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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 2
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Nolhac, Pierre de: Un nouveau portrait de Pétrarque
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0188

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172

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

correspondance, établissent de la façon la plus formelle cette intimité,
et un document récemment publié nous la montre sous une forme
particulièrement touchante : le 4 décembre 1369, par une épouvantable
tourmente de neige, personne n’osant affronter le voyage de Padoue
à Arquà, Lombardo eut le dévouement d’y aller et, retardé par le
mauvais temps, mit trois journées à ce trajet; tout cela pour aller
planter dans le jardin de son maitre, quelques-uns de ses arbres
favoris, dont un laurier *.

Si quelqu’un devait attacher de l’importance à la ressemblance
du portrait de Pétrarque, c’était assurément le bon Lombardo, et en
choisissant un artiste parmi les nombreux peintres de Padoue1 2, il
dut lui demander avant tout la fidélité. A supposer que François de
Carrare se soit chargé lui-même de faire décorer le volume qui lui
était offert, le cas ne change pas : Carrare ne pouvait pas attacher
peu de prix à un souvenir exact de ce grand Pétrarque qu’il avait
décidé, à force d’instances, à se fixer dans ses Etats et dont l’amitié
et la longue présence auprès de lui avaient été l’honneur de son
règne. C’était même sur la demande de ce prince lettré, et pour lui
complaire, que Pétrarque avait rédigé définitivement son ouvrage et
l’avait destiné à servir d’explication à une suite de figures de héros
récemment peintes à fresque dans une salle du palais de Padoue 3 ;
le manuscrit et l’image précieuse qui l’accompagnait devaient donc
passer sans cesse sous les yeux de leur possesseur.

L’artiste semble, d’ailleurs, s’être conformé aux intentions iden-
tiques du donateur et du donataire. Le portrait de Pétrarque est
simplement traité, mais plein de vie : point de laurier autour de la
tète, ni d’accessoire d’aucun genre; la cape de l’époque serrant le
front et cachant les bras. Si le peintre n’a pas travaillé d’après
nature, il a connu du moins, parmi les portraits de la maturité du
poète, .celui qu’on jugeait le plus ressemblant et il l’a fidèlement
reproduit. Il donne l’impression d’une œuvre intime, sans prétention,

1. Pétrarque et son jardin, dans Je Giornale storico delta letter. ital., t. IX, p. 414.

2. V. dans Gloria (/. c., doc. VII) une liste de peintres établis à Padoue au
temps des Carrare. Lombardo n’était point étranger aux choses do l’art (Münlz,
Précurseurs de la Renaissance, p. 329).

3. A. Zardo, Il Petrarca e i Carraresi, Milan, 1887, p. 119 et 182. Cette salle
dont les murs ont été recouverts, au xvie siècle, de sujets analogues, existe encore
et forme la salle principale de la Bibliothèque de l’Université; on y voit un grand
portrait en pied de Pétrarque, dans son cabinet de travail, ancien, mais repeint et
détérioré. En pendant, est un portrait de Lombardo.
 
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