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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 6.1922

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Nr. 1
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Soulier, Gustave: Les portraits de Christophe Colomb: (à propos de données nouvelles)
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https://doi.org/10.11588/diglit.24937#0099
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GA.ZETTE DES BEAUX-ARTS

et après lui et plus constamment encore, Tintoretjusqu’à la fin de sa carrière.

Or, ce sentiment puissant de volume, réalisé à la manière de Titien, nous
le trouvons dans le Portrait de Christophe Colomb, que nous pouvons rap-
procher du Portrait du doge Niccolo Marcello (Vatican), — dans lequel le
peintre a pu se souvenir du Portrait du doge Lorédan par son vieux maître
Giovanni Bellini, — et de l’Homme au gant du Louvre, peint un peu plus
tard. Nous pouvons encore le rapprocher de deux autres œuvres de jeunesse,
de la figure de l’Apôtre dans L’Enfant Jésus entre saint André et sainte Cathe-
rine (église S. Marcuola, Venise) et des diverses têtes dans le Saint Marc
triomphant (S. Maria délia Salute), qui indique peut-être chez le maître le
point culminant dans celte phase de recherche du modelé sobre et fort. De
telles confrontations permettent de reconnaître la main qui a tracé le portrait
de Colomb.

Il y a cependant une différence entre ce portrait et les figures que nous
lui avons comparées, — à l’exception du Portrait du doge Marcello, qui est
un portrait posthume. Ce n’est pas là une œuvre spontanée, exécutée d’après
le modèle vivant. Colomb est mort à Séville en i5o6, et depuis i5o4, au
retour de son quatrième voyage, il était resté en Espagne. On ne peut songer,
antérieurement à cette date, à un portrait peint par Titien, et surtout dans
ce caractère, car Titien ne débute guère qu’en i5o8, avec les fresques du Fon-
daco dei Tedeschi (l’Entrepôt des Allemands), partagées avec Giorgione.
D'ailleurs la gloire du navigateur ne se forme que plusieurs années après
sa mort, et les portraits qu’on peut avoir de lui, surtout lorsqu’il s’agit de
portraits posthumes, ont eu évidemment pour but de le glorifier.

Les autres œuvres de Titien que nous avons rapprochées de ce portrait
nous permettent de le dater approximativement. Il a été exécuté à partir de
i5o8, avant ou après les fresques de Padoue, qui sont de 1511, et bien pro-
bablement avant le grand tableau de Y Assomption, peint en 1517, qui marque
chez le maître des préoccupations nouvelles de mouvement, de souplesse de
pinceau et de modelés plus nuancés.

Titien nous présente un Colomb dans toute la force de l’âge, qu’il n’aurait,
du reste, jamais pu connaître. Le visage grave, non sans une expression de
tristesse, sensible parles yeux enfoncés, les coins de la bouche qui s’affais-
sent, est encadré de cheveux sombres qui découvrent le front et retombent
en boucles demi-longues. Le personnage est vêtu d’un justaucorps de velours
rouge foncé à passementerie d’or, sur lequel tranche un étroit col blanc
rabattu, et que vient recouvrir une cape jetée sur les épaules.

Le peintre a donc dû travailler d’après des documents, probablement
d'après quelque dessin rapporté d’Espagne, en profitant sans doute aussi des
indications de compatriotes qui avaient connu Colomb. De ce nombre pour-
 
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