TROIS PORTRAITS INÉDITS DE M ARIE-ANTOI NETTE 131
du travail de Duplessis, auquel il a préféré pour son propre tissage
un carton médiocre exécuté par son fils d’après Drouais1. On repro-
chait déjà, paraît-il, à la toile de Duplessis, comme aux autres por-
traits de Marie-Antoinette, de manquer de ressemblance; l’artiste
savait, en effet, ses devoirs de peintre de cour, bien qu’il les remplît
sans enthousiasme. On n’eût pas adressé la même critique à son
étude d’après nature, qui demeura ignorée et qu'un historien de la
reine a eu la bonne fortune de retrouver.
L’image de la jeune reine par Duplessis se présente à la postérité
dans des conditions assez curieuses. Nous pouvons l’étudier dans la
préparation, dans la peinture originale, dans le tissage des Gobelins,
et même dans une miniature qui la reproduit encore (collection du
duc de Portland)2. L’original parait remonter à 1774, date de la
tapisserie d’Audran; c’est l’année même où Marie-Antoinette est
devenue reine.
Le peintre fut rappelé à la Cour, au mois de mars de l’année
suivante, pour faire d’elle un autre portrait qui devait être suivi de
celui de Louis NYL Des répétitions de l’un et de l’autre étaient des-
tinées à Vienne, où Marie-Thérèse depuis longtemps désirait posséder
une image satisfaisante de sa hile. L’envoi du portrait de Marie-An-
toinette fut fait au mois de mai, par les soins de Mercy ; il n’a pas
été retrouvé dans les collections impériales3 ; mais rien n’empêche
de croire qu’il devait offrir la même interprétation des traits de la
reine que les images de Duplessis conservées en France. Mercy parle
à plusieurs reprises de ce travail dans ses lettres au baron de Neny,
pour calmer l’impatience de l’impératrice, l'informer qu’ « il n'y a
pas, à Versailles, ni à Paris, un seul portrait de la reine peint à
l’huile par un bon peintre », et lui faire prendre patience jusqu’au
moment où sera fini l'ouvrage du peintre « qui a été choisi et qui
s’appelle Duplessis »4. L’impératrice ne sera cependant pas satisfaite
î. La tapisserie de Cozette, qui appartient aujourd’hui à la Chambre de
Commerce de Bordeaux, est reproduite par M. Tenaille, loc. cit., p. 319, et l’a été
dans la Gazette d’avril 1908, p. 327. Tous les rapprochements qu’exigent ces
études délicates seront facilités, quand aura paru la belle documentation qui
nous est promise par MM. Vuaflart et Henri Bourin.
2. Dans cette miniature, la reine porte un collier de perles à double rang. Tous
ces portraits sont reconnaissables au premier coup d’œil par la disposition très
caractéristique de la coiffure; Marie-Antoinette a pris les coiffures hautes en 1775.
3. Le portrait que Flammermont a identifié avec cet envoi et dont il a donné une
gravure, avec le nom de Duplessis, ne soutient pas un instant cette attribution.
4. Lettre de Mercy du 19 janvier 1773, publiée par Flammermont (Gazette
des Beaux-Arts, 1898, t. I, p. 188).
du travail de Duplessis, auquel il a préféré pour son propre tissage
un carton médiocre exécuté par son fils d’après Drouais1. On repro-
chait déjà, paraît-il, à la toile de Duplessis, comme aux autres por-
traits de Marie-Antoinette, de manquer de ressemblance; l’artiste
savait, en effet, ses devoirs de peintre de cour, bien qu’il les remplît
sans enthousiasme. On n’eût pas adressé la même critique à son
étude d’après nature, qui demeura ignorée et qu'un historien de la
reine a eu la bonne fortune de retrouver.
L’image de la jeune reine par Duplessis se présente à la postérité
dans des conditions assez curieuses. Nous pouvons l’étudier dans la
préparation, dans la peinture originale, dans le tissage des Gobelins,
et même dans une miniature qui la reproduit encore (collection du
duc de Portland)2. L’original parait remonter à 1774, date de la
tapisserie d’Audran; c’est l’année même où Marie-Antoinette est
devenue reine.
Le peintre fut rappelé à la Cour, au mois de mars de l’année
suivante, pour faire d’elle un autre portrait qui devait être suivi de
celui de Louis NYL Des répétitions de l’un et de l’autre étaient des-
tinées à Vienne, où Marie-Thérèse depuis longtemps désirait posséder
une image satisfaisante de sa hile. L’envoi du portrait de Marie-An-
toinette fut fait au mois de mai, par les soins de Mercy ; il n’a pas
été retrouvé dans les collections impériales3 ; mais rien n’empêche
de croire qu’il devait offrir la même interprétation des traits de la
reine que les images de Duplessis conservées en France. Mercy parle
à plusieurs reprises de ce travail dans ses lettres au baron de Neny,
pour calmer l’impatience de l’impératrice, l'informer qu’ « il n'y a
pas, à Versailles, ni à Paris, un seul portrait de la reine peint à
l’huile par un bon peintre », et lui faire prendre patience jusqu’au
moment où sera fini l'ouvrage du peintre « qui a été choisi et qui
s’appelle Duplessis »4. L’impératrice ne sera cependant pas satisfaite
î. La tapisserie de Cozette, qui appartient aujourd’hui à la Chambre de
Commerce de Bordeaux, est reproduite par M. Tenaille, loc. cit., p. 319, et l’a été
dans la Gazette d’avril 1908, p. 327. Tous les rapprochements qu’exigent ces
études délicates seront facilités, quand aura paru la belle documentation qui
nous est promise par MM. Vuaflart et Henri Bourin.
2. Dans cette miniature, la reine porte un collier de perles à double rang. Tous
ces portraits sont reconnaissables au premier coup d’œil par la disposition très
caractéristique de la coiffure; Marie-Antoinette a pris les coiffures hautes en 1775.
3. Le portrait que Flammermont a identifié avec cet envoi et dont il a donné une
gravure, avec le nom de Duplessis, ne soutient pas un instant cette attribution.
4. Lettre de Mercy du 19 janvier 1773, publiée par Flammermont (Gazette
des Beaux-Arts, 1898, t. I, p. 188).