212
GAZETTE DES BEAUX-AltTS.
L’image est, en effet, une sorte d’emblème ou de pieux souvenir,
distribué par les Augustins « d’auprès de Liège », comme ils s’inti-
tulent dans les vers inscrits sous la planche.
Le retable s’est-il présenté jadis comme dans la gravure? Nous
l’ignorons. L’existence de l’image a cet autre intérêt de nous
apprendre que même hors des limites du territoire brabançon, l’œu-
vre de Matsys avait de bonne heure acquis une sorte de popularité.
Si même la logique ne devait faire envisager les volets de la
Légende de sainte Anne comme ayant suivi l’exécution dupanneau qu’ils
recouvrent, l’aspect des peintures ne laisserait plus de doute à cet
égard. On constate, en effet, dans l'Offrande de saint Joachim, dans
Y Offrande de sainte Anne et plus particulièrement dans le volet repré-
sentant la mort de la sainte, un emploi plus libre des procédés que
dans le tableau central.
Il s’agit également de compositions plus restreintes, de scènes
d’intérieur où le rapprochement des figures commande, ou tout au
moins tolère une distribution de la lumière plus concentrée. En
revanche, dans le volet où l’ange apparaît à saint Joachim, le peintre
a tenu compte des conditions d’éclairage nécessitées par le plein
air où s’accomplit le miracle.
Le rôle du paysage assumait ici une importance primordiale.
Matsys a marqué et marque encore, dans l’histoire de la peinture
flamande, comme l’un des pères du genre. Nous ne prétendons pas
diminuer sa gloire, mais quand la preuve nous est acquise qu’il profita
de la collaboration de Patenier, nous ne sortons pas de la vraisem-
blance en assignant une part plus large à l'intervention de ce dernier.
Quoi qu’il en soit, les perspectives aérienne et linéaire sont égale-
ment bien observées dans le fond du paysage où Joachim prosterné
est averti par l’ange de la grossesse de sainte Anne. L’œil ne se lasse
point de suivre tous les détails de la vaste et pittoresque contrée,
semée d’innombrables fabriques, où l’artiste a placé son épisode.
Sous le crayon d’Albert Durer, l’ange a une importance égale à
celle du père de la Vierge. Chez Matsys, au contraire, comme chez
laplupart des Flamands, l’ange a un caractère plus aérien, et le surna-
turel de l’apparition est encore accentué par les colorations d’un vète-
tement où le vert se mélange au rouge, comme si le peintre s’était
inspiré de certaines plantes au feuillage versicolore.
Les scènes du temple l’emportent, par le mérite de l’exécution,
sur l’ensemble des œuvres flamandes parues jusqu’alors. Van Eyck a
GAZETTE DES BEAUX-AltTS.
L’image est, en effet, une sorte d’emblème ou de pieux souvenir,
distribué par les Augustins « d’auprès de Liège », comme ils s’inti-
tulent dans les vers inscrits sous la planche.
Le retable s’est-il présenté jadis comme dans la gravure? Nous
l’ignorons. L’existence de l’image a cet autre intérêt de nous
apprendre que même hors des limites du territoire brabançon, l’œu-
vre de Matsys avait de bonne heure acquis une sorte de popularité.
Si même la logique ne devait faire envisager les volets de la
Légende de sainte Anne comme ayant suivi l’exécution dupanneau qu’ils
recouvrent, l’aspect des peintures ne laisserait plus de doute à cet
égard. On constate, en effet, dans l'Offrande de saint Joachim, dans
Y Offrande de sainte Anne et plus particulièrement dans le volet repré-
sentant la mort de la sainte, un emploi plus libre des procédés que
dans le tableau central.
Il s’agit également de compositions plus restreintes, de scènes
d’intérieur où le rapprochement des figures commande, ou tout au
moins tolère une distribution de la lumière plus concentrée. En
revanche, dans le volet où l’ange apparaît à saint Joachim, le peintre
a tenu compte des conditions d’éclairage nécessitées par le plein
air où s’accomplit le miracle.
Le rôle du paysage assumait ici une importance primordiale.
Matsys a marqué et marque encore, dans l’histoire de la peinture
flamande, comme l’un des pères du genre. Nous ne prétendons pas
diminuer sa gloire, mais quand la preuve nous est acquise qu’il profita
de la collaboration de Patenier, nous ne sortons pas de la vraisem-
blance en assignant une part plus large à l'intervention de ce dernier.
Quoi qu’il en soit, les perspectives aérienne et linéaire sont égale-
ment bien observées dans le fond du paysage où Joachim prosterné
est averti par l’ange de la grossesse de sainte Anne. L’œil ne se lasse
point de suivre tous les détails de la vaste et pittoresque contrée,
semée d’innombrables fabriques, où l’artiste a placé son épisode.
Sous le crayon d’Albert Durer, l’ange a une importance égale à
celle du père de la Vierge. Chez Matsys, au contraire, comme chez
laplupart des Flamands, l’ange a un caractère plus aérien, et le surna-
turel de l’apparition est encore accentué par les colorations d’un vète-
tement où le vert se mélange au rouge, comme si le peintre s’était
inspiré de certaines plantes au feuillage versicolore.
Les scènes du temple l’emportent, par le mérite de l’exécution,
sur l’ensemble des œuvres flamandes parues jusqu’alors. Van Eyck a