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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 37.1888

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Nr. 2
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Phillips, Claude: Exposition rétrospective de la Royal Academy: correspondance d'Angleterre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24191#0177
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CORRESPONDANCE D’ANGLETERRE.

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Les vitrines qui ont été installées dans cette même salle sont remplies de petits
bronzes, de médailles et de plaquettes choisies dans la célèbre collection de
M. Drury-Fortnum, et dans celles, à peine moins connues, de MM. Salting, J.-C.
Robinson, Heseltine, Alfred Morrison et autres.

Toutes ces sculptures, tous ces objets divers, quoique d’une valeur fort inégale,
et mêlés, il faut en convenir, de nombreuses copies anciennes et modernes, éma-
nant des ateliers florentins, et de spécimens d’une authenticité plus que douteuse,
ne laissent cependant pas de mériter un examen attentif.

Les tableaux des Écoles italiennes sont en petit nombre et ne nous retiendront
pas longtemps. La seule toile de premier ordre est Y Enlèvement d'Europe déjà
citée, du Titien, précieux trésor appartenant à lord Darnley, qui aurait acquis de
nouveaux droits à notre reconnaissance s’il nous avait montré encore une fois son
célèbre portrait de VArioste, du même maître. L’wnlèvement d'Europe est une
œuvre importante et caractéristique de la vieillesse — mais de la verte vieillesse
— du Titien ; malgré une maîtrise incomparable, la touche est plus lâche et l’accent
moins énergique que dans les grands chefs-d’œuvre de la période moyenne. Par contre,
le Titien a rarement déployé plus heureusement et dans une mesure plus juste les
richesses de sa palette; rarement il a peint un fond plus délicieux que cette mer
d’azur et cette côte sinueuse et fuyante qui encadre si bien le groupe du taureau
divin enlevant la belle Europe, mollement soumise et triomphante. Cependant, ce
corps de femme souple et voluptueux, a dans ses lignes et dans son rendu quelque
chose d’un peu vulgaire qui jure avec le sujet et avec l’encadrement merveilleux
de ce poétique paysage. Le vieux maître se laissant aller, dans la seconde moitié
de sa carrière, à toutes les délices d’une existence luxueuse, a perdu une partie de
cette puissance d’imagination à laquelle nous devons cette perle de sa jeunesse,
Y Amour sacré et l'Amour profane, de la galerie Borghèse, et des chefs-d’œuvre
de sa maturité tels que la Vénus du Pardo et notre Bacchus et Ariane.

Un autre tableau vénitien qui mérite d’être signalé est la Madone avec l’Enfant,
envoyé par lady Lindsay, attribué — nous ne saurious trop dire pourquoi — à
Giorgione. C’est une toile qui, sans être de premier ordre, offre un attrait parti-
culier par le problème technique qui y est posé et même, on peut le dire, résolu.
La Madone, toute vêtue d’azur et portant sur ses genoux l’Enfant nu, est profilée
contre un paysage et un ciel dont les tons prédominants sont des variantes de celte
même couleur. C’est une véritable « symphonie en bleu », que le peintre a su
rendre agréable en se servant du contraste que lui fournissaient les chairs — dont
il a avec intention exagéré les tons roux et rosés -— et le nimbe, ou plutôt la
lumière orange, dont il a entouré la tête de la Vierge.

Un Portrait d’homme — vu absolument de face et portant de longs cheveux châ-
tains — appartient à la Galerie Nationale d’Irlande, et porte l’attribution : « École
de Leonardo da Vinci ». Ce n'est qu’une œuvre d’ordre inférieur appartenant à
l’École vénitienne, et se rapprochant assez de la dernière manière de Marco Basaïti.

Pour trouver une autre œuvre d’origine italienne qui mérite la peine d’être
décrite il faut faire un saut énorme. Celle à laquelle je fais illusion est une Vue
de Dresde, à lord Normanton, peinte par le neveu de Canaletto, Bernardo Belotto;
l’exécution en même temps large et très précise de cette toile en fait quelque chose
comme un chef-d’œuvre du genre, digne de rivaliser avec les beaux tableaux
hollandais du xvne siècle.

XXXVII. — 2e PÉRIODE.

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