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Faure, Élie
Histoire de l'art (5): L'esprit des formes — Paris: Éditions d'histoire et d'art, Librarie Plon, 1949

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https://doi.org/10.11588/diglit.71100#0066
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VII

Maintenant, hors du monde européen antique, hors de la
civilisation chrétienne, les choses se passent-elles ainsi ? Voit-
on partout, comme on l'a vu en Grèce, en France, en Italie,
dans l'Europe occidentale en général, l'homme-statue sortir
de la société-architecture pour se définir par la peinture et
tendre, à travers l'ivresse musicale, à recréer l'esprit social
et l'édifice destiné à abriter cet esprit?
Les civilisations orientales sont peu pénétrables pour nous.
Le bloc, au premier abord, est fermé. Quand nous nous
y glissons, l'immense réseau du polythéisme populaire et du
panthéisme philosophique nous interdit d'y avancer. Une
atmosphère trouble les entoure, enivrante pour elles, comme
l'haleine des marais fleuris d'où monte la fièvre. Presque
irrespirable pour nous, qui aimons les contours nets, l'air
léger, les eaux claires. L'évolution rapide des civilisations
d'Europe, naissant, mûrissant, déclinant au cours d'une
période qui ne dépasse pas quatre ou cinq siècles — parfois
un ou deux, comme en Espagne ou en Hollande — nous a
mal préparés à comprendre ces monuments métaphysiques
immobiles à qui la légende accorde parfois dix mille ans
d'existence, à qui l'Histoire n'a pas pu fixer un commence-
ment. Au premier abord, par exemple, si l'on se place un
peu loin pour en embrasser l'ensemble, ni la religion, ni la
philosophie, ni l'organisation sociale de l'Égypte, de la Chine,
de l'Inde ne paraissent avoir sensiblement changé depuis
des temps immémoriaux. On ne connaît qu'une religion,
d'ailleurs ésotérique, à l'Égypte pendant cinq mille ans.
L'Inde revient au brahmanisme après avoir créé, puis absorbé
le bouddhisme, dans la marée mystique qui monte sans arrêt
des profondeurs sensuelles de son imagination. La Chine,
qui d'abord accueille le bouddhisme, emploie sa longue
patience somnolente et rechignée à le recouvrir peu à peu

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