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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 9.1893

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Nr. 6
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Falize, Lucien: Claudius Popelin et la Renaissance des émaux peints, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24662#0546
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504

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

les cités qu’il nomme en son roman d’amour. Il séjourna longtemps
à Florence : c’est là qu’il subit, le charme, c’est là que s’opéra la
métamorphose et que naquit le poète, le philosophe aimable et disert
que nous avons connu. Il y apprit à vivre et à penser non pas
comme un sujet du grand-duc régnant, mais comme le citoyen d’une
république idéale, « milieu très favorable à la liberté des esprits ».
Il fréquenta les bibliothèques et les musées, traduisant les auteurs,
copiant les maîtres, s’imprégnantde poésie et d’histoire, s’identifiant
par les yeux et par l’àme avec un passé merveilleux, apprenant la
langue de Dante et du Tasse, peignant, écrivant, rêvant surtout.

La révolution de 1848, qui secoua l’Europe, eut en Italie comme
en France de sanglantes journées; Popelin revint à Paris et, s’il
sortit un jour de son rêve pour se mêler aux combattants et jouer un
rôle héroïque dans la folie de l’émeute, ce fut pour revenir aussitôt
à son calme. Plus jamais il n’eut la curiosité de descendre aux choses
de la politique : dédaigneux des querelles de partis, supérieur aux
calculs d’ambition, il demeura depuis dans une superbe indépendance.

En ce temps-là c’était un ignoré, mais un fervent; il rentrait au
logis non pas comme un enfant prodigue, mais comme le fils attendu
pour qui sont toutes les tendresses du père et les consolations aussi ;
car — il l’a raconté dans ses vers —il revenait meurtri, ayant aimé,
ayant souffert et dans ses poètes préférés il cherchait un remède,
voulant, par leurs chants douloureux, bercer sa peine.

II reprit ses pinceaux. Il lui fallait un maître capable de mettre
en ordre tout ce qu’il apportait d’idées et de formules : il s’adressa à
celui qui, mieux que tout autre, pouvait le comprendre et l’aider, à
Ary Scheffer ; pendant dix ans, le maître et l’élève vécurent dans
une intimité profonde, une amitié réelle. C’était le temps où Ary
Scheffer subissait lui-même l’action de Ingres, luttait, souffrait, se
rendait, cessant d’être le peintre romantique du Larmoyeur pour
tracer d’une ligne plus précise et d’un pinceau moins chaud le Christ
consolateur et le Jésus sur la montagne. Popelin arrivait donc à
une heure d’incertitude et lui qui admirait de toute son âme de
poète florentin la Françoise de Riinini, il lui fallait écouter muet les
emportements de Ingres, qui régentait son maître.

Les leçons que Claudius Popelin allait prendre 11e pouvaient donc
pas avoir leur plein effet et cela explique comment il fut le confident
bien plus que l’élève d’un maître, qui avait le double de son âge.
Bartholdi, qui travaillait en même temps aussi dans l’atelier de
Scheffer a subi, comme Popelin, l’effet de cette inquiétude. Ils n’ont
 
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