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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 23.1900

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Nr. 2
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Montesquiou-Fezensac, Robert de: Alfred Stevens
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https://doi.org/10.11588/diglit.24720#0123
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Les Saisons, quatre jeunes femmes qu’il eut le bon goût de ne pas
dévêtir, plus ou moins mythologiquement, mais de laisser en proie à
leurs modes. Le Printemps, douce Grâce émue, derrière la blanche
écume des pommiers, les doigts noués dans une inquiétude rêveuse.
L'Été tient des fleurs et s’abrite d’un éventail dont l’ombre portée
fait errer sur ses juvéniles traits comme un nuage sur une rose.
L'Automne s’accoude et se souvient, au chant des oiseaux qui émi-
grent, au pénétrant parfum des chrysanthèmes. L'Hiver est vêtu
d’un barège feuille morte. Pensive liseuse au livre refermé, mélan-
colie non moins amère sous ses rubans, Mnemosyme mondaine.

Le jovial Flamand reparaît dans le tableau de L’Alsacienne : une
belle et gaillarde servante, en costume national, s’interrompt d’épous-
seter pour s’ébahir à considérer une Vénus accroupie, quasi de gran-
deur nature. Bien entendu, ce domestique épisode, un peu trop spi-
rituel pour mon goût, n’est que pour donner carrière à une virtuosité
caressante et indéfectible, qui va du détail de l’ajustement — brode-
ries, tablier à dentelles —à la fleur empennée du plumeau dans son
sépale de cuir vermillon, aux contours froidement lascifs de la statue
d’argent, aux tons de lèvres mortes d’un rhododendron violacé, dans
un cachepot de cuivre, aussi peuplé d’images mirées qu’une boule
de jardin, à tout l’inventaire enfin de ce mobilier de médecin, du
temps qu’ils étaient sans goût.

Je dirai encore Le Sphinx, debout et les bras croisés en sa robe
fleurie ; mystérieux et souriant, tout le visage dans l’ombre, sur son
auréole de cheveux blond cendré ; énigme de féminisme et de demi-
teinte; — La Baigneuse, naïade intime, au chignon haut troussé sur
la tête, souriante au bord de la baignoire en métal poli qui la reflète,
sœur moderne de la Romaine de Tadema, voilée par ses pétales de
rose. Une rose d’un jaune soufre exalte la froideur de l’argent, la
tiédeur des ombres ambrées, la pâleur des chairs d’ivoire.

Le même modèle a posé pour un autre tableau de dimen-
sions moindres : Souvenirs et Regrets, titre qui sent bien son
époque et son fruit. Car c’est un fruit d’arrière-saison que cette
beauté abondante. Au bras du fauteuil qu’elle emplit de ses ron-
deurs épanchées, c’est moins entre les lignes du billet ouvert dans
sa main qu’entre les lignes de ses formes mûrissantes qu’elle
épelle elle-même le titre automnal de son effigie. Toile rare, peut-
être unique dans l’œuvre de Stevens par l’élargissement de la
manière et l’assouplissement de la matière, qui la font, l'une
s’apparenter à M, Degas en son rendu génialement véridique,
 
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