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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 18.1865

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Nr. 1
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Lagrange, Léon: L' art flamand
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https://doi.org/10.11588/diglit.18742#0038
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

bleaux de Rubens ou de van Dyck? Une interprétation plus directe et
plus immédiate ne remplirait-elle pas mieux ce but? Mais alors, je le
sais, il faudrait avoir sous les yeux les tableaux eux-mêmes, et les ar-
tistes de Y Histoire des Peintres} dessinateurs ou graveurs, se voient
contraints en général de s’en tenir, après le Louvre, aux renseignements
du Cabinet des Estampes. Eh bien ! j’en demande pardon à l’éditeur intel-
ligent d’une œuvre si considérable et si attrayante, je crois qu’un plus
long séjour ou de plus fréquents voyages aux musées de Bruxelles et
d’Anvers étaient indispensables à ses dessinateurs. Et quoi de plus fa-
cile en ce temps de locomotion rapide ? Ce qu’on a fait pour certains
maîtres, il fallait le faire pour tous. L’œuvre y eut gagné une saveur plus
franche, un caractère plus saisissant, l’intérêt de l’inédit et la sincérité
des études d’après nature.

La dernière période de l’art flamand se débat, comme toutes les dé-
cadences, dans Limitation et la diversité des genres. Plus d’idéal, plus
de grand art. Chacun tire de son côté et s’efforce de ressaisir soit un
lambeau de l’éducation italienne, soit un vieux germe de l’esprit natio-
nal. C’est M. Paul Mantz qui conduit au tombeau cette bande ahurie, et
il ne lui ménage pas les rigueurs d’un goût juste, mais sévère. Un peu
de pitié, mon ami, surtout pour ceux de ces malheureux réduits à man-
ger le pain de l'exil. Sans doute Franz van Bloemen, que les Italiens ont
baptisé du doux nom d’Orizzonte, aurait donné plus de vivacité à son
coloris en restant Flamand. Mais qui sait seulement si, dans son propre
pays, il lût devenu peintre? Ne comptez-vous pour rien l’impression de
la nature italienne? Plus d’un paysagiste n’a compris le paysage que
sous le ciel romain. C’est sous ce ciel-là qu’il les faut voir, et Orizzonte y
fait assez bonne figure. Sa patrie adoptive lui révéla de lumineux hori-
zons et le sauva de la monotonie où se traînait son compatriote LIuvs-
mans de Malines, champion fidèle, malgré lui peut-être, du paysage
national.

Hélas! le dernier peintre qui clôt l’histoire de l’art flamand, ce n’est
pas un transfuge, un déserteur, c’est le trop candide Ommeganck, Ber-
ghem et Berquin de la décadence, pâle précurseur de l’Ecole belge. Que
la terre de sa patrie lui soit légère!

En somme, la question d’art domine de trop haut les questions de
races, pour qu’on puisse faire de la nationalité un infaillible critérium.
Si l’art n’est que le portrait du réel, il gagnera peut-être à s’enfermer
dans les réalités positives d’un pays et d’un peuple. Mais si l’art est la
langue du beau, aucune entrave ne doit l’arrêter. Éternel comme la
beauté, qu’il plane librement avec elle au-dessus des limites qui séparent
 
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