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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 20.1898

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Nr. 4
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Lauzun, Philippe: Un sculpteur oublié: Gae͏̈tan Merchi
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https://doi.org/10.11588/diglit.24684#0300

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208

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

C’est ce qui nous explique comment notre jeune sculpteur fut
mis, dès les premières heures de son séjour dans la capitale, en con-
tact avec le monde des artistes et plus particulièrement avec le per-
sonnel de l’Académie royale de musique, comment il en lit sa prin-
cipale société et comment il ne tarda pas à y acquérir une réputation
exceptionnelle, jusqu’à eu devenir en quelque sorte le sculpteur
attitré.

Dans les relations mondaines de cette époque, l’Opéra eut une
importance toute particulière. Là se trouvaient réunies trois fois
par semaine toutes les classes de la société ; là se coudoyaient sans
vergogne aucune les princes du sang et les financiers, les grands sei-
gneurs et les philosophes, les plus célèbres impures et les galants
abbés de cour. L’opinion des premiers sujets, aussi bien de la danse
que du chant, y faisait loi, et, chaque soir, la cour et la ville se
répétaient, en le colportant de bouche en bouche, le dernier mot
toujours spirituel et toujours mordant de Ml,c Arnould. Aussi, que
d’épigrammes y jaillissaient! Que de cabales, que de jalousies, écloses
dans cette atmosphère surchauffée par toutes les élégances, toutes
les vanités, tous les vices!

C’est l’époque où, chargée de richesses, d’honneurs et aussi
d’années, songe à se retirer la célèbre Sophie (1778) ; où Vestris Ier,
le dion de la danse, ainsi qu’il se qualifiait modestement lui-même,
cède la place à son fils Auguste, à seule fin de fonder la légendaire
dynastie des Vestris ; où Dauberval règne sans partage sur tous les
cœurs ; où enfin, au milieu de cette élégante guirlande des plus sédui-
santes danseuses, Allard, Peslin, Théodore, Heinel, Dorival, Gervais
et bien d'autres encore, brille au premier rang Marie-Madeleine
Guimard.

En l’année 1779, la Guimard était à l’apogée de sa réputation et
de sa gloire. Agée de 35 ans, depuis 1762 pensionnaire de l’Opéra,
où elle avait créé et dansé plus de cinquante rôles différents, tour à
tour entretenue par le maréchal prince de Soubise, parM. de la Borde,
fermier général, et finalement par M®r de Jarente, évêque d’Orléans,
la célèbre danseuse défrayait les conversations de tout Paris par le
luxe insolent de son train et par ses folles prodigalités. On sait, dans
leurs moindres détails, l’histoire de ses soupers et de ses amours.
On connaît les pièces qu’elle faisait jouer à son théâtre de Pantin
d’abord, puis à celui plus vaste de son hôtel de la Chaussée d’Antin,
« véritable boudoir, où les loges à tentures de taffetas rose étaient
toutes relevées d’un galon d’argent », et où elle attirait si bien le
 
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