196
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
l’art chinois et de l’art japonais aussi bien que celle de l'art grec et
de l’art romain. Les productions de la Renaissance font bon ménage
avec celles de notre temps. L’Italie, l’Espagne, l’Angleterre, la
Belgique, la Hollande, l’Allemagne et la France manifestent leur
génie particulier dans un fraternel voisinage. Toutes les écoles sont
donc plus ou moins représentées. Tableaux, dessins, eaux-fortes,
marbres, bronzes, terres cuites, ivoires, vases antiques, verres phé-
niciens, passent tour à tour sous les yeux du visiteur. La diversité
des objets stimule et renouvelle l’intérêt. On se sent d’ailleurs dans
une sphère sereine et élevée, et l’on s’abandonne sans réticence aux
douces impressions qu’éveille la vue du beau sous toutes ses formes.
Est-ce à dire que toutes les branches de l’art offrent ici des spé-
cimens aussi remarquables et aussi multiples les unes que les au-
tres? Nullement. Sans doute, quelques tableaux et plusieurs bustes
sont dignes de figurer dans les plus grands musées; mais ce qui con-
stitue la principale richesse de la collection Bonnat au musée de
Bayonne, outre ses quatre-vingt-onze terres cuites grecques, ce sont
les cinquante-neuf bronzes de Barye, sortis tous de son atelier et en
général retouchés par lui, ce sont les dessins anciens et modernes.
Le nombre de ces dessins n’est pas inférieur à cent quatre-vingt-
sept. Il y en a, notamment, seize d’Ingres et douze de Prud'hon,
tous admirables et d’une valeur exceptionnelle. Voilà de quoi satis-
faire amplement les connaisseurs délicats. Voilà des moyens d’in-
struction mis à la portée de chacun. On ne saurait souhaiter plus
et mieux pour entrer dans l’intimité des maîtres et pour assister à
l’éclosion de leurs pensées.
C’est M. Bonnat lui-même qui a rangé sa collection dans le local
mis à sa disposition. On reconnaît tout de suite le goût d’un artiste
tel que lui. L’harmonie est partout. Si les écoles sont mêlées les unes
aux autres, il n’y a pas, du moins, de voisinages fâcheux : aucune
peinture ne nuit à sa voisine. En outre, les cadres n’étant pas trop
pressés, chaque tableau garde mieux sa valeur propre. Quant aux
élégantes vitrines, elles sont comme de vastes écrins étalant avec
orgueil les figurines de Tanagra, les petits bronzes grecs, les verres
irisés, les ivoires, les esquisses des sculpteurs modernes. Les bronzes
de Barye en occupent une immense, à eux seuls. L’arrangement ne
laisse donc rien à désirer. 11 satisfait les yeux et l’esprit.
Analyser une à une toutes ces richesses serait une entreprise
trop longue; mais il importe de mentionner ce qui doit attirer sur-
tout l’attention du visiteur et se graver dans sa mémoire, comme on
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
l’art chinois et de l’art japonais aussi bien que celle de l'art grec et
de l’art romain. Les productions de la Renaissance font bon ménage
avec celles de notre temps. L’Italie, l’Espagne, l’Angleterre, la
Belgique, la Hollande, l’Allemagne et la France manifestent leur
génie particulier dans un fraternel voisinage. Toutes les écoles sont
donc plus ou moins représentées. Tableaux, dessins, eaux-fortes,
marbres, bronzes, terres cuites, ivoires, vases antiques, verres phé-
niciens, passent tour à tour sous les yeux du visiteur. La diversité
des objets stimule et renouvelle l’intérêt. On se sent d’ailleurs dans
une sphère sereine et élevée, et l’on s’abandonne sans réticence aux
douces impressions qu’éveille la vue du beau sous toutes ses formes.
Est-ce à dire que toutes les branches de l’art offrent ici des spé-
cimens aussi remarquables et aussi multiples les unes que les au-
tres? Nullement. Sans doute, quelques tableaux et plusieurs bustes
sont dignes de figurer dans les plus grands musées; mais ce qui con-
stitue la principale richesse de la collection Bonnat au musée de
Bayonne, outre ses quatre-vingt-onze terres cuites grecques, ce sont
les cinquante-neuf bronzes de Barye, sortis tous de son atelier et en
général retouchés par lui, ce sont les dessins anciens et modernes.
Le nombre de ces dessins n’est pas inférieur à cent quatre-vingt-
sept. Il y en a, notamment, seize d’Ingres et douze de Prud'hon,
tous admirables et d’une valeur exceptionnelle. Voilà de quoi satis-
faire amplement les connaisseurs délicats. Voilà des moyens d’in-
struction mis à la portée de chacun. On ne saurait souhaiter plus
et mieux pour entrer dans l’intimité des maîtres et pour assister à
l’éclosion de leurs pensées.
C’est M. Bonnat lui-même qui a rangé sa collection dans le local
mis à sa disposition. On reconnaît tout de suite le goût d’un artiste
tel que lui. L’harmonie est partout. Si les écoles sont mêlées les unes
aux autres, il n’y a pas, du moins, de voisinages fâcheux : aucune
peinture ne nuit à sa voisine. En outre, les cadres n’étant pas trop
pressés, chaque tableau garde mieux sa valeur propre. Quant aux
élégantes vitrines, elles sont comme de vastes écrins étalant avec
orgueil les figurines de Tanagra, les petits bronzes grecs, les verres
irisés, les ivoires, les esquisses des sculpteurs modernes. Les bronzes
de Barye en occupent une immense, à eux seuls. L’arrangement ne
laisse donc rien à désirer. 11 satisfait les yeux et l’esprit.
Analyser une à une toutes ces richesses serait une entreprise
trop longue; mais il importe de mentionner ce qui doit attirer sur-
tout l’attention du visiteur et se graver dans sa mémoire, comme on