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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 13.1917

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Nr. 1
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Diehl, Charles: Émile Bertaux
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https://doi.org/10.11588/diglit.24915#0020

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ÉMILE BERTAUX

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mais où les idées essentielles disparaissaient comme noyées sous la
poussière des menus détails. Bertaux passait, il analysait le livre,
et vraiment il le révélait aux lecteurs; et peut-être l’auteur lui-même
retrouvait-il avec quelque étonnement, si bien ordonnées, si limpides,
les choses qu’il avait entrevues sans parvenir à les faire pleinement
sortir du brouillard flottant où elles s’estompaient.

*

❖ ❖

Professeur à la Sorbonne, conservateur du Musée Jacquemart-
André, rédacteur en chef de la Gazette des Beaux-Arts, universelle-
ment estimé pour son réel et grand talent, il semblait que Bertaux
n’eùt rien à demander de plus à la fortune. On attendait avec
impatience le second volume de son Histoire de l’art dans l’Italie
méridionale, la suite de ses belles études sur l’Espagne; il avait
accepté la tâche d’achever Y Histoire de l’art pendant la Renaissance
qu’avait laissée interrompue la mort d’Eugène Müntz. Tout semblait
lui sourire, et ceux qui le connaissaient, qui appréciaient son amitié
loyale et sûre, son empressement à obliger, le dévouement tendre
dont il entourait ceux qui lui étaient chers; tous ceux, enfin, qui
estimaient en lui un caractère égal à son talent, se réjouissaient
qu’après les années, parfois un peu difficiles, de sa jeunesse la des-
tinée semblât lui promettre les plus belles espérances. C’est alors
que la guerre survint.

Mobilisé comme officier interprète, Bertaux, pendant quinze mois,
servit à l’état-major de la 64e division d’infanterie; il fut à la défense
du Grand Couronné de Nancy et à la bataille de Champagne, et il y
gagna les trois galons de capitaine. A la fin de 1915, il était attaché
à la Direction de l’Aéronautique, au service des renseignements.
Fréquemment chargé de traduire des documents techniques, il
voulut, avec son habituelle conscience, s’initier à tous les détails
qui lui permettraient de remplir plus utilement sa tâche. Et, malgré
les avertissements qui lui furent donnés, il n’hésita pas — à un
âge où déjà le cœur n’a plus toute sa souplesse et toute sa résis-
tance —- à monter en avion pour en mieux connaître le mécanisme
et les ressources. Il fut, au courant de l’année 1916, plusieurs fois
chargé de missions sur le front français et le front italien, et ce fut
une de ses dernières joies que ce retour vers cette Italie aimée. Un
des derniers billets que j’ai reçus de lui venait de Pieve di Cadore :
« De la patrie de Giovanni da Udine — écrivait-il — en passant par
Gorizia, le Carso, et par les airs (en Caproni), me voici dans la ville
 
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