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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 1.1920

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Nr. 2
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Durrieu, Paul: Les van Eyck et le duc Jean de Berry
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https://doi.org/10.11588/diglit.24918#0116
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02

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Seigneur et l’autre du Jugement ». El l’on a d’autant plus de raisons de croire
que, dans cette mention, il s’agit du double volet qui est arrivé à l’Ermitage
que, comme me l’a fait remarquer mon savant confrère M. Emile Mâle, dont
je suis heureux d’invoquer la haute compétence en matière d’iconographie,
la réunion, dans un même ensemble de peinture, de ces deux sujets : la mort
du Christ au Calvaire, scène capitale de sa Passion, et le Jugement dernier,
est un cas tout à fait exceptionnel.

Ajoutons qu’à la date de i4i6 le «tableau en deux pièces» mentionné
dans l’inventaire après décès du duc de Berry avait déjà commencé à courir
le monde. Il ne se trouvait plus dans la succession du duc Jean et l’on disait
qu’il avait été donné à une chapelle de Bourges. Qu’il ait ensuite passé en
Espagne, la chose n’aurait rien qui doive étonner car nous savons, par les
documents contemporains, que plusieurs beaux objets d’art des collections
du duc de Berry ont, dès le xv° siècle, pris également le chemin de l’Espagne.

Ainsi il est, je ne dis pas absolument certain, —car je tiens à ne pas me
départir des règles de la prudence, — mais tout à fait vraisemblable que l’admi-
rable double volet de l’Ermitage, du aux van Eyck, a fait partie entre 1413
et 1416 des collections du duc Jean de Berry.

Ceci est d’un extrême intérêt pour la biographie des immortels artistes.
Depuis pas mal de temps déjà, on a commencé à soupçonner qu’un certain
lien pouvait avoir existé entre les van Eyck et l'amateur passionné des belles
choses que fut le duc Jean de Berry. En 1910 M. Salomon Reinach, parlant
dans un article de la Revue archéologique1 d’Hubert van Eyck et du duc de
Berry, ne craignait pas de faire suivre le nom du second de ce qualificatif :
« le duc de Berry, sans doute un des patrons d’Hubert». Bien des considé-
rations historiques ou artistiques pourraient être mises en jeu à ce propos.
Ici je me bornerai à revenir sur ces miniatures des Heures de Tarin dont j’ai
parlé plus haut, montrant en quelles intimes relations elles étaient avec le
double volet de l’Ermitage. Ces miniatures ont été peintes pour le comte de
Hainaut et de Hollande, Guillaume IV de Bavière. Or celui-ci était un neveu
par alliance du duc de Berry, et un neveu à qui le duc Jean était assez atta-
ché pour lui avoir fait cadeau d’un hôtel à Paris. Travaillant pour le neveu,
le comte Guillaume IV, pourquoi les van Eyck ne seraient-ils pas remontés

gens du xxe siècle, ces dimensions peuvent paraître médiocres. Mais j’ai montré au con-
traire, dans ma communication à l’Académie des Inscriptions, avec force preuves à l’appui,
.que, pour un rédacteur français d’inventaire de collections princières, écrivant en 141G,
sous le règne de Charles VI, ces dimensions constituaient un format sortant de la moyenne
habituelle et qui justifiait l’emploi, sous sa plume, de la qualification de « grans tableaux »,
dont il s’est servi.

1. Année 19m, tome II, p. 373.
 
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