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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 2.1889

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Nr. 3
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Michel, André: La sculpture, 2: Exposition Universelle de 1889
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https://doi.org/10.11588/diglit.24446#0325

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LA SCULPTURE.

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— du moins pour ce qui est de la sculpture, — ce n’est pas dans leur
camp que naquirent les œuvres décisives qui devaient témoigner
devant la postérité du triomphe de l’esthétique nouvelle. — Rude et
David d’Angers, par leur éducation et leurs origines, sortaient des
ateliers classiques, et ils restèrent par certains côtés essentiels de
leur talent et de leur doctrine, les hommes de la tradition. —Mais
l’un et l’autre, avec une puissance et des réussites très inégales,
furent les serviteurs des idées modernes et contribuèrent glorieuse-
ment à la fondation de la sculpture française du siècle.

François Rude (qu’il m’est impossible dans cette rapide revue de
passer sous silence, mais dont je ne dirai que quelques mots, n’oubliant
pas que notre ami M. de Fourcaud est en train de nous apprendre,
ici même, le dernier mot sur lui), Rude, le grand Bourguignon qui
devait aller à Bruxelles payer, par son enseignement et ses œuvres,
la vieille dette de la Bourgogne à l’Ecole flamande, est bien à la fois
l’homme de la nature et de la tradition. Il n’admettait pas que le savoir
et le sentiment pussent être ennemis ; il ne comprenait pas « l’inspira-
tion» sans l’étude acharnée, et ses chefs-d’œuvre portent tous la double
consécration d’un profond naturalisme et d’une science consommée.

Son enseignement,, d’ailleurs, réunissait aussi le double caractère,
en apparence (mais en apparence seulement) contradictoire, de la plus
grande rigueur scientifique et du plus large libéralisme. Il professait

— ce que les romantiques et leur suite avaient trop oublié — qu’il y
a des choses de science certaine et qu’il faut savoir. Il se rappelait
que Monge, — envers qui il s’acquitta si magnifiquement par la statue
de Beaune, — l’ayant vu procéder empiriquement et à tâtons, lui avait
dit un jour : « Tu perds bien du temps », et lui avait enseigné com-
ment, avec un compas, on pouvait déterminer les mouvements, les
oppositions des plans et leur pondération ; et il avait à son tour inscrit
entête de son enseignement « l’application de la mathématique à l’étude
de la nature ». — Il voulait d’ailleurs que cet enseignement fût un
« moyen d’émancipation ». — Admirable et profonde parole! Quand
les élèves de David d’Angers, momentanément absent, vinrent lui
demander de prendre la direction de l’atelier, il les prévint de trois
choses : à savoir qu’il exigerait la plus sévère tenue chez ses élèves
(le genre rapin ne lui allait pas); — qu’il ne disposait et n’entendait
disposer pour les concours d’aucune influence académique — et que
ses leçons consisteraient surtout à leur apprendre à se passer de lui...
mais il voulait que cet affranchissement eût pour base et pour garantie
l’éducation pratique la plus forte et le savoir le plus complet.
 
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