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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

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Nr. 2
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Müntz, Eugène: La tapisserie en Angleterre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0192
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17Z*

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

ornée de « clothes of gold and arras», représentant toute Y Histoire de l'Ancien
et du Nouveau Testament. Puis viennent des « nobles auncyent stories », c’est-à-dire
Y Histoire de Samson, d'Hector de Troie, du Roi Arthur.

Quelques tentatives isolées pourraient bien avoir été faites dès lors pour introduire
dans les Iles britanniques le secret de la haute ou de la basse lisse. On sait que ce
dernier procédé n’est pas d’invention récente, comme on l'a soutenu récemment, mais
qu’il était connu dès le moyen âge sous le nom de Tapisserie à la marche. Ce qui
autorise dans une certaine mesure à émettre cette hypothèse, c’est qu’en 1392 le comte
d’Arundel disposa par testament de ses tentures bleues, à fleurs rouges, « récemment
faites à Londres». La question serait tranchée définitivement dans le sens de l’affirma-
tive, s’il était prouvé qu’il s’agit de véritables tapisseries, et non de broderies ou
d’étoffes brochées.

Quoi qu’il en soit, l’importation flamande ne discontinuait pas. Citons notamment
la commande faite en 1477 par Jean Pasmer, marchand de Londres, à Gilles van de
Putte, de Bruxelles, d’une tapisserie de 22 aunes de long sur 5 1/4 de haut, représen-
tant au centre les Quatre Docteurs de l’Église et d’autres docteurs ou évêques, ainsi
qu’un tabernacle richement décorél.

Une recrudescence de luxe marque les premières années du xvi* siècle. En 1503,
lors du mariage de la fille de Henri YII avec Jacques d’Écosse, Holy-Rood-IIouse fut
tendu des plus riches tapisseries. On admirait surtout parmi elles YHistoire de Troie
et YHistoire d'Hercule. Quelques années plus tard, à la mort de Henri VII (1509), le
garde-meuble de la reine renfermait les tentures suivantes : YHistoire de Nabucho-
donosor (4 pièces), YHistoire d’IIercule (4 p.), Y Histoire de Paris et d’Hélène (3 p.),
YHistoire du roi Saül (4 p.), YHistoire de Samson et de Salomon (5 p.), et, en
outre, trois tapisseries et un tapis « du roi Robert de Sicile2 ».

Henri VIII, Wolsey et la plupart des seigneurs anglais du xvie siècle tiraient de
l’étranger, nous pouvons l’affirmer hautement, ces tentures dont ils se montraient si
fiers. Cependant, dès cette époque, l’Angleterre fit quelques efforts sérieux, je ne dirai
pas pour disputer aux Flandres leur suprématie, mais du moins pour traduire sur le
métier, sans être forcée de passer par l’intermédiaire des étrangers, les essais des
peintres indigènes. Une petite tapisserie or et soie, de la collection de M. le baron de
Schickler, a été attribuée avec beaucoup de vraisemblance à un atelier d’outre-Manche
(il était si facile, on le sait, d’improviser des métiers de haute lisse!); elle semble
dater de cet âge charmant où l’Europe septentrionale hésitait entre les traditions mé-
diévales, si intimement liées aux sentiments religieux, et les séductions plus profanes
de la Renaissance. Dans la tapisserie de M. de Schickler, le motif est emprunté aux
croyances du passé ; nous y voyons le patron de l’Angleterre, saint Georges, emporté
par son cheval fougueux et enfonçant au passage sa lance dans la gorge d’un dragon
monstrueux. Mais l’architecture, les ornements respirent déjà le souffle du temps nou-
veau : l’arc surbaissé, les colonnes incrustées de gemmes montrent que nous touchons
à une autre ère. L’attribution du Saint Georges à l’Angleterre ne repose, nous le répé-
tons, que sur des présomptions — caractère des têtes et de l’architecture, — mais ces
présomptions ne sont pas à dédaigner.

Vers la fin du règne de Henri VIII, nous voyons se produire une tentative plus

1. Wauters, Bernard Van Orley, p. 20-21, 73-74.

2. First Report, p. 75.
 
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