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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 10.1893

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Meissner, Franz Hermann: Arnold Boecklin, [2]: artistes contemporains
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ARNOLD B OE G KL IN.

19

excentrique du peintre suisse. A Zurich, un jour, Boecklin s’était
obstiné à prendre place aux premiers rangs d’une salle de concert,
malgré que la salle fût bondée; il était entré presque de force, s’était
carré bien en vue, puis avisant un brave gros Suisse tranquillement
assis, il demanda tout haut à Gurlitt s’il le croyait plus fort que cet
homme, et capable de le flanquer à terre : car, jusque dans sa
vieillesse, il a gardé une force musculaire prodigieuse.

L'originalité de Boecklin s'est manifestée de très bonne heure
dans sa peinture, tant pour ce qui est de l’invention des sujets que
pour la technique. Ce n’est guère que dans ses premières œuvres que
l’on trouve une trace d’influences étrangères. Ces influences sont,
notamment, celles de son maître Schirmer, de Corot, dont il paraît
avoir vu et admiré les premières œuvres pendant son séjour à Paris,
mais surtout du Poussin, qui pendant toute sa jeunesse lui a servi de
modèle pour la calme et simple grandeur de ses lignes et de son
coloris. Mais Boecklin n’a pas tardé à secouer toutes ces influences
pour aller seul dans sa voie; et son originalité y est devenue si forte
et si singulière qu’il faut, pour trouver quelqu’un de qui le rappro-
cher, remonter jusqu’à Giorgione. Par plus d’un point, en revanche,
il rappelle le glorieux maître vénitien : ainsi, par l’éclat profond et
la délicate harmonie de ses couleurs, par la vie surnaturelle dont il
anime ses figures.

Comme Giorgione et tous les anciens, Bœcklin attache une
importance capitale à la composition : sa composition est d’ailleurs
magistrale et, à ma connaissance du moins, absolument impeccable.
Il s’entend comme il convient à subordonner tous les détails à un
point central. Avec cela, coloriste de race, véritable musicien de la
couleur, aussi habile à produire l’effet par les plus douces harmonies
que par les contrastes les plus hardis. Sa couleur apparaît comme
le vêtement nécessaire de ses pleines, massives, sculpturales figures
d’hommes et de bêtes, étranges figures qu’on dirait tirées d’un
monde préhistorique.

Pour donner à ses tableaux cette puissance de vie en quelque
façon démoniaque, Bœcklin se sert d’une technique de son invention,
dont il garde d’ailleurs le secret pour lui seul. Cette technique
consiste en réalité à peindre les premiers fonds à la détrempe et à y
joindre ensuite le vernis : Bœcklin obtient ainsi, comme les peintres
 
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