Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 27.1902

DOI issue:
Nr. 2
DOI article:
Bibliographie
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.24809#0192
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
BIBLIOGRAPHIE

175

Malgré les ingénieux et multiples rapprochements auxquels se livre M. de
Nolhac, j’admets moins aisément la dénomination qu’il propose pour le dessin
inédit coté sous le n° 64 dans la collection du Louvre. Selon lui, nous assistons
aux horreurs de la nuit du 2 au 3 septembre 1792 : or, en offrant les originaux
au Conseil du Muséum central de l’an IX, la veuve de Prieur désignait ce dessin
comme un épisode du 9 thermidor ; l’assertion de cette femme peut être sujette
à caution, mais les détails de la mise en scène sont, n’en déplaise à M. de Nolhac,
de nature à la corroborer. Avant d’y revenir, il est nécessaire de décrire ce
dessin que ses dimensions ne nous permettent pas de mettre sous les yeux du
lecteur.

Dans une vaste salle éclairée par deux hautes fenêtres fermées et par la
lueur des torches, on voit, à gauche, un homme, invalide ou blessé, porté par
deux autres hommes qui s’approchent d’une table sur laquelle un personnage
cache sa tête entre ses bras, comme s’il voulait se dérober à un spectacle affreux.
Au pied de cette table gisent deux mourants ou deux cadavres, renversés l'un
sur l’autre. Derrière elle s’entassent des hommes, les mains liées au dos, les
cheveux noués en queue battant les épaules, et coiffés pour la plupart de chapeaux
à bords évasés ; au premier rang, l’un d’eux porte une écharpe en sautoir.
A droite du spectateur s’avance, en rang pressés, un autre groupe armé de
piques et de fusils, et vêtu d’une sorte d’uniforme garni de buflleteries. A sa tête
marche un personnage coiffé d’un chapeau à plumes, les jambe» nues ou recou-
vertes d’un tricot émergeant de bottes molles, et armé d’un glaive romain qui
n’a point quitté son fourreau. Une niche, creusée dans la muraille, encastre un
buste vaguement indiqué. Pour M. de Nolhac, ce buste serait celui du cardinal de
Furstenberg, l’homme infirme oy blessé l’officier suisse Reding ou M. de Bois-
ragon, le personnage endormi ou terrifié l’un des assesseurs de Stanislas Maillard,
l’homme au panache le comédien Dugazon. De même, il reconnaît dans les
deux gisants deux jeunes soldats de la garde du Roi, tombés après une lutte
désespérée contre leurs égorgeurs, et dans les prisonniers massés derrière la
table de nouvelles victimes vouées aux coups des assassins qui arrivent en
foule et qui traînent vers la table un autre prisonnier, garrotté, lui aussi, que
l’un de ses bourreaux tire par l’oreille, tandis qu’un autre le menace de son sabre.

Vainement M. de Nolhac a-t-il accumulé les références aux témoignages des
contemporains et notamment aux mémoires, découverts il y a peu d’années, de
l’internonce Salamon ; vainement insinue-t-ii que Prieur, citoyen de la section
Poissonnière, d’où était parti le signal du massacre, avait dû être averti de ce
qui se passait et accourir aussitôt pour noter les péripéties du drame ; je me
demande, avec M. Jean Guiffrey, si l’artiste n’a pas voulu nous transporter dans
le « cabinet vert » de l’Hôtel de ville, si ce buste n’est point celui de Marat, de Le
Peletier de Saint-Fargeau ou de Ghalier, si cette table n’est point celle où Robes-
pierre avait dicté ses dernières proclamations, si les deux corps renversés ne sont
point le sien et celui de Le Bas, si le blessé porté vers la table ne serait pas Au-
gustin Robespierre, ramassé après sa chute sur les marches de l’Hôtel de ville, si
le fuyard traîné à droite par ses gardiens ne serait point Henriot, si ces prisonniers
massés au fond de la pièce ne sont point les membres de la Commune, dont le
maire, Lescot-Fleuriot, porterait encore — détail important négligé parM. de Nolhac
— l’écharpe municipale, si ces gens armés de piques et de fusils ne sont point
 
Annotationen