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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 35.1906

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Nr. 5
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Jamot, Paul: Les salons de 1906, 1, La peinture à la Société nationale des Beaux-Arts
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https://doi.org/10.11588/diglit.24817#0398

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372

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

d’hommes naître et mourir et qu’elles sont encore debout, à
peine altérées par le temps. Je félicite vivement M. Ménard d’avoir
cru que la seule beauté des lignes et des mouvements de ce lieu
désert parlerait à notre imagination : la présence d’une figure hu-
maine, si expressive qu’elle eût été, aurait certainement affadi
et affaibli sa pensée. L’homme ne devait être représenté ici que
par les vénérables pierres auxquelles il a confié sa mémoire et
qui l’ont fidèlement gardée pendant plus de deux mille ans. Je
pense que M. Ménard sait depuis longtemps que son intelligence
et son talent le destinaient à la peinture murale, que son aptitude
particulière était de rajeunir le « paysage historique » en l’appli-
quant à la décoration et d’exprimer, dans une langue harmonieuse
et sobre, la beauté en quelque sorte intellectuelle de certains sites.
Ici, pensée, composition, couleur, exécution (cette facture qui, dans le
ciel surtout, rappelle un peu la mosaïque), tout est en accord et en
accord avec la destination de l’œuvre. Ce qu’il y a dans cet art de
volontairement stylisé, de littéraire même, si l’on veut, convient
bien à une décoration qui doit être placée au milieu des livres, dans
une salle où travailleront des philologues, des archéologues, des his-
toriens. Je regrette que M. Ménard n’ait pas eu des occasions plus
fréquentes d’employer ainsi son talent, car je voudrais voir dans
beaucoup de bibliothèques et d’Universités de simples « paysages
historiques » comme ceux-ci, au lieu des laborieuses compositions
qui nous offrent une image théâtrale, et si incertaine, du passé !

Un peintre, à d’autres égards bien différent de M. Ménard,
M. Lepère, sait, lui aussi, conférer au pur paysage sans figures des
vertus éminemment décoratives. Dans une des salles où il a fait un
essai de présentation nouvelle, M. Dubufe a eu la bonne idée de
nous montrer de nouveau les longues frises que M. Lepère avait exé-
cutées pour l’Exposition de Liège. Ici, aucune suggestion de poésie
ni d’histoire. Les motifs sont empruntés aux paysages familiers de
nos côtes et de nos ports de pêche. Tout l’effet décoratif est obtenu
par une simplification de la couleur posée en teintes plates d’une
harmonie un peu fauve, et surtout par un dessin extraordinaire-
ment sûr et personnel, qui donne de la noblesse et du style aux
objets les plus simples : une voile se silhouettant sur une côte loin-
taine, un mât avec ses agrès. Ce même don du style pare aussi quel-
ques-uns des tableaux de chevalet exposés par M. Lepère, surtout
son bois de pins solitaire, d’un si grand caractère décoratif. Mais n’y
regrettera-t-on pas une certaine absence de mouvement et de vie, et
 
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