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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
issu de notre sol, d’un art, témoignage spontané de notre génie,
où s’associent dans un équilibre parfait l'audace, la clarté et la
saine logique, qui ont amené nos architectes contemporains, insen-
siblement et comme malgré eux, à se préoccuper de la construction
rationnelle. Dans cette évolution, les découvertes de la science
moderne, — emploi du fer et des matériaux légers, — ont été un
facteur de premier ordre. L’art de l’ingénieur a marché à pas de
géants et par action réflexe ses exemples ont entraîné un boulever-
sement radical dans les méthodes de l'architecte. Aujourd'hui un
architecte vraiment digne de ce nom doit être en même temps un
ingénieur. C'est à la réunion de cette double qualité que nous devons
des édifices comme la nouvelle gare Saint-Lazare, la Galerie des
Machines et les Palais des Arts à l’Exposition universelle. Mais
l’influence chaque jour grandissante des calculateurs issus de l’Ecole
centrale et des Ponts et Chaussées ne doit pas nous faire perdre de
vue que nous devons les premières conquêtes de l’art nouveau à des
architectes de métier. Il y aurait ingratitude à oublier les tentatives
de ces initiateurs, les Alavoine, les Baltard, les Labrouste, les Duc,
qui ont si vaillamment appliqué à des conceptions artistiques les
théories auxquelles a donné naissance la production industrielle
du fer. Les Halles centrales, la grande salle de lecture de la Biblio-
thèque, la gare du Nord sont les admirables prolégomènes d’une
révolution artistique qui sera une des gloires de cette fin de siècle.
Et nous devons dire à l’honneur de la France qu’elle s’est placée
d’emblée à la tète du mouvement; l’Exposition de 1889 en est la
preuve éclatante.
En somme, ce xixe siècle, si dédaigné, aura été une époque de
généreuses recherches. Les grandes modifications sociales qui ont
accompagné son début ont eu leur contre-coup dans toutes les bran-
ches de l’art. Un même vent de liberté et de raison les traverse et
les anime. Pour avoir été plus lentes et plus difficiles, les conquêtes
de l’ordre architectural n’en sont ni moins certaines ni moins impor-
tantes. L'histoire de l’architecture française au xixe siècle est aussi
accidentée, aussi instructive que celle de la peinture, mais elle est
peu connue et nous savons un gré infini à M. Magne d’en avoir placé
sous nos yeux les principaux éléments.
Cette Exposition d’architecture de la Centennale éveille la pensée
qu’une réunion de ce genre, facile et peu coûteuse à former aujour-
d’hui, introuvable plus tard, devrait prendre place dans un de nos
Musées, au Louvre ou à l’Ecole des Beaux-Arts. On collectionne
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
issu de notre sol, d’un art, témoignage spontané de notre génie,
où s’associent dans un équilibre parfait l'audace, la clarté et la
saine logique, qui ont amené nos architectes contemporains, insen-
siblement et comme malgré eux, à se préoccuper de la construction
rationnelle. Dans cette évolution, les découvertes de la science
moderne, — emploi du fer et des matériaux légers, — ont été un
facteur de premier ordre. L’art de l’ingénieur a marché à pas de
géants et par action réflexe ses exemples ont entraîné un boulever-
sement radical dans les méthodes de l'architecte. Aujourd'hui un
architecte vraiment digne de ce nom doit être en même temps un
ingénieur. C'est à la réunion de cette double qualité que nous devons
des édifices comme la nouvelle gare Saint-Lazare, la Galerie des
Machines et les Palais des Arts à l’Exposition universelle. Mais
l’influence chaque jour grandissante des calculateurs issus de l’Ecole
centrale et des Ponts et Chaussées ne doit pas nous faire perdre de
vue que nous devons les premières conquêtes de l’art nouveau à des
architectes de métier. Il y aurait ingratitude à oublier les tentatives
de ces initiateurs, les Alavoine, les Baltard, les Labrouste, les Duc,
qui ont si vaillamment appliqué à des conceptions artistiques les
théories auxquelles a donné naissance la production industrielle
du fer. Les Halles centrales, la grande salle de lecture de la Biblio-
thèque, la gare du Nord sont les admirables prolégomènes d’une
révolution artistique qui sera une des gloires de cette fin de siècle.
Et nous devons dire à l’honneur de la France qu’elle s’est placée
d’emblée à la tète du mouvement; l’Exposition de 1889 en est la
preuve éclatante.
En somme, ce xixe siècle, si dédaigné, aura été une époque de
généreuses recherches. Les grandes modifications sociales qui ont
accompagné son début ont eu leur contre-coup dans toutes les bran-
ches de l’art. Un même vent de liberté et de raison les traverse et
les anime. Pour avoir été plus lentes et plus difficiles, les conquêtes
de l’ordre architectural n’en sont ni moins certaines ni moins impor-
tantes. L'histoire de l’architecture française au xixe siècle est aussi
accidentée, aussi instructive que celle de la peinture, mais elle est
peu connue et nous savons un gré infini à M. Magne d’en avoir placé
sous nos yeux les principaux éléments.
Cette Exposition d’architecture de la Centennale éveille la pensée
qu’une réunion de ce genre, facile et peu coûteuse à former aujour-
d’hui, introuvable plus tard, devrait prendre place dans un de nos
Musées, au Louvre ou à l’Ecole des Beaux-Arts. On collectionne