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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 23.1900

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Nr. 1
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Nolhac, Pierre de: Les Bosquette de Versailles, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24720#0051
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

manque est fort significative. Nous n'avons, par exemple, ni les
Trois Fontaines, ni l’Arc de Triomphe, ni l’ile Royale, ni la Giran-
dole, ni la Galerie d’eau, ni la Montagne d’eau, ni d’autres encore.
Rien ne reste de toutes ces merveilles, dont la création faisait dire
au Mercure : « Nous sommes dans un règne de miracles. » Les
anciennes estampes, les tableaux de Cotelle ou de J.-B. Martin,
celui-là même qui fut « Martin des batailles », nous rendent assez
bien l’aspect de ces parties mortes des jardins. 11 y faut recourir sans
cesse, les classer, les dater, les interpréter. Je ne compte pas retenir
le lecteur sur tant de bosquets détruits, disparus presque tous sans
laisser d’autre trace que la canalisation souterraine qui alimentait
leurs fontaines ; mais on peut évoquer, au moins, comme exemples
de ce que nous avons à regretter, le singulier bosquet du Marais,
une des plus anciennes créations de ce genre, et surtout le Théâtre
d'eau, qui fut sans doute la plus étonnante.

<c En ce temps-là, raconte Charles Perrault, le Roi laissait ordon-
ner de toutes choses à M. Colbert ; et M. Colbert se fiait à nous
pour l'invention de la plupart des dessins qu’il y avait à faire. Mais
les dames ayant remarqué que le Roi y prenait beaucoup de plaisir,
elles voulurent se mêler d’en donner de leur côté, pour amuser le
Roi agréablement. Mme de Montespan donna le dessin de la pièce du
Marais, où un arbre de bronze jette de l'eau par toutes ses feuilles de
fer-blanc, et où les roseaux de même matière jettent aussi de l'eau
de tous côtés '. » Cet arrangement, qui semble avoir inspiré plus tard
la fontaine de l’Obélisque, fut commandé en 1671 et, toutes les
années suivantes, on ne cessa d’embellir de maintes façons la coû-
teuse fantaisie de la favorite.

Louis XIV s'intéressait particulièrement à l’arbre du Marais et
Colbert y faisait travailler sans discontinuer. On en trouve plusieurs
mentions dans ses lettres à son maître, celle-ci, par exemple, où se
révèle bien la minutie des détails dans lesquels entrait le Roi :
« La tige de l’arbre du Marais, qui est de fonte, est sur le lieu, et on
y a soudé déjà plusieurs branches. Tous les feuillages sont redressés
et en étatd’ètre rejoints aux branches. J’ai fait faire un petit contre-
mur dans le bassin du Marais, pour porter les planches de roseaux,
après quoi il n'y a pas à craindre qu’ils tombent dans l’eau, comme

i. Cf. Mémoires, Contes et autres œuvres de Ch. Perrault, éd. Paul L. Jacob,
Paris, 1842, p. 80. Je cite toujours le texte d’un manuscrit autographe, qui con-
tient de nombreuses variantes.
 
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