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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
C’est grâce à ces relations sans doute que Gaffurio se plut à se
qualifier de réglas musicus dans une lettre adressée au milanais
Simon Crotti, et conservée au musée de Lodi. Rien d’étrange, par con-
séquent, à ce qu’à un tel homme, mort en 1522, pendant que régnait
dans le duché de Milan l’influence française, à un regius musicus,
on ait préparé un regium monumentum, selon l'expression adoptée
dans l’inscription qui mentionne le larcin de Mercure Bua1.
Quant à l’explication du troisième bas-relief, c’est-à-dire du
premier dans l’ordre chronologique et la disposition locale en venant
de gauche à droite, c’est encore M. Sant’ Ambrogio qui nous en
donne la clef, en rappelant certains épisodes de la vie de Franchino
Gaffurio. ils se rapportent aux polémiques ardentes et acrimonieuses
qui s’étaient déchaînées, après 1520, entre le célèbre musicien et son
rival de l’école musicale de Bologne, Jean Spatario, lequel, à son
tour, était soutenu par l’Espagnol Barthélemy Bamis de Pereira,
fondateur de l’école de Bologne.
Selon M. Saut’Ambrogio, on pourrait interpréter le sujet de la
manière suivante : si un des hauts-reliefs que nous venons d’exa-
miner, celui du milieu, représente le musicien distingué sur son lit
de mort, et l’autre haut-relief les honneurs funèbres qui lui furent
rendus, le haut-relief qui les précède, dans une composition em-
brassant différents motifs très animés et indiqués probablement
par une personne touchant de près au défunt, devrait logiquement
nous montrer l’apothéose de ce fils des Muses et la défaite igno-
minieuse de ses ennemis personnels. Il est vrai que, pour arriver
à cette explication, il est nécessaire de recourir à un symbolisme
hardi et presque puéril dans certains détails, mais qui n’a rien de
trop étonnant, si l’on tient compte des tendances du temps, qui incli-
nèrent la sculpture lombarde vers les conceptions touffues et compli-
quées, et si l’on considère la violence des diatribes que Gaffurio avait
suscitées contre lui-même et auxquelles, nous le savons par ailleurs,
il se plut à répondre du même ton.
C’est ainsi que nous nous sentons autorisés à reconnaître Fran-
chino Gaffurio dans le personnage assis majestueusement sur un
trône élevé de quatre marches, personnage auquel manque malheu-
reusement la tête. Les deux figures barbues placées à sa gauche,
dont l’une tient une palme et qui semblent exalter les mérites du
I. Ace propos, M. Sant'Ambrogio cite plusieurs exemples de monuments
érigés à Pavie, dans les églises, à la mémoire de personnages qui s’étaient
distingués à l’Université.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
C’est grâce à ces relations sans doute que Gaffurio se plut à se
qualifier de réglas musicus dans une lettre adressée au milanais
Simon Crotti, et conservée au musée de Lodi. Rien d’étrange, par con-
séquent, à ce qu’à un tel homme, mort en 1522, pendant que régnait
dans le duché de Milan l’influence française, à un regius musicus,
on ait préparé un regium monumentum, selon l'expression adoptée
dans l’inscription qui mentionne le larcin de Mercure Bua1.
Quant à l’explication du troisième bas-relief, c’est-à-dire du
premier dans l’ordre chronologique et la disposition locale en venant
de gauche à droite, c’est encore M. Sant’ Ambrogio qui nous en
donne la clef, en rappelant certains épisodes de la vie de Franchino
Gaffurio. ils se rapportent aux polémiques ardentes et acrimonieuses
qui s’étaient déchaînées, après 1520, entre le célèbre musicien et son
rival de l’école musicale de Bologne, Jean Spatario, lequel, à son
tour, était soutenu par l’Espagnol Barthélemy Bamis de Pereira,
fondateur de l’école de Bologne.
Selon M. Saut’Ambrogio, on pourrait interpréter le sujet de la
manière suivante : si un des hauts-reliefs que nous venons d’exa-
miner, celui du milieu, représente le musicien distingué sur son lit
de mort, et l’autre haut-relief les honneurs funèbres qui lui furent
rendus, le haut-relief qui les précède, dans une composition em-
brassant différents motifs très animés et indiqués probablement
par une personne touchant de près au défunt, devrait logiquement
nous montrer l’apothéose de ce fils des Muses et la défaite igno-
minieuse de ses ennemis personnels. Il est vrai que, pour arriver
à cette explication, il est nécessaire de recourir à un symbolisme
hardi et presque puéril dans certains détails, mais qui n’a rien de
trop étonnant, si l’on tient compte des tendances du temps, qui incli-
nèrent la sculpture lombarde vers les conceptions touffues et compli-
quées, et si l’on considère la violence des diatribes que Gaffurio avait
suscitées contre lui-même et auxquelles, nous le savons par ailleurs,
il se plut à répondre du même ton.
C’est ainsi que nous nous sentons autorisés à reconnaître Fran-
chino Gaffurio dans le personnage assis majestueusement sur un
trône élevé de quatre marches, personnage auquel manque malheu-
reusement la tête. Les deux figures barbues placées à sa gauche,
dont l’une tient une palme et qui semblent exalter les mérites du
I. Ace propos, M. Sant'Ambrogio cite plusieurs exemples de monuments
érigés à Pavie, dans les églises, à la mémoire de personnages qui s’étaient
distingués à l’Université.