei-
gnement, de dessins des écoles du gouver-
nement, d’appareils géographiques, de
modèles et de reproductions du matériel
scolaire. L’emplacement le plus étendu
était affecté à quelques spécimens des
missions scientifiques, qui prenaient alors,
sous l’impulsion de M. Duruy, un nouvel
-essor. Un portique mexicain, élevé sur les
plans de M. Léon Méhesdin, divers instru-
ments du culte bouddhique, parmi les-
quels un « moulin à prières » attira prin-
cipalement l’attention ; quelques trophées,
des albums de photographies, et c’était
tout. L’enseignement libre, l’enseigne-
ment congréganiste surtout, était plus
largement représenté que celui de l’État :
les envois des écoles des Frères occupaient
tout un côté de la place réservée aux clas-
ses 89 et 90; les sujets religieux domi-
naient : la statue de l’abbé de La Salle,
s’élevant au seuil du portique, n’avait pas
pour pendant celle d’un maître de l’U-
niversité.

Cette année, l’exposition proprement
dite du ministère, conçue dans un esprit
véritablement libéral, occupe à elle seule
trois grandes salles. Elle offre une vue
très-complète des travaux entrepris et des
progrès accomplis depuis 1867, qu’elle ré-
sume avec un ordre, une méthode, une
clarté remarquables.

La circulaire aux recteurs du 18 dé-
cembre 1877, qui fut un des premiers
actes de M. Bardoux, contenait cet appel :
« Entourés que nous sommes d’émules et
de rivaux, efforçons-nous de faire éclater
à tous les yeux les généreux efforts de
l’Université. L’Exposition nous fournira
le moyen de montrer à nos détracteurs la
pureté des doctrines professées par notre
personnel enseignant, en même temps que
le solide mérite et l’immense 'variété de
ses travaux... » Ce passage a été le mot
d’ordre de l’exposition actuelle et il a été
fidèlement suivi. Cet amas de livres et de
choses, résultat d’un prodigieux et inces-
sant mouvement d’idées, constitue un en-

1. Nous empruntons cet intéressant article à la
Revue politique et littéraire, publiée par M. Germer-

Haillière.

semble dont l’importance n’échappera
qu’à un esprit prévenu. Ce simple exposé,
témoignant par ses œuvres de ce qu’elle
est, de ce qu’elle produit, de ce qu’elle
pense, était la meilleure, la plus digne
réponse que pût faire à l’Université cléri-
cale l’Université nationale.

I

Le grand public, celui qui ne voit que
par les yeux et qui n’a le temps que de par-
courir les galeries du Champ-de-Mars,
s’arrête d’abord aux produits des missions
scientifiques, qui sont accumulés dans la
première salle. Le Musée ethnographique
provisoire, dont l’idée seule est une preuve
du développement de ces études et de l’in-
térêt que commence à y prendre la foule,
a singulièrement excité le goût du public
pour ces collections curieuses, acquises,
la plupart du temps, au prix de dangers
et de fatigues inouïs. Le nom des mission-
naires a dépassé le cercle du monde sa-
vant, et tous ceux qui ont suivi les confé-
rences de janvier et février rendent la
justice qu’ils méritent à nos courageux
voyageurs français, dont quelques-uns,
comme M. Wiener, ont dû faire plus d’une
fois le coup de feu pour se rendre maîtres
d’un objet convoité. L’histoire des mis-
sions scientifiques, disséminée dans des
rapports et des articles, est un livre po-
pulaire à faire, — le livre d’or de la
science. Et quel livre ! quel sujet de ta-
bleaux variés et d’éblouissantes descrip-
tions que celui qui, du fond de l’Inde in-
connue, avec ses merveilles de couleur,
ses déploiements de pompes, signes exté-
rieurs de mythes redoutables, ses riches-
ses d’architecture, ses pagodes carrées,
ses statues aux yeux de diamants gros
comme des œufs, nous transporterait au
milieu de l’Asie centrale, à peine ouverte
aux Européens et leur dévoilant à regret
les splendeurs de ses palais, de ses harems
et des ses bazars; qui, nous faisant traver-
ser l’Atlantique, nous conduirait en pleine
Amérique du Sud, retrouvant pour nous
les restes d’un monde disparu, relevant
les idoles tombées, forçant les ruines à
nous révéler les secrets de l’époque gran-
diose qu’elles attestent, et, quittant ce
berceau de civilisations écroulées, nous
ramènerait audacieusement au cœur de
l’Afrique centrale, dans ces contrées sans
limite, sans autre histoire que le flot per-
pétuel des migrations de leurs races in-
quiètes, et auxquelles on a pu si long-
temps appliquer ce vers du poète grec :

Tov èptèv x^wva otfôeiç àirexàXvtpev.

« Personne n’a soulevé mon voile » !

Dans l’exposition du ministère, le objets
rapportés par M.' Charles Wiener et ses

reproductions tiennent un des premiers
rangs comme importance. Il a fait quel-
que part, dans des pages aussi émouvan-
tes que le roman le plus intéressant, le
récit de sa mission au cœur du Pérou et
de la Bolivie, accomplie au milieu de tou-
tes les difficultés et de tous les obstacles
imaginables. Ayant à lutter à la fois contre
l’hostilité des Indiens, les énervements
d’un climat brûlant, contre la nature
même, il est parvenu à rapporter en Eu-
rope plus de 4,000 pièces curieuses, mais
au prix de quelles fatigues ! N’est-ce pas
lui qui, pour s’emparer de deux momies,
placées dans de petites grottes creusées
au flanc d’énormes roches schisteuses, se
faisait descendre à cheval sur un bâton
attaché perpendiculairement à la corde
que tenaient ses guides I Ruse, patience,
courage, il a dû, pour mener à bien sa
mission, déployer toute l’énergie des aven-
turiers de Cooper : il a fait de la science
•la carabine au poing. La Porte monumen-
tale reproduite sous sa direction, ainsi
que la Fontaine monolithe péruvienne,
sont de remarquables travaux qui lui font
le plus grand honneur.

C’est aussi à l’Amérique méridionale et
centrale que MM. Pinart et de Cessac ont
été demander l’inestimable collection de
terres cuites, d’agates, d’onyx, de cristaux
qu’ils exposent, et parmi lesquels on re-
marque une tête de mort en cristal de
roche d’une pureté merveilleuse. Les voya-
ges de M. Pinart ont été également plus
qu’accidentés. Il est un des premiers Eu-
ropéens qui aient pénétré dans le terri-
toire des Apaches, sur les confins de l’A-
rizona méridional, dont les habitants
gardent avec terreur le souvenir du grand
chef Cachise. Il faut une force d’âme peu
commune pour s’avancer dans ces régions
redoutables lorsque, à leurs frontières, on
a lu, comme le raconte M. Pinart dans
son rapport, des inscriptions ainsi con-
çues, écrites sur des centaines de tombes :
Un tel, captured and tortured to deelth by
Apaches, ou : Unknown, killed by Apa-
ches1. Mais tout a été dit sur ces dévoue-
ments de nos savants, et les éloges sont
ici superflus. Les objets les plus curieux
dus aux recherches de MM. Pinart et de
Cessac proviennent du Mexique et du
Pérou.

Le nom du commandant Roudaire est
trop populaire pour qu’il soit utile d’in-
sister sur ses envois. Son gigantesque plan
en relief des chotts algériens est une vé-
ritable merveille.

L’art khmer a été le sujet, pendant le
temps qu’a été ouvert le Musée ethnogra-
phique, de conférences intéressantes de

I. Un tel, capturé et torturé par les Apaches jus-
qu’à ce que mort s’ensuive, ou : Inconnu tué par Iss
Apaches.
 
Annotationen