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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 7.1892

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Nr. 1
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Fourcaud, Louis de: L' art gothique, 3
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https://doi.org/10.11588/diglit.24660#0077
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

mais tout architecte s’assimile librement ce qu’il a pu observer et
l’applique à sa guise. Le style cl’un grand édifice admiré se répercute
de même en de petits édifices ruraux. On ne s’étonne pas à reconnaître,
au début du xme siècle, des reflets de Notre-Dame à Beaumont-sur-
Oise, à Montreuil-sous-Bois, à Gonesse, à Taverny. C’est la loi de
nature qui fait, autour d’un bel arbre, pousser de beaux rejetons.
Parfois aussi, comme nous l’avons remarqué à Saint-Denis, le maître
de l’œuvre s’est inspiré de quelque humble bâtisse. Il en va de la
sorte à Laon, pour l’abside carrée, dessinée d’après les absides
rurales de la contrée, d’où la mode en a passé en Angleterre. Un
charme particulier vient à l’architecture gothique des éléments de
détail recueillis de tous côtés par les artistes et savamment unifiés
dans leurs conceptions. La basilique laonnaise ne trahit-elle pas, en
sa tour-lanterne, ses absidioles à deux étages aux croisillons de son
transsept et le style de son ornementation, un constructeur ayant
étudié en Normandie, à Soissons et à Paris, et qui pourrait bien être,
après tout, l’auteur de Saint-Yved de Braisne? Bourges prolonge ses
cinq nefs jusque dans son sanctuaire, suspend ses maîtresses voûtes
à 37 mètres du sol, rompt en visière à la tradition des hautes
tribunes et s’ornemente au goût du Parisis. Le Mans emprunte aux
Parisiens leurs monostyles, aux Picards leurs absidioles polygonales,
aux Normands leurs tailloirs arrondis et leurs tiers-points aigus à
l’extrême. Par degrés, les provinces lointaines, toujours attentives
aux enseignements du Domaine royal, mettent en circulation des
caractères originaux. Ainsi, la Normandie nous présente à Bayeux,
à Coutances, des chapelles absidales communiquant entre elles, des
lanternes centrales traitées comme des dômes à nervures, des galeries
à claire-voie d’une audace magique, des ogives étirées, des bases et
des chapiteaux un peu lourds. La Champagne, qui doit à un maître
de l’Ile-de-France sa cathédrale de Troyes, arrive, à Notre-Dame et à
Saint-Nicaise de Reims, à des jeux perspectifs, à des dissimulations
de masses, à des multiplications de saillies décoratives, à de capri-
cieux évidements de parois qui donnent aux constructions une vie
surabondante. Elle dépassera son but à Saint-Urbain de Troyes,
église de pierre où rien ne paraît que filigrane et bijouterie. En
Bourgogne, on est moins porté aux subtilités de l’amenuisement; on
tient aux épaisseurs ; on aime les élégances robustes. Une des inno-
vations typiques des Bourguignons, c’est le report des chéneaux des
combles sur des plates-bandes saillantes et l’aménagement d’un
couloir de passage entre le mur et les formerets détachés. Ils
 
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