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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 6
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Albert, Maurice: Le salon de 1890 aux Champs-Élysées, [1], Peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0504

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462

GAZETTE DES 13EAUX-A1LTS.

pas être constamment exquis; il n’est jamais médiocre. Et puis, ce
sont de vieilles connaissances que nous revoyons dans ses toiles,
soit qu’il nous montre quelqu’une de ces fortes paysannes du nord,
bâties en cariatides, et qui font penser que l’Artois est un bon pays,
pas trop dur aux pauvres gens; soit qu’il se plaise à grouper sous nos
yeux les petites communiantes à l’âme toute blanche, ou quelque
procession de jeunes filles ondulant en longue file au milieu des blés
mûrs. Oui, ce sont des amis que l’on revoit avec plaisir, tous ces
humbles et ces petits courbés.vers la terre; ils reposent des gens trop
compliqués, trop spirituels, et des favoris de la mode. A vrai dire, il
se peut que nous l’ayons déjà vue, cette Lavandière, qui porte si fière-
ment sa charge sur la tète, et va, la main sur la hanche et le buste
élargi, d’une allure de déesse plutôt que de paysanne; mais c’était au
lever du soleil, au moment du Chant de l’alouette, qu’elle nous était
apparue : aujourd’hui, ce sont les dernières lueurs du couchant qui
la nimbent d’or pâle. 11 se peut aussi que l’autre petite, celle qui
cueille les Dernières /leurs, ait jadis défilé devant nous en procession
avec ses compagnes, toutes de blanc vêtues, et semant les fleurs à
pleines mains. Mais qu’importe cela, et que nous font ces réminis-
cences? Ce ne sont pas les figures en elles-mêmes qui donnent aux
tableaux de M. Jules Breton leur grand, leur poétique attrait; c’est
la façon dont il les comprend, dont il interprète la nature et l’enve-
loppe d’une sorte de voile lumineux : voilà ce qui est bien à lui, et le
ferait reconnaître entre mille. Puis, étant donné qu’il prend tou-
jours ses modèles au même endroit de la terre de France, de sorte
que ses figures se rattachent toutes au même type; que, de plus,
quand il peint la nature extérieure, c’est toujours à ses deux
moments, le lever du jour et le crépuscule du soir, on doit com-
prendre qu’il résulte de tout cela une espèce de monotonie dans ses
tableaux; et de cela on ne saurait lui faire un reproche, non plusque
de n’ètre pas toujoux*s parfait. Quel est le talent d’une réelle valeur
qui est à tous moments égal à lui-inème? Ne jamais varier est la
marque des sots. Il n’y a que les esprits médiocres qui font toujours
également bien, ni mieux, ni plus mal : c’est affaire aux autres de
se tromper parfois. Victor Hugo a fait les Orientales, les Contemplations,
les Châtiments; mais il a fait aussi l’Homme qui rit et l’Ane; et il n’en
reste pas moins Victor Hugo.

Ainsi, les tableaux dus à ce pinceau qui nous est si cher, ne sont
pas tous également beaux; mais tous, par leurs qualités, ont un air
de parenté ; on dirait les nombreux enfants d’un même père, qui
 
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