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Le Grelot: journal illustré, politique et satirique — 2.1872

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https://doi.org/10.11588/diglit.3250#0158
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... r. , . ..

LE GRELOT

VA '»

APRÈS LA NOCE

Ran, plan, plan !

Dzing ! dzing !

Boum ! boum ! .

Qu'est-ce que c'est que tout ce bruit/

Ce bruit, mesdames et messieurs, c est Sa
Majesté l'empereur de toutes les Russies, re-
tour de Berlin, qui rentre dans son palais de
Saint-Pétersbourg.

La voiture impériale s'arrête devant le pé-
ristyle.

L'empereur Alexandre en descend.

Alexandre paraît d'une gaieté médiocre.

A peine arrivé dans son cabinet, il se jette
sur un divan.

ALEXANDRE.

Ouf!... ça n'est pas malheureux... Me voilà
débarrassé d'une rude corvée!... Embrasser
toute la journée ce vieux farceur de Guil-
laume... respirer la fumée de leurs infects
lampions et la poussière de leurs champs de
manœuvres... ah! sapristi, c'est ça qui n'est
pas drôle... Enfin, me voilà seul et me voilà
chez moi, comme on dit dans les Noces de Jean-
nette... un joli ouvrage de ces pauvres diables
de Français... Soufflons un peu... Gortscha-
koffl... Gortschakoff!...

[Entre le grand chancelier.)

ALEXANDRE.

Gortschakoff!

GORTSCHAKOFF.

Majesté?

ALEXANDRE.

Est-ce que tu t'es amusé là-bas, toi?

GORTSCHAKOFF.

Votre Majesté désire-t-elle que je lui parle
franchement ï

ALEXANDRE.

Tiens, parbleu !

GORTSCHAKOFF.

Eh bien, j'avouerai à Votre Majesté que je
me suis rasé, mais rasé!...

ALEXANDRE.

Dans mon genre, alors.

GORTSCHAKOFF.

A peu près.

ALEXANDRE.

Ah! c'est particulier... A propos, mon cher
chancelier, voulez-vous me faire l'amitié de
me dire l'heure qu'il est?... Je ne sais pas
comment cela s'est fait, mais je n'ai plus ma
montre.

GORTSCHAKOFF.
Avec bonheur, Sire. (Il met sa main à son
gousset.) Ah! mais... ah! mais...

ALEXANDRE.

Eh bien?

GORTSCHAKOFF.

Voilà qui est bizarre !

ALEXANDRE.

Tu n'as plus la tienne non plus?

GORTSCHAKOFF.

Non, sire.

' ALEXANDRE.

Il faisait si chaud à Berlin!... Elles se seront
fondues... toutes les deux.

GORTSCHAKOFF.

Il est croyable.

ALEXANDRE.

C'est très-comique. Je t'en donnerai une
autre... à remontoir.

GORTSCHAKOFF.

Sire, vous me comblez.

ALEXANDRE.

Que penses-tu de mon oncle, Gortschakoff,
mon ami ?

GORTSCHAKOFF.

Pas grand chose de bon, sire., sauf le res-
pect que je vous dois.

ALEXANDRE.

N'est-ce pas?

GORTSCHAKOFF.

Il crève d'orgueil dans sa vieille •peau et s'i-
magine, parce que nous avons bien voulu man-
ger de sa choucroute mal cuite, que nous go-
bons toutes ses finesses.

ALEXANDRE.
Tu'sais, mon cher ami, que lorsque je l'em-
brassais à bouche que veux-tu, je n'en pensais
pas un traître mot.

GORTSCHAKOFF.

Je m'en doute.

ALEXANDRE.

Le vieux renard voudrait bien me pincer
mes petites provinces baltiques qui lui don-
nent dans l'œil; mais nous veillons au grain,
hein!

GORTSCHAKOFF.

Encore un an ou deux, et tout notre arme-
ment sera prêt.

ALEXANDRE.

GORTSCHAKOFF.
sire. Alors...

ALEXANDRE.

GORTSCHAKOFF.

Vrai?

Parole,

Chut!

Chut!

ALEXANDRE, très-kaut.

Ce cher Guillaume!... Quel excellent on-
cle!... quel bon voisin!...

gortschakoff, plus haut encore.
Jamais!... non, jamais on ne parviendra à
séparer sa cause de la nôtre!...

Alexandre, à demi-voix.
Là... ça fait que s'il y a dans mon armoire
quelque espion de Bismark...

gortschakoff, de même.
Enfoncé !

ALEXANDRE.

Ah ! dites-moi, mon cher chancelier, en vous
en allant, priez, donc l'horloger de la cour de
m'apporter un joli choix de montres assorties.
gortschakoff.

J'y vole, sire.

Ran, plan, plan !

Dzing! dzing!

Boum ! boum !

Mesdames et messieurs, ceci vous représente
l'empereur d'Autriche rentrant dans sa bonne
ville de Vienne, retour de Berlin.

Il est d'une humeur de dogue.

Arrivé dans son cabinet de toilette, Fran-
çois, furieux, s'écrie d'une voix tonnante :

— Ah ! ce Guillaume, s'il était là I...

11 fait le geste d'allonger un coup de pied
formidable.

La porte s'ouvre... c'est le comte Ândrassy
qui le reçoit.

FRANÇOIS.

Mon cher comte, je vous demande un mil-
lion de pardons... ce n'était pas à vous qu'il
était destiné.

ANDRASSY.

N'importe, sire... venant de vous, je l'ac-
cepte avec reconnaissance.

FRANÇOIS.

Toujours aimable, ce cher Andrassy... As-
seyez-vous donc un peu que nous causions.
andrassy, se tenant la fesse droite.

M'asseoir, sire?... hum!.,, en ce moment...
ça me serait peut-être un peu difficile...

FRANÇOIS.

Ah! c'est juste... j'oubliais... ce pauvre
ami!... je m'assoierai donc seul.

ANDRASST.

Je préfère cela, sire; je ne vous le cache
pas,

FRANÇOIS.

Eh bien, mon cher, que pensez-vous de ce
vieux pitre?... Nous l'a-t-il assez faite à l'o-
seille, avec son empire d'Allemagne?
andrassy, cherchant à comprendre.

Faite à l'ose Me?... Ah! oui... bon!., .j'y suis...
Depuis que le diable d'Offenbach fait jouer ses
ouvrages à Vienne, la langue a un peu changé,..
Vous excuserez, sire, un pauvre Hongrois?

FRANÇOIS.

Asseyez-vous donc, mon cher.

ANDRASSY.

Sire...

FRANÇOIS.

Mille excuses... j'oubliais... Savez-vousbien
qu'il se fiche de nous ?

ANDRASSY.

J'en ai peur,

FRANÇOIS.

Après l'abominable raclée que nous en avons
reçue il y a six ans, venir me faire des sima-
grées pareilles!... Ah! ça, est-ce qu'il s'ima-
gine que nous autres, vrai.» empereurs, nous
le prenons au sérieux?

ANDRASSY.

11 se plaît à le croire, sire.

FRANÇOIS.

Eh bien, il se met fièrement le doigt dans
l'œil!

andrassy, cherchant encore à comprendre.

Le Doiat dans l'œill... Ah! oui... bon!,., j'y
suis!... Encore la langue d'Offenbach!

FRANÇOIS.

Toujours, mon ami, toujours. Pour moi, je
vous déclare que je ne suis pas sa dupe et que
je n'ai pas de plus cher désir que lui rendre
sa pile.

ANDRASSY.

Et moi, donc?

rRANÇOIS.

Notre armée se forme-t-elle?

ANDRASSY.

Admirablement.

FRANÇOIS.

Nos arsenaux ?

■ ANDRASSY.''

Se remplissent tous les jours.

FRANÇOIS.

De sorte que dans un an ou deux?...

ANDRASSY.

Je crois que nous pourrons y aller.

FRANÇOIS.

Bravo!... dans mes bras, Andrassy, dans
mes bras!

ANDRASSY.

Sire, tant d'honneur!...

FRANÇOIS.

Bah!... je te dois bien ce, petit dédomma-
gement. {Très-haut.) Ce bon! cet excellent
Guillaume!... Plutôt que de tirer désormais
l'épée contre lui, j'aimerais mieux ne plus ja-
mais entendre une première d'Offenbach!
andrassy, criant comme un sourd.

Vive notre père, l'empereur Guillaume!...
le plus brave homme que la terre ait porté.
(A demi-voix.) Ça fait que si Bismark a
logé quelque espion dans votre cabinet... de
toilette, sire...

FRANÇOIS.

Il peut se fouiller.

andrassy.
Toujours la langue d'Offenbach !

FRANÇOIS.

Toujours.

Ran, plan, plan !

Dzing ! dzing!

Bouml boum !

Mesdames est messieurs, nous sommes dans
la chambre à coucher de cet excellent Guil-
laume. Il se dispose à se mettre au lit, où l'at-
tend déjà celte chère Augusta.

Guillaume , étant ses bottes.
Ah ! ils m'embêtent à la fin, avec leurs pé-
tarades !... J'en, ai la tête fendue, moi. Dieu
de Dieu ! m'en a-t-il fallu de la patience pour
faire bonne mine à ces faces de carême ! Mais,
jj grâce à la protection divine, qui du reste ne
I m'a jamais abandonné, je crois que je les ai
S joliment fourrés dedans !
augùsta.
Allons , mon bijou chéri, allons... viens te
I coucher.

GUILLAUME.
^ Je ne peux pas trouver mes pantoufles...
| Ah! les voilà! Sapristi I je crois qu'ils y sont

! tout de même!... Augustaî
AUGUSTA.
Mon bijou?
GUILLAUME.

Krupp vient de m'inventer un nouveau ca-
1 non qui porte à cinquante-sept lieues. Il sera
i fondu dans un an ou deux, et alors...

AUGUSTA.
! Alors?

GUILLAUME.

Ji1 .a te dis que ça... Bonsoir, bobonne.

AUGUSTA.

Bonsoir, trésor.

Nicolas Flammèche.

Les rêves de M. Gontaut-Biron

(La scène représente la chambre à coucher de l'am-
bassadeur de France a Berlin. Les persiennes sont
fermées, les rideaux tirés ; il fait nuit. Dans le lit
à colonnes enfoncé dans l'obscurité de l'alcôve, ap-
paraît, dépassant légèrement les draps, ot jetant
dans l'air le ronronnement d'une harmonie vague,
le nez de M. Gontaut-Birou, notre représentant sur
la terre d'exil de nos pendules. Plusieurs fois M. Gon-
taut-Biron agite confusément les bras au-dessus do
sa tête comme s'il voulait chasser des mouches ima-
ginaires, et en s'interrompant à plusieurs reprises,
il murmure à mi-voix les paroles suivantes par les-
quelles il répond sans doute à un adversaire qu'il
aperçoit dans son rêve.)

Parfaitement!... C'était dans les règles !
Rien de plus naturel, Et tout autre à ma
place... Ça, j'en ferais le pari ! Quoi ! qu'est-
ce qu'on vient me reprocher?... Eh bien, oui!
j'ai fait illuminer l'hôtel... Qu'est-ce que vous
trouvez à redire à ça ?... Est-ce que nous étions I
le A Septembre?... Non, n'est-ce pas?.,. Eh I
bien, alors?... Ah! si c'avait été sous la Répu-
blique, on pourrait me dire : De quoi vous ]
êtes-vous mêlé?.,. Mais la République n'avait '
rien à l'aire là dedans ! Si j'ai fait allumer les
lampions, c'est pour les trois empereurs, nal
11 fallait bien faire quelque chose pour eux!... '■
Comment dites-vous ça?... Répétez-donc, pour '
voir!... Ah ! oui, oui, le patriotisme!... At- j
tendez donc : patriotisme, patriotes!... Mais -,
tcul ça sent la Révolution!... Qu'est-ce que >
vous rue chantez donc, vous, avec votre pa-

triotisme?... A-t-on jamais vu ça?. . C'est à
crever de rire!... Certainement, que Guil-
laume était là!... Et pourquoi donc n'aurait-
U pas été là, cet homme?... Est-ce qu'il n'est
pas chez lui, à Berlin?... Là, à présent, parce
que Bismark a montré en riant l'ambassade
française !... Vous interprétez tout en mal i
Quoi! vous pensez que c'est de nos verres'dé
couleur et de nos lanternes vénitiennes qu'il
a ri!... Pas du tout!... D'abord, rien ni le
prouve, et quand même?... Est-ce que Bis-
mark n'a pas le droit de rire, maintenant?
Quoi !... U y a deux ans, à cette époque-ci ï"
Eh bien, oui, ils étaient en marche sur Paris!
Qu'est-ce que ça prouve?... Parce que vous avez
mangé des rats ?... La belle affaire !... Ne dirait-
on pas que vous ne les avez pas digérés !... Al-
lons, voyons !... Est-ce qu'on peut toujours res-
ter comme chat et chien ?... Ah ! c'est vrai I le
bombardement a tué bien du monde !... Mais
qu'est-ce que vous voulez?.. c'était la guerre !
Chàteauduu brûlé?... Dame, il ne voulaient
pas se rendre, ces gens !... Est-ce que les Prus-
siens devaient mourir de vieillesse devant
Châteaudun?.., Voyons, répondez, si vousêtes
raisonnable?... Nous n'avons jamais fait ça?...
c'est possible !... çan'est pas dans notre carac-
tère ! Mais au fond, vous pouvez en être certain
ce sont de charmantes gens, bien aimables!..'
Le roi, la reine, les princes, les princesses, M
de Bismarck lui-même!... Il me disait derniè-
rement, en me montrant cette pendule qui est
là sur la cheminée : « Tiens I tiens ! tiens ! une
pendule française! vous avez dû l'acheter à
Berlin!... j'en ai chez moi une toute pareille
que j'ai trouvé par hasard à Versailles!... Mes
compliments ï... Ça ne se dérange pas d'une
minute par semaine! Ah! on fait supérieure-
ment l'horlogerie en France!... .. Peut-on
avoir plus de grâce et de bonhomie, je vous le
demande! Il rend justice à notre industrie, il
vante nos produits!... El pour la monnaie
française, c'est la même chose ! Combien di-
tes-vous?.., Ah! vraiment, quarante-huit
mille!... Comment, cette guerre n'a fait que
quarante-huit mille invalides en France! Vous
m'étonnez... je croyais qu'il y en avait davan-
tage... Mais ce n'est pas une raison pour ne
pas illuminer quand c'est fête à Berlin !... Vous
me direz ce que vous voudrez, voyez-vous,
ici, quand il y a des réjouissances publiques,
on aime bien y voir clair!... Et puis, voulez-
vous que je vous dise : Eh bien! si on n'avait
pas illuminé à l'ambassade.française en l'hon-
neur des trois empereurs, ça aurait fait un
drôle d'effet!... on n'aurait pas su ce que ça
voulait dire!... On aurait fait des commentai-
res ! On aurait peut-être dit : Tiens, mais la
France boude, la France nous garde ran-
cune !... Tandis que comme ça, au contraire !
Allons, quoi!... Est-ce que vous croyez que je
ne sais pas tout ça comme vous!... Eh! mon
Dieu! oui, c'est triste, mais il le faut!... Et
puis, ça s'oublie si vite!... Des remords?.,.
. Moi, des remords! Oh! la, la!... Demandez-
donc à mon honorable prédécesseur, M. Be-
nedetti, s'il en a, des remords, lui; il vous
répondra tout de suite d'un ton gracieux :
«Dites-donc, vous !... Voulez-vous savoir comment
j je mappelle?... » Et puis, si vous saviez!...
| L'ambassade serait si triste, si on ne cherchait
pas quelques distractions!...Eton nepeutpas
\ demander à un ambassadeur de vivre comme
j un loup, n'est-ce pas?... On a beaucoup ri,
'. beaucoup bu, beaucoup dansé, tous ces der-
j niers temps à Berlin ; je ne pouvais pas res-
i ter comme un cénobite dans mon ermitage.
! Les trois empereurs ont amené avec eux les
i Jeux et les Ris!... Si je n'avais pas illuminé
! l'hôtel, on aurait pensé : «L'ambassadeur de
i France ne veut pas ribotter avec nous... C'est
j un élégiaque; il pleure les cent mille Français
I que nous avons tués il y à deux ans... » Je ne
I pouvais pas laisser dire de moi des choses
i pareilles, hein, là, en conscience?

Job.

LETTRES

D'UN .HOMME DE RIEN

A QUELQUES PERSONNES DE QUALITÉ

IX

LA POESIE.

,A M. A. S. £...

Membre de sociétés artistiques, organiste, lacteur
d'orgues, professeur de piano, de chant et d'harmo-
nie, ete., à Saint-Amafid (Cher).

Vous annoncez un concours de poésie, monsieur, et
voas laites appel à tous les joueurs de vielle, de gui-
tare ou de lyre qui chantent encore en France le doux
loisir, la nature et l'amour.

Monsieur, comme dit Hyacinthe dans je ne sais plus
quelle pièce du Palais-Royal, c'est d'un noble cœur!
Mais vous n'avez sans doute pas réfléchi à ce que vous
faisiez et vous vous êtes laissé glisser sur cette pente
vertigineuse et décevante de l'enthousiasme— de cet
enthousiasma facile et. incojisidéré qui ffl'* les ly'qnes

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