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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 15.1896

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Nr. 1
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Leprieur, Paul: Le centenaire de la lithographie, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24681#0064
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

C’est de toutes parts une poussée d’enthousiasme vers les aspirations
qui sont restées les nôtres, vers les besoins modernes dont nous
avons hérité : l’histoire mieux aimée et comprise, la nature profon-
dément goûtée et sentie, la vie contemporaine scrutée en tous ses
replis. A cotte effervescence générale, à cette soif ardente de pensées
et d’expressions rajeunies, la lithographie s’offrit comme un instru-
ment tout trouvé, dont la nouveauté faisait le charme, dont la
merveilleuse fidélité surtout à rendre ce qu’on lui confie étonna et
ravit, autant que la rapidité extraordinaire avec laquelle s’accom-
plissait l’œuvre de miracle. Ce n’était plus une traduction; c’était
le dessin même, l’idée de l’artiste, transportée toute vivo de sa
main sous la presse et éternisée en sa spontanéité, sa fraîcheur ou
sa grâce. Demarteau et ses fac-similé de crayons, auxquels on
songea an début, furent bien vite dépassés. Une fois les premières
difficultés surmontées et l’expérience du procédé acquise, la litho-
graphie fut ce qu’elle aurait dû toujours rester, ce qui fait son
originalité et sa force entre tous les autres modes de reproduction,
ce qui est en quelque sorte sa vie même et sa raison d’être : à savoir,
un moyen rapide et commode pour les dessinateurs do fixer leurs
pensées au fur à mesure qu’elles naissent, de les propager et de les
répandre. Différente de l’eau-forte, d’ailleurs alors dans les limbes,
n’ayant pas à subir comme elle une part de col laboration du hasard
ou les lenteurs d’un apprentissage fatigant, moins limitée, de plus,
en son domaine, et, somme toute, moins uniforme, la lithographie
bien comprise est à peine un métier; ce n’est que la libre et facile
expansion d’un tempérament d’artiste. Capable de se plier à tous les
caprices, de se prêter à tous les rêves, changeant mille fois d'aspect
suivant la nature ou la disposition même de celui qui l’emploie,
kaléidoscope incomparable, elle a pendant vingt ou trente ans
amusé la pensée française et fourni matière aux incarnations les
plus diverses. Plusieurs y viennent par curiosité à l’origine, qui y
restent attachés toute leur vie. Pour les uns, c’est un début; pour
d’autres, presque une carrière; et si, à la faveur de l’engouement
universel, bien des médiocrités encombrantes ou des virtuoses
parlant pour ne rien dire occupèrent momentanément l’attention,
il y eut aussi dans le nombre des artistes de génie, novateurs
enragés, critiques acerbes et convaincus, aidant chacun en leur
genre à faire des révolutions, et qui sans la lithographie peut-être
auraient manqué do leur moyen le plus actif de propagande et de
lutte. En ces temps lointains, où la gravure sur bois se préparait à
 
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