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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 9.1893

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Nr. 4
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Fourcaud, Louis de: Exposition des oeuvres de Meissonier, 2: le peintre - le dessinateur
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https://doi.org/10.11588/diglit.24662#0299
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272

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

dernière heure. Les règlements n’étaient point faits pour lui. Tout
grand jury d’Etat l’avait pour président, comme d’office. En 1884,
pour fêter le cinquantième anniversaire de son premier envoi au
Salon, on réunissait dans la galerie Georges Petit, ses toiles les plus
fameuses; l’administration des Musées détachait du Luxembourg sa
Bataille de Solferino et la reine d’Angleterre se dessaisissait, deux
mois entiers, de sa Rixe, afin de s’associer à l’hommage. A chaque
instant, les journaux dénombraient les sommes énormes dont ses
tableaux étaient payés. Tel amateur d’Amérique avait acquis au prix
de plusieurs centaines de mille francs une seule de ses peintures. Je
n’oublierai jamais, quant à moi, la longue apothéose que fut pour lui
l’Exposition universelle de Paris, en 1889. Il ne présidait pas seule-
ment le jury, il trônait en pleine gloire. Au banquet, organisé en
son honneur par ses collègues, après le vote des récompenses, plus
de vingt orateurs français ou étrangers le saluèrent, en d’enthou-
siastes improvisations, chef éclatant, incontesté de l’École française.
Bientôt après, il se voyait décerner le grand cordon rouge des géné-
raux d’armées. Victor Hugo lui-mème, au comble de la popularité,
ne connut point de plus chaudes ivresses.

Il va de soi que, notant ici ces choses, je n’ai en vue que d’exposer,
de bonne foi, une situation unique et que je n’entends nullement
user d’ironie. Depuis deux ans, le vieil artiste est couché dans
sa tombe. Quatorze cents de ses ouvrages, peints, dessinés, aqua-
rellés, gravés ou modelés, rassemblés, présentement, en cette même
galerie dé la rue de Sèze, où il put naguère envisager son passé d’un
regard, nous permettent d’interroger sa carrière et nous incitent
à la juger. Je vais essayer de résumer sans parti pris les idées qui se
posent ou les questions qui se proposent. Meissonier fut un maitre, à
plusieurs égards, très extraordinaire. Ses qualités essentielles ne
redoutent pas un examen que la critique ne saurait, d’ailleurs, plus
longtemps ajourner. Si. par certains côtés, des réserves se comman-
dent, les mérites exclusifs du peintre n’en accuseront que mieux leur
vrai caractère. Au surplus, un respect qui se refuse le droit de
mettre en balance les vertus et les défauts d’un homme célèbre, les
richesses et les pauvretés d’une production typique, n’est que puéri-
lité.

Tout d’abord, un coup d’œil parait indispensable sur les ori-
gines de Meissonier et les causes déterminantes de sa fortune.
Il naît à Lyon, en 1811 : c’est dire assez que les derniers éblouisse-
ments de l’épopée impériale illuminent ses premiers souvenirs. Son
 
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