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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 8.1892

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Lefort, Paul: Exposition de cent chefs-d'œuvre des écoles française et étrangères
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https://doi.org/10.11588/diglit.24661#0055
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EXPOSITION DE CENT CHEFS-D'ŒUVRE.

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jaune, de Lady Harcourt, et une délicieuse figure de fillette, The
smiling Girl, s’appuyant des deux bras, jetés de côté, au dossier d’un
siège et vous regardant, souriante et mutine, avec de beaux grands
yeux à demi voilés par de longs cils. Malencontreusement, et comme
il en est d’ailleurs pour d’autres tableaux de la même Ecole, celui-ci
est recouvert d’une glace, ainsi qu’il est d’usage de le faire en
Angleterre ; or, cette glace est, selon l’heure et la lumière du moment,
criblée de reflets et devient ainsi un fâcheux obstacle interposé
entre nos yeux et la peinture. Inutile, avec les miroitements de
l’ambiance, de chercher à se rendre compte de la touche et des
dextérités de pinceau de l’artiste. En vérité, ces inventions de glace
sont pour faire se damner le plus patient.

L’Ecole anglaise, et il est de toute justice de le reconnaître, a
constamment excellé sur la nôtre dans la représentation de la vraie
jeune fille, de celle qui, cessant d’être une gamine n’est pas encore
tout à fait une petite femme. Avec la gaieté, la fraîcheur, la vivacité
dont elle rend ces jolies et piquantes physionomies d’adolescentes,
on est loin, avouons-le, des Cruche cassée et des Innocence de Greuze,
avec leurs sous-entendus équivoques, pour ne pas dire polissons.

De cette grâce anglaise faite d’animation, de franchise et de
pudeur naïve de bon aloi, nous rencontrons un autre excellent
exemple dans le portrait de Jeune fille de John Hoppner (1758-1816),
ce peintre anglo-allemand qu’on a dit être un bâtard de George III
et qui fut un moment, pour le portrait aristocratique, le rival redouté
de sir Thomas Lawrence. De ce dernier maître (1769-1830), nous
avons à l’exposition un merveilleux portrait de la Princesse Clémentine
de Metternich, peint à Vienne, vers 1814 ou 1815, et où l’élégante et
gracile personne est représentée en Hébé. Vêtue d’une gaze légère
qui laisse à découvert les bras et l’épaule gauche, dont les carnations
délicatement nacrées sont peintes à ravir, la jeune Hébé semble
élever en l’air un objet quelconque dans le but visible d’agacer un
aigle qui voudrait sans doute s’en emparer. C’est bien là une allé-
gorie dans le goût du temps, d’intention fine et malicieuse; mais
que l’on n’est guère tenté de plaindre l’oiseau du maître des dieux
d’être ainsi lutiné !

Un peu maniérée dans la sveltesse de sa pose, cette coquette
Hébé, exécutée avec une exquise légèreté de pinceau, s’enlève en
clair sur un ciel bleu d’outremer. Nous ne savons pas si ce portrait
& été ressemblant, mais on peut toujours soupçonner que le modèle
devait être aussi gracieux et joli, que spirituel.
 
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