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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 11.1894

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Nr. 2
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Hermant, Jacques-René: L' art décoratif à l'exposition de Chicago
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https://doi.org/10.11588/diglit.24664#0175
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

à côté d’une fabrication industrielle de pièces ordinaires, dont le grand
débit assure de beaux bénéfices, un atelier d’art où tout serait sacrifié
à la recherche du beau. C’est là un grand progrès et nous ne doutons
pas qu’il ne soit destiné à produire d’excellents effets.

Mais ce n’est pas tout.

La division du travail est cause que le dessinateur qui ne sert
qu’à jeter sur le papier les idées de son raaitre, ne connaît le plus
souvent ni le client pour lequel il travaille ni l’ouvrier qui traduira
sa pensée. Il sait dessiner, mais n’est au fond qu’un employé qui doit
fournir un travail correspondant à ce qu’il gagne, c’est tout ce qu’on
lui demande. Comment pourrait-il s'intéresser à sa besogne? Pour
lui la composition n’est qu’un métier.

A peine a-t-il eu quelques succès à l’Ecole des Arts décoratifs, le
jeune élève ne songe déjà qu’à trouver une place aussi avantageuse
que possible. Il a appris à faire très proprement du « style », et cela
lui suffit puisqu’il trouve le moyen de gagner sa vie. Bien peu se
laissent tenter par les idées d’art. Si malgré les exemples de ses
camarades, l’un d’eux se dit qu’il y a mieux et plus à faire, il entre à
l’Ecole des Beaux-Arts, devient architecte, peintre, sculpteur ou
graveur, mais jamais il ne reste ouvrier d’art.

Il n'est pas plus tôt sorti de son ancien milieu qu’il se trouve trans-
porté dans un tout autre monde où le mépris de ce qui n’est pas de ce
monde est de règle et où l'on se refuse à considérer comme un artiste
l’homme qui compose des broderies, des étoffes ou des meubles.

Ce qu’il faudrait par conséquent et ce qui est heureusement sur
le point de se faire, c’est que les Beaux-Arts, ouvrant leurs portes
aux modèles créés par des hommes qui sont dans toute l’acception
du mot des artistes, hauteur d’une belle œuvre d’art décoratif soit
assuré de s’y trouver sur le même pied que les autres et d’y rencon-
trer au même titre la faveur du public.

Ceux que leurs dispositions personnelles poussent vers la déco-
ration ne se feront plus violence pour devenir autre chose que des
décorateurs, sachant que leur art est honoré à l’égal des autres. Il y
a même mieux, beaucoup d’artistes qui poussés parle besoin travail-
lent journellement pour l’industrie n’auront plus honte de le faire
et, comprenant que ce n’est pas déchoir, n’hésiteront plus à consacrer
aux œuvres de cette nature toute leur âme et tout leur talent.

Le fabricant est obligé de se soumettre au goût de celui qui lui
commande; il est donc en mauvaise position pour le réformer. Ce
n’est pas lui, malgré sa science, son talent, sa conviction, qui peut
 
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