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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 6
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Rayet, Olivier: La sculpture au Salon
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0561
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538

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Ce n’est certes pas non plus un progrès que nous montre la Cas-
sandre de M. Tony Noël : s’attaquer aux personnages d’Eschyle n’est pas
une entreprise aisée et dans laquelle on puisse se lancer à l’aveuglette.
Pour faire leur portrait, ce ne serait pas trop que de les connaître. On se
rappelle la terrible entrée que, dans l’Agamemnon, la jeune Trovenne
fait au milieu du palais des Atrides ; muette et farouche, elle subit, sans
presque les entendre, les outrages de Clytemnestre jusqu’au moment où
elle éclate en cris de douleur. Quel beau sujet il y avait là, soit qu’on la
représentât immobile, l’oreille tendue à la voix encore confuse du Dieu,
les regards fixes et cherchant à lire dans les ténèbres de l’avenir, soit
qu’on choisît l’instant où, les scènes de carnage de tout à l’heure se
dessinant nettement à ses yeux, elle bondit épouvantée. Mais, hélas,
M. Noël n’a pas lu Eschyle. Cassandre, pour lui, n’est qu’une femme hys-
térique, et c’est cette conception inexacte et triviale que sa statue nous
montre. On ne saurait donc approuver ni ces yeux caves, ni ces lèvres
agitées, ni ce déhanchement vulgaire, ni ces bras se tordant au-dessus
de la tête dans un spasme nerveux ; l’exécution non plus n’est pas par-
tout très bonne, notamment dans les mains et dans la draperie qui couvre
les jambes. Mais la science consommée de l’auteur du Rétiaire se retrouve
dans un beau torse, où le jeu des côtes est exprimé de main de maître.

M. Schœnerverk est un artiste scrupuleux, délicat, châtié, qui n’a
pas, à mou avis, le renom dont il est digne. Le Musée du Luxembourg
possède de lui une jeune fille h la fontaine, figure fraîche, pudique, de
tous points excellente, et une femme mettant sa pantoufle, qui me
plaît moins, mais à laquelle j’aurais pourtant sans hésiter, au Salon de
l’an dernier, donné la médaille d’honneur. Lui non plus ne se soutient
pas cette année aux mêmes hauteurs. Sa Tête du jeune Rolo est d’une
mollesse savonneuse, et son Ragazzino italien, désigné par le titre un
peu prétentieux de « Cet âge est sans pitié », se contourne beaucoup
pour un acte aussi simple que celui de mettre une pierre dans une
fronde; il songe trop que des Parisiens le regardent.

MM. Chapu et Falguière maintiennent mieux leur rang; leurs envois
sont d’importance, et si nous n’en sommes pas pleinement satisfaits,
c’est que ces deux artistes nous ont trop gâté. C’est à eux seuls qu’ils
doivent s’en prendre des exigences que nous avons pour eux : la sévé-
rité avec laquelle nous examinons leurs œuvres est une conséquence de
la haute estime dans laquelle nous les tenons et un hommage rendu à
leur mérite.

Le buste en marbre de la baronne Daumesnil, par M. Falguière, est
d’un modelé ferme, sobre, et d’une grande noblesse; son Eve, en
 
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