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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 1
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Mantz, Paul: Watteau, 4
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0036

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Cette douleur au côté gauche de la tête ne m’a pas laissé sommeiller depuis mardi,
et Mariotti veut me faire prendre une purge dès demain au jour; il dit que la
grande chaleur qu’il fait l’aidera à souhait. Vous me rendrez satisfait au delà de
mon souhait, si vous venez me rendre visite d'ici à dimanche; je vous montrerai
quelques bagatelles comme les païsages de Nogent, que vous estimez assez par
cette raison que j’en fis les pensées en présence de Mrae de Julienne, à qui je baise
les mains très respectueusement.

Je ne fais pas ce que je veux en ce que la pierre grise et la pierre de sanguine
sont fort dures en ce moment; je n’en puis avoir d’autre.

On voit apparaître ici les paysages de Nogent. Ce coin des envi-
rons de Paris, Watteau le connaissait bien ; il y était allé plusieurs
fois, car il y avait un ami, M. Le Fèvre, intendant des Menus. Pen-
dant les chaleurs de l’été précoce de 1721, il eut dans son modeste
logis parisien le désir de respirer librement. « Il imagina,.dit Caylus,
que l’air de la campagne lui feroit du bien. » L’abbé Haranger,
chanoine de Saint-Germain-l’Auxerrois, lui fit prêter par M. Le
Fèvre sa maison de Nogent, auprès de Vincennes. Il s’y installa,
languissant, mais courageux encore. Il travailla : il recevait sou-
vent la visite et les consolations du curé de Nogent, et il peignit
pour lui un Christ en croix. Caylus a vu ce tableau qui a reparu en
1779 à la vente Marchand, et dont la trace est depuis lors perdue.
« Si ce morceau, écrit-il, n’a pas la noblesse et l’élégance qu’un tel
sujet exige, il a du moins l’expression de douleur et de souffrance
qu’éprouvoit le malade qui le peignoit. » L’aveu est à retenir, venant
d’un critique qui regardait Watteau comme inexpressif. N’est-ce pas
Caylus, en effet, qui a écrit : « A l’égard de son expression, je n’en
puis rien dire, car il ne s’est jamais exposé à rendre aucune passion. »

Aux derniers jours de sa vie et sous l’influence sans doute des
entretiens qu’il avait avec le curé de Nogent, Watteau, qui s’était
toujours montré bon catholique et qui prenait volontiers la précau-
tion d’entendre la messe à Saint-Germain-l’Auxerrois quand il allait
dîner chez Gersaint, fut troublé d’une inquiétude pareille à celle qui
avait tourmenté Botticelli : il craignit d’avoir, dans ses libres
crayonnages, insisté un peu plus qu’il ne convient sur la note amou-
reuse : il fit rechercher par un ami les pages qu’il ne jugeait pas
assez innocentes, et, dans un moment de pieux vandalisme, il les
brûla.

Watteau, voyant fuir les jours de plus en plus rapides, eut un
autre regret, un autre remords. Il lui sembla qu’il avait quelque
chose à se reprocher vis-à-vis de son compatriote Pater, qui avait été
 
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