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de la victime le présage de la mort du roi, comme de celle d’Héphes-
tion. Il s’appelait Pythagoras (1) et avait auprès du conquérant de
l’Asie le même rôle que Mégistias auprès de Léonidas et Silanos
auprès de Cyrus le jeune (2). Alexandre employait aussi le devin
Aristandre de Telmessos, dont ses historiens relatent souvent les
prédictions (3), et qu’on décrit, pendant la bataille d’Arbèles, vêtu
de blanc, couronné de verveine, dictant au roi les prières solennelles
avant le début de l’action, puis, quand elle est engagée, agitant une
branche de laurier pour exciter l’ardeur des Macédoniens (4). On cite
encore Cléomantis (5) et Démophon (6) comme devins attachés à la
personne du monarque macédonien ; et on le représente consultant
celui du temple d’Athéné Ilias, nommé comme lui Alexandre , qui
lui annonce à l’avance sa victoire du Granique (7). Qu’il y crût bien
sincèrement ou non, il eut toujours soin de s’assurer, pour donner
confiance à ses soldats, le secours des devins de profession, reconnus
comme tels; mais jamais il ne prétendit usurper leur office sacré,
qui demandait une inspiration particulière, communiquée par les
dieux. C’est une idée qui ne sei'ait pas encore venue à un Grec de son
temps. Il faut descendis quati’e siècles plus bas pour voir Onosan-
dre (8) conseiller au général d’armée de se passer de devins, tout en
tenant le plus grand compte des présages, et d’apprendre à consulter
lui-même avec compétence les entrailles des victimes.
Il est, d’ailleurs, dans le bi'onze récemment acquis par M. Gréau,
une autre circonstance qui me paraît encore de nature à écarter l’idée
d’un portrait d’Alexandre. Ce sont les proportions du corps de la.
figure, son aspect carré et un peu massif, l’importance des dimensions
de la tête par rapport à celles du reste. Tout ceci s’écarte des données
du canon de Lysippe et de son école pour rentrer dans celles du
canon de Polyclète. Ces caractères sont assez prononcés pour obliger
(1) Arrian., loc. cit. ; Plutarch., loc. cit.
(2) Philostrat., Vit. Apollon., VIII, 7, 15.
(3) Sur ce personnage, voy. Bouchè-Leclercq,
ouvr. cit., t. II, p. 76 et suiv.
(I) Q. Curt., IV, 15, 27.
(5) Plutarcli., Alex., 50.
(6) I)iod. Sic., XVII, 48.
(7) Diod. Sic., XVII, 17.
(8) Diodor. Sicu!., De imperat. offic., X, 10, 25.
de la victime le présage de la mort du roi, comme de celle d’Héphes-
tion. Il s’appelait Pythagoras (1) et avait auprès du conquérant de
l’Asie le même rôle que Mégistias auprès de Léonidas et Silanos
auprès de Cyrus le jeune (2). Alexandre employait aussi le devin
Aristandre de Telmessos, dont ses historiens relatent souvent les
prédictions (3), et qu’on décrit, pendant la bataille d’Arbèles, vêtu
de blanc, couronné de verveine, dictant au roi les prières solennelles
avant le début de l’action, puis, quand elle est engagée, agitant une
branche de laurier pour exciter l’ardeur des Macédoniens (4). On cite
encore Cléomantis (5) et Démophon (6) comme devins attachés à la
personne du monarque macédonien ; et on le représente consultant
celui du temple d’Athéné Ilias, nommé comme lui Alexandre , qui
lui annonce à l’avance sa victoire du Granique (7). Qu’il y crût bien
sincèrement ou non, il eut toujours soin de s’assurer, pour donner
confiance à ses soldats, le secours des devins de profession, reconnus
comme tels; mais jamais il ne prétendit usurper leur office sacré,
qui demandait une inspiration particulière, communiquée par les
dieux. C’est une idée qui ne sei'ait pas encore venue à un Grec de son
temps. Il faut descendis quati’e siècles plus bas pour voir Onosan-
dre (8) conseiller au général d’armée de se passer de devins, tout en
tenant le plus grand compte des présages, et d’apprendre à consulter
lui-même avec compétence les entrailles des victimes.
Il est, d’ailleurs, dans le bi'onze récemment acquis par M. Gréau,
une autre circonstance qui me paraît encore de nature à écarter l’idée
d’un portrait d’Alexandre. Ce sont les proportions du corps de la.
figure, son aspect carré et un peu massif, l’importance des dimensions
de la tête par rapport à celles du reste. Tout ceci s’écarte des données
du canon de Lysippe et de son école pour rentrer dans celles du
canon de Polyclète. Ces caractères sont assez prononcés pour obliger
(1) Arrian., loc. cit. ; Plutarch., loc. cit.
(2) Philostrat., Vit. Apollon., VIII, 7, 15.
(3) Sur ce personnage, voy. Bouchè-Leclercq,
ouvr. cit., t. II, p. 76 et suiv.
(I) Q. Curt., IV, 15, 27.
(5) Plutarcli., Alex., 50.
(6) I)iod. Sic., XVII, 48.
(7) Diod. Sic., XVII, 17.
(8) Diodor. Sicu!., De imperat. offic., X, 10, 25.