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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 5
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Chennevières-Pointel, Charles Philippe de: Le Salon de 1880, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0420
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402

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

d’interrompre ces préoccupations trop paternelles, le Salon de 1.850 ne
serait pas encore ouvert. Donc, que les artistes et l’administration ne se
plaignent pas les uns des autres. Les artistes ont les placeurs qu’ils ont
choisis ; l’administration, les collaborateurs qu’elle a acceptés d’avance;
les choses ne sauraient aller d’autre façon tant que le règlement ne jet-
tera pas de plus hauts cris.

Mon opinion à moi, c’est que le système est usé et a fait son temps ;
il a été utile durant trente années pour habituer les artistes à ces mœurs
d’élection, et de jugement, et de placement, et de distribution de récom-
penses. Désormais les artistes vont énerver l’administration et s’énerve-
ront eux-mêmes. Cela se voit aux expositions partielles qui s’organisent
de toutes parts. Il faut prendre garde cependant de trop ébranler par
des tiraillements cette grande institution nationale des Salons. Notre Sa-
lon à nous n’est plus ce choix de tableaux de l’Académie royale du siècle
dernier qui ne dépassait pas la mesure des exhibitions actuelles de la
place Vendôme ou de la rue Volney. Aujourd’hui le Salon, réunion fabu-
leuse de cinq mille tableaux et dessins et de quinze cents sculptures, le
Salon est le gigantesque festival, dès longtemps annoncé et attendu, où
se rue durant deux mois, où passe et repasse la population parisienne
tout entière, où tous les ateliers, où toutes les influences d’art s’en vont
pêle-mêle lutter et flamboyer, où les nations rivales envoient leurs meil-
leurs athlètes, où se font les grands et les petits noms, où l’amateur
bourgeois, en aiguisant son goût, vient se faire croire à lui-même que
lui aussi est d’Athènes. Que le Salon reste, dans toute son ampleur un
peu débordante, le grand champ d’émulation de notre école féconde, le
seul, le vrai concours très éclectique de toutes nos forces vives en ma-
tière de peinture et de sculpture. Le jour où il serait morcelé, comment
retrouverait-on un moyen aussi admirable, aussi clair, aussi parlant,
d’être instruit sur les progrès ou les défaillances de notre art national,
de signaler les petits qui montent et les illustres qui font fausse route?

Et, puisque je viens de prononcer le mot de concours, dites-moi si
les concours organisés dans ces derniers temps par l’État et la ville
de Taris oflient rien d’égal à la sûreté et à la garantie des renseigne-
ments du Salon. Ces concours ne sont qu’un leurre au gros sentiment
d’égalité du vulgaire. Avec leur apparence banale de justice démocra-
tique et d’appel à tous les talents, ils ne flattent et n’attirent que les
médiocres. Ils ont le don de provoquer les incroyables insanités de
toutes les pauvres cervelles surexcitées; et cette surexcitation se ressent
jusque dans les projets d’artistes d’ordinaire plus maîtres d’eux-mêmes.
Les forts se défient et se dérobent; cette mêlée ne leur dit rien; ils ont
 
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