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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
milieu du xive siècle 1 : il était toujours à genoux sur les fresques et
les retables toscans, depuis que Giotto avait peint Y Annonciation
de l’Arena et que Simone Martini avait signé, avec son frère, le
radieux tableau du musée des Offices. La Vierge elle-même, au
moment où elle reçoit le message céleste, est à genoux et en prières,
dans la chapelle de l’Arena, comme elle le sera un siècle ou deux
plus tard dans les Mystères et dans les livres d’Heures français2.
Elle est à genoux aussi devant l’Enfant dans la scène de la Nativité,
telle que la représentent au xv° siècle les miniaturistes franco-
llamands et les peintres flamands. Sur des miniatures ou des pan-
neaux peints en France et en Flandre aux environs de l’an 1400,
elle a pris l'Enfant pour le caresser ou lui donner le sein, mais elle
reste couchée, comme elle l’était dans l’art solennel du xmc siècle,
au pied de l’autel qui portait le Rédempteur au maillot3 4.
La composition nouvelle, — la Vierge à genoux et l’Enfant cou-
ché nu, tous deux devant la crèche et sur le sol dur, — cette com-
position est fixée à peu près en même temps pour l’Italie et pour la
France ou la Flandre, telle que la répéteront les maîtres du
xv° siècle, Roger van der Weyden ou Filippo Lippi. La Nativité
que dom Lorenzo Monaco a peinte vers 1410 (collection Kauffmann,
à Berlin), et qu’il a reproduite vers 1420 (Florence, chapelle Barto-
lini, à Santa Trinità) se place, dans l'histoire du motif, entre deux
miniatures franco-flamandes qui font partie de deux livres d’Heu-
res enluminés tous deux pour le duc de Berry, l’un avant 1404,
l’autre avant 1416 \ M. Osvald Sirén, l’historien de dom Lorenzo
Monaco, qui avait connu, par la Gazette des Beaux-Arts, la thèse
soutenue par M. Mâle au sujet des Mystères, s’est demandé si la
mise en scène de la Nativité qui a été adoptée par le camaldule
n’aurait pas été empruntée par celui-ci à quelque miniature du Nord
directement inspirée du théâtre. Mais lui-même a cité deux représen-
tations de la Vierge à genoux devant le nouveau-né, qui sont des
peintures florentines antérieures de plus d’un demi-siècle à Lorenzo
Monaco et aux miniaturistes du duc de Berry : l'une d’elles fait partie
d’un polyptyque qui sé trouve à Vienne, dans la galerie Czernin, et
1. P. 24; Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. I, p. 220.
2. P. 18; Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. I, p. 104.
3. P. 4-6; Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. I, p. 90-92.
4. « Très belles Heures de Bruxelles » ; « Très riches Heures de Chantillij »
(Osvald Sirén, Dom Lorenzo Monaco, Strasbourg, Heitz, 1905, p. 133-136, pl. xv
et xlviti).
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
milieu du xive siècle 1 : il était toujours à genoux sur les fresques et
les retables toscans, depuis que Giotto avait peint Y Annonciation
de l’Arena et que Simone Martini avait signé, avec son frère, le
radieux tableau du musée des Offices. La Vierge elle-même, au
moment où elle reçoit le message céleste, est à genoux et en prières,
dans la chapelle de l’Arena, comme elle le sera un siècle ou deux
plus tard dans les Mystères et dans les livres d’Heures français2.
Elle est à genoux aussi devant l’Enfant dans la scène de la Nativité,
telle que la représentent au xv° siècle les miniaturistes franco-
llamands et les peintres flamands. Sur des miniatures ou des pan-
neaux peints en France et en Flandre aux environs de l’an 1400,
elle a pris l'Enfant pour le caresser ou lui donner le sein, mais elle
reste couchée, comme elle l’était dans l’art solennel du xmc siècle,
au pied de l’autel qui portait le Rédempteur au maillot3 4.
La composition nouvelle, — la Vierge à genoux et l’Enfant cou-
ché nu, tous deux devant la crèche et sur le sol dur, — cette com-
position est fixée à peu près en même temps pour l’Italie et pour la
France ou la Flandre, telle que la répéteront les maîtres du
xv° siècle, Roger van der Weyden ou Filippo Lippi. La Nativité
que dom Lorenzo Monaco a peinte vers 1410 (collection Kauffmann,
à Berlin), et qu’il a reproduite vers 1420 (Florence, chapelle Barto-
lini, à Santa Trinità) se place, dans l'histoire du motif, entre deux
miniatures franco-flamandes qui font partie de deux livres d’Heu-
res enluminés tous deux pour le duc de Berry, l’un avant 1404,
l’autre avant 1416 \ M. Osvald Sirén, l’historien de dom Lorenzo
Monaco, qui avait connu, par la Gazette des Beaux-Arts, la thèse
soutenue par M. Mâle au sujet des Mystères, s’est demandé si la
mise en scène de la Nativité qui a été adoptée par le camaldule
n’aurait pas été empruntée par celui-ci à quelque miniature du Nord
directement inspirée du théâtre. Mais lui-même a cité deux représen-
tations de la Vierge à genoux devant le nouveau-né, qui sont des
peintures florentines antérieures de plus d’un demi-siècle à Lorenzo
Monaco et aux miniaturistes du duc de Berry : l'une d’elles fait partie
d’un polyptyque qui sé trouve à Vienne, dans la galerie Czernin, et
1. P. 24; Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. I, p. 220.
2. P. 18; Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. I, p. 104.
3. P. 4-6; Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. I, p. 90-92.
4. « Très belles Heures de Bruxelles » ; « Très riches Heures de Chantillij »
(Osvald Sirén, Dom Lorenzo Monaco, Strasbourg, Heitz, 1905, p. 133-136, pl. xv
et xlviti).