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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 7.1892

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Nr. 5
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Renan, Ary: Tlemcen, 1: l'art arabe dans le Maghreb
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https://doi.org/10.11588/diglit.24660#0423
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L’A HT ARABE DANS LE MAGHREB.

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châteaux *. » Léon l’Africain ne l’admira pas moins, et, dès mainte-
nant, nous voulons émettre à son sujet une supposition hardie. C’est
que le palais du Méchouar était frère des beaux édifices civils que
l’architecture mauresque a laissés en Espagne. Aussi sa destruction
est-elle à jamais regrettable; elle date de la conquête turque et plus
précisément d’une révolte de la population de Tlemcen contre le bey
Hassan (1670). On verra plus tard que notre supposition n’a rien
d’aventuré.

Avant la construction du Méchouar, les émirs almoravides et
almohades habitaient un palais disparu, le «VieuxChâteau » (.Kasr-
Kedim), qui attenait à la grande mosquée, comme à Kairouan. Lorsque
Yarmoracen eut fait construire le minaret de cette mosquée, il aban-
donna l’ancien palais, parce que du haut de la tour la vue plongeait
sur le harem sans doute. Sur une parcelle de l’emplacement du Kasr-
Kedim qu’il put déblayer, M. Brosselard trouva une grande quantité
de débris, faïences émaillées, fûts de colonnes, arabesques, et vingt
et une tombes de princes et de princesses abd-el-ouadites signalées
par autant d’inscriptions 2. Ces tombeaux étaient jadis des cryptes
richement ornées de faïences et de mosaïques artistement enchâssées.
Dans les fouilles qu’il exécuta à Tlemcen, M. Brosselard en découvrit
un presque intact.

La Kissaria, aujourd’hui caserne de cavalerie, était le caravan-
sérail des chrétiens. Une inscription qu’on y a découverte indique
que sa construction est antérieure à 1328. Entourée d’un mur
crénelé, c’était comme un quartier autonome, contenant un couvent,
une église, des entrepôts et des marchés, où les Génois, les Catalans,
les Pisans et les Provençaux exerçaient en sûreté leur commerce.

L Entre autres objets précieux, le Méchouar renfermait une horloge en argent,
une mendjana (machina) construite par un Tlemcennien, en 1358. Le mécanisme
mettait en mouvement de nombreuses pièces : une lune, un serpent, des oiseaux,
des aigles, une esclave qui saluait le khalife et lui présentait des vers. Le grave
Ibn-Khaldoun nous a conservé ceux qu’il composa lui-même pour les dix heures
de la nuit. Cet ingénieux appareil était de 215 ans antérieur à l’horloge de la
cathédrale de Strasbourg.

2. La plus intéressante des inscriptions découvertes à Tlemcen est sans con-
tredit l’épitaphe du célèbre Boabdil, dernier roi de Grenade; elle prouve, contrai-
rement à ce que les historiens rapportaient, que Boabdil mourut non à Fez, mais
à Tlemcen. Elle débute ainsi : « Tombeau d’un roi mort dans l’exil, à Tlemcen,
étranger, délaissé par ses femmes. Lui qui avait combattu pour la foi, le destin
inflexible l’avait frappé de son arrêt... 11 combattit dans des mêlées terribles où
les armées innombrables des adorateurs de la croix se ruaient sur une poignée de
cavaliers musulmans. » (Brosselard, op. cit.)
 
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