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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 2.1889

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Nr. 1
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Mantz, Paul: La peinture française, 1: Exposition Universelle de 1889
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https://doi.org/10.11588/diglit.24446#0044

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36

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

artiste, assez mal représenté au Louvre, avait fait de petits tableaux
de genre, beaucoup plus souples que ceux de Boilly, et des portraits,
peu nombreux, mais excellents. Nous avons au Champ de Mars un
de ces portraits. C’est celui de l’acteur Baptiste, prêté par le Musée
de la Comédie-Française (1802). Baptiste avait une tête fine, une
tête de diplomate. Avec un pinceau plus attentif que généreux et une
facture lisse que Rembrandt trouverait indigente, Martin Drolling
s’est évertué à préciser dans cette physionomie le trait indivi-
duel et l’expression un peu caustique du masque. Cette effigie, où
rien n’est donné à l’à peu près, est infiniment sérieuse et volon-
taire. Elle réhabilite Drolling et le venge de toutes les moqueries
d’antan.

Et puisque j’ai tout à l’heure écrit le nom de Boilly, il faut dire
un mot de ses oeuvres. Boilly est encore un ressuscité. Nous avons
parfaitement connu le temps où ses petits tableaux de genre parais-
saient démodés et d’une sécheresse métallique. Il y avait une grande
part de vérité dans cette appréciation sévère. Mais le caprice des
amateurs a changé tout cela : Boilly est recherché, il garde dans les
ventes publiques une belle attitude et il a cessé d’être à la portée des
bourses légères. Ce succès posthume n’en fera pas un Ter Borg ou un
Metsu. De ce peintre, qui restera, malgré tout, un très petit peintre,
on trouvera à l’Exposition plusieurs œuvres que l’absence de cata
logue nous empêche d’examiner en détail et de désigner sous leur
titre traditionnel. Ces Boilly valent beaucoup d’argent. L’exécution
en est précieuse et polie, plus que spirituelle. La touche cinglante
et expressive, le petit coup de fouet qui fait d’un pot de terre peint
par Deniers une merveille de travail libre, cette « légèreté d’outil »
dont le xviiD siècle faisait tant de cas, n’existent point pour Boilly.
Sa peinture est propre et plate. Ce qui lui reste, c’est le soin avec
lequel il habille ses figurines. Nul, mieux que lui, n’a connu les
modes du temps, et les robes, et les coiffures des comédiennes de
Mme de Genlis. A ce titre, Boilly a, comme Debucourt, la valeur histo-
rique d’un témoin. Mais vraiment il n’est pas assez peintre. Si, dans
le passé, il a des prédécesseurs, il faut les chercher parmi les
Hollandais de la décadence, les redoutables Van der Werff et les
autres finisseurs du moment où la grande Ecole va périr. Ses
têtes de femmes sont des têtes de poupées, ses satins sont en fer
blanc. Boilly n’est véritablement un artiste que lorsqu’il s’abandonne.
Nous avons ici un joli exemple de cette négligence heureuse : c’est
Y Intérieur d’un café, qui appartient à M. Lutz. S’il avait plus souvent
 
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