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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 8.1860

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Galichon, Émile: École allemande [3]: Albert Dürer sa vie et ses œuvres
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AL 15 EUT DURER. 29

naire. Élevé par un père qui journellement rappelait à ses fils qu'ils
devaient tendre à aimer Dieu et à agir fidèlement envers son prochain,
Albert Durer fut avant tout un peintre d'une grande élévation morale.
Doué d'une âme aimante et mélancolique, servi par une imagination
féconde, il osa aborder tous les sujets, rendre avec une expression
pénétrante le sentiment maternel, peindre dans son aimable simplicité le
culte de l'Allemagne pour le foyer domestique, traduire les songes du
solitaire de Pathmos, les ballades et les légendes populaires. Ces derniers
sujets, il les a même exprimés avec une puissance si étrange, uu senti-
ment si profond du mystère, qu'ils nous troublent et nous forcent à mé-
diter longuement. Avide de savoir et modeste, il étudia toute sa vie sans
jamais se croire savant, aussi progressa-t-il toujours, et ses dernières
œuvres sont-elles ses plus belles et ses plus grandes créations. Observa-
teur intelligent, patient, laborieux, il est un des peintres qui ont le mieux
compris la nature dans toutes ses variétés.

a L'artiste, dit Platon, qui, l'œil fixé sur l'être immuable et se ser-
« vant d'un pareil modèle, en reproduit l'idée et la vertu, ne peut man-
a quer d'enfanter un tout d'une beauté achevée, tandis que celui qui a
« l'œil fixé sur ce qui passe, avec ce modèle périssable ne fera rien de
« beau. »

Ces lois suprêmes de la beauté furent méconnues par le maître de
Nuremberg. Il crut, ce grand peintre, qu'il n'était point permis à l'homme
d'interpréter l'œuvre de Dieu. Il pensa, au lieu de faire un retour en lui-
même pour découvrir le type humain par excellence, que la beauté rési-
dait dans les traits épars que la nature nous livre, et que par la nature
seulement l'artiste pouvait arriver à la perfection. Pour ces motifs, Durer
doit être placé au-dessous de ces maîtres qu'on nomme Mantègne,
Michel-Ange, Léonard, Raphaël, qui s'inspirèrent en meilleur lieu et
osèrent chercher leurs modèles dans une sphère plus haute. Tandis que
ces génies synthétiques s'élevèrent jusqu'à l'idéal, Albert Durer, génie
tout d'analyse, inclina trop vers la nature et compromit ses forces dans
l'expression des détails, au lieu de les utiliser à développer, dans une
juste proportion, l'idéal et le naturel, la forme et la pensée.

ÉMILE GAUCHO N.
 
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