Félibien, André: Des Principes De L'Architecture, De La Sculpture, De La Peinture, Et Des Autres Arts Qui En Dépendent: Avec Vn Dictionnaire des Termes propres à chacun de ces Arts (Paris, 1676)

LIVRE PREMIER. st
vertu , qu' en y trampant les outils tout rouges , el-
le leur donnoit une dureté extraordinaire. Par ce
moyen un nommé francefcoTadda fît unBasïin de
fontaine de deux brasses & demie de diamètre , ôc
tailla aussi un pied à ce bassln. Et comme il vit que
le secret que le Grand Ducluy avoit donné, estoit
une chose rare, il l'éprouva sur d'autres ouvrages, 8c
y reuiTit si bien qu'il fit trois Ovalles, où dans l'une
ilrepresenta en demy-relief une teste de Christ, &
dans les deux autres le Duc Cosme de Medicis , Se la
DuchesTe sa femme. Il les travailla de sorte que les
cheveux ôc la barbe, qui sont très difficiles à bien fai-
re , sont néanmoins conduits de telle manière qu'on
ne voit rien de mieux dans les ouvrages des Anciens.
Ce Tadda fit ensuite plusieurs autres pièces, mais
je ne sç^ay pas si son secret a esté perdu, car nous ne
voyons aujourd'huy guère de personnes qui travail-
lent sur le Porphyre. L'on a trouvé depuis peu en
France le secret de le couper avec une seie de fer sans
dents, &: du grais mouillé,de mesme que pour seier le
marbre, & avec la mesme seie former facilement des
mouleures -, Et mesme ceux qui ont trouvé cette in-
vention , prétendent en arondissant, couper tout
le tour d'une Colonne de Porphyre. Il est vray que
maintenant on ne peut pas faire beaucoup d'essais
sur cette sorte de pierre, dont les Carrières estant
perdues, il ne reste plus que des morceaux anti-
ques qu'on trouve dans les ruines. Il est mesme
bon de remarquer que celuy qui a souffert le feu,
se calTe & s'éclatte aisément, lorsqu on vient à le
travailler ; Et quoyqu'il n'ait pas perdu toute sa