GAZETTE DES BEAUX-ARTS
460
ment de tous. Ecueil facile que céder à la tentation de peindre un
tableau de musée! Quelques-uns l'ont côtoyé, peu l’ont très nette-
ment évité. Voici, cependant, une petite toile charmante dans l’ovale
qui la cerne, un paysage dont le fond est éclairé de nuages lumi-
neux, de grands arbres massés au bord d’un étang calme où de
rares nymphéas mettent une note rouge, et quatre femmes se rhabil-
lant après le bain qui fît ruisseler l’eau sur leurs membres jeunes.
L’une, entièrement nue, debout, lisse ses cheveux sombres; deux
autres, assises et mi-vêtucs, laissent admirer leur beauté blonde et
rousse; la dernière, accroupie, fait deviner un coin de son épaule
sous le peignoir de soie. Dans cette mélodie de couleurs, les tons se
répondent les uns aux autres comme les vibrations sonores dans
un poème musical. Le noir des cheveux communie avec le noir
d’une écharpe; au pourpre des nénuphars répond la tache d’un
ruban, d’une coiffure ou d’un vêtement. Et c’est un hommage ému
et nouveau adressé par Mlle Delasalle à l’éternelle beauté des formes
féminines dont tant d’autres peintres ici ne surent voir que la
vulgarité épisodique ou l’attirance momentanée.
Hommage encore, et tout vibrant de force concentrée, que
l’admirable toile où M. Carrera situe, devant l’étendue marine
intensément bleue, sur le sable d’une plage que vient assombrir
un nuage qui passe et fuit sous le vent, trois baigneuses dont les
formes sculpturales disent la santé robuste et florissante. L’ombre
qui s’éloigne laisse en plein soleil le torse de l’une d’elles, et le
peintre, séduit par les reflets de la mer et du ciel sur ces statues
vivantes, s’est plu à peindre, avec une audace heureuse, les jeux de
lumière les plus imprévus que son émotion de grand et sincère
coloriste lui permit de voir et de noter.
M. Léon Eélix montre, dans la splendeur de sa nudité jeune, une
Fille d'Eve debout, à l’ombre d’un arbre, un jour à plein de soleil;
ce tableau, comme celui où une jeune femme, dans une attitude
pleine de souplesse et d’aisance, est assise sur l’herbe, au bord du
Miroir d'eau où elle va se plonger, compte au premier rang des
nus de ce Salon. De même aussi, le panneau décoratif intitulé
Automne où deux femmes et un garçonnet se tiennent auprès de
corbeilles de fruits, et la Vendange de M. Loys Prat, symbolisée par
une bacchante à califourchon sur un bouc qu’accompagne le Silène
des vieux récits.
Si l’on ajoute à ces œuvres Au pays du soleil de M. Roberty, la
courtisane à demi étendue Après le bain, peinte voluptueusement
460
ment de tous. Ecueil facile que céder à la tentation de peindre un
tableau de musée! Quelques-uns l'ont côtoyé, peu l’ont très nette-
ment évité. Voici, cependant, une petite toile charmante dans l’ovale
qui la cerne, un paysage dont le fond est éclairé de nuages lumi-
neux, de grands arbres massés au bord d’un étang calme où de
rares nymphéas mettent une note rouge, et quatre femmes se rhabil-
lant après le bain qui fît ruisseler l’eau sur leurs membres jeunes.
L’une, entièrement nue, debout, lisse ses cheveux sombres; deux
autres, assises et mi-vêtucs, laissent admirer leur beauté blonde et
rousse; la dernière, accroupie, fait deviner un coin de son épaule
sous le peignoir de soie. Dans cette mélodie de couleurs, les tons se
répondent les uns aux autres comme les vibrations sonores dans
un poème musical. Le noir des cheveux communie avec le noir
d’une écharpe; au pourpre des nénuphars répond la tache d’un
ruban, d’une coiffure ou d’un vêtement. Et c’est un hommage ému
et nouveau adressé par Mlle Delasalle à l’éternelle beauté des formes
féminines dont tant d’autres peintres ici ne surent voir que la
vulgarité épisodique ou l’attirance momentanée.
Hommage encore, et tout vibrant de force concentrée, que
l’admirable toile où M. Carrera situe, devant l’étendue marine
intensément bleue, sur le sable d’une plage que vient assombrir
un nuage qui passe et fuit sous le vent, trois baigneuses dont les
formes sculpturales disent la santé robuste et florissante. L’ombre
qui s’éloigne laisse en plein soleil le torse de l’une d’elles, et le
peintre, séduit par les reflets de la mer et du ciel sur ces statues
vivantes, s’est plu à peindre, avec une audace heureuse, les jeux de
lumière les plus imprévus que son émotion de grand et sincère
coloriste lui permit de voir et de noter.
M. Léon Eélix montre, dans la splendeur de sa nudité jeune, une
Fille d'Eve debout, à l’ombre d’un arbre, un jour à plein de soleil;
ce tableau, comme celui où une jeune femme, dans une attitude
pleine de souplesse et d’aisance, est assise sur l’herbe, au bord du
Miroir d'eau où elle va se plonger, compte au premier rang des
nus de ce Salon. De même aussi, le panneau décoratif intitulé
Automne où deux femmes et un garçonnet se tiennent auprès de
corbeilles de fruits, et la Vendange de M. Loys Prat, symbolisée par
une bacchante à califourchon sur un bouc qu’accompagne le Silène
des vieux récits.
Si l’on ajoute à ces œuvres Au pays du soleil de M. Roberty, la
courtisane à demi étendue Après le bain, peinte voluptueusement