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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 1
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Montaiglon, Anatole de: Antiquités et curiosités de la ville de Sens, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0031
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26

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

fête des Fous, longtemps célébrée dans la cathédrale de Sens, et où se
trouve la fameuse prose latine en quatrains monorimes : « Des pays
de l’Orient — Est arrivé un âne — Beau et très fort — Et très capable
de porter des charges », etc., qui se complètent par le refrain français :
« Hé, sire âne, hé ! » avec le ht han du braiement de la bête. Je n’ai rien
à dire ici de la fête des Fous et des proses de ce curieux office, étudiées
dans la Société de Sens par MM. Chéret et Bourquelot; ce sont les
plaques d’ivoire qui nous intéressent ici, et, non seulement après Mil lin,
mais même après Duchalais, il convient d’en esquisser la description.

Elles appartiennent à la série très nombreuse des diptyques qu’à leur
nomination les consuls envoyaient en quelque sorte comme une carte de
visite et une lettre de faire part ; il s’ensuit, comme on en avait besoin
immédiatement, qu’ils n’étaient jamais commandés, mais qu’on trouvait
à les acheter tout faits. Quelques-uns ont pourtant des inscriptions, ainsi
celui de Brescia, où se lit le nom du célèbre Boëce; mais ceux-là n’en
étaient pas moins faits d’avance; les cartels vides attendaient l’in-
scription, qui se gravait rapidement le jour où l’on en avait besoin.
L’usage de ces diptyques était même officiellement réservé aux consuls ;
nous voyons en effet dans Symmaque que son fils, nommé questeur, ne
peut pas envoyer de diptyques, mais seulement des corbeilles d’argent.
Les diptyques, sur lesquels on peut consulter le grand ouvrage de Gorsi
et le catalogue des ivoires du Musée de moulages de South-Kensington,
sont nombreux en Italie et en France. Leur richesse en a sauvé plus
qu’on n’aurait pu l’espérer: après avoir pu servir de tablettes de cire
dans les églises, ils ont été ensuite appliqués à la reliure des livres
d’offices, et c’est à cet emploi que nous en devons la conservation.

Les deux plaques de Sens n’ont pas d’inscription, et représentent le
lever du Soleil et celui de la Lune, sous les traits de Bacchus et de Diane.

Dans celle de dessus, on voit, à la partie supérieure, trois jeunes
hommes nus qui foulent le raisin dans une cuve; les grappes énormes
sont figurées par des traits croisés en diagonale, et le vin coule d’un
mufle de lion pour tomber dans une grande jarre. Au pied d’une vigne,
deux enfants vêtus mettent des grappes dans deux paniers. Deux tau-
reaux ou deux bœufs, qu’on dirait gais en blason et qui semblent partir
sans conducteur, tirent une petite voiture chargée d’un tonneau ; en face,
un charretier, un bâton dans la main gauche et dont le geste se rapporte
peut-être aux bœufs qu’il voit partir, amène une charrette pleine de
grappes et attelée de deux ânes ou de deux mulets; au milieu, en avant
et au-dessous, un homme porte de la main droite un panier et en a un
autre sur l’épaule gauche.
 
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