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Le Grelot: journal illustré, politique et satirique — 2.1872

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https://doi.org/10.11588/diglit.3250#0174
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LB &RKLOT

Notre correspondant de Londres nous en-
voie le factum que nous reproduisons ici,
et qui, imprimé en France par les soins de
M. Hugelmann, a été, toujours par ses soins,
adressé à plusieurs personnes qui habitent
Londres.

Monsieur,

Il existe, à Londres et à Bruxelles, des gens dont
l'industrie consiste à obtenir de l'argent, par la me-
nace de révélations publiques sur le passé des per-
sonnes que leur situation met en vue. N'ayant heu-
reusement rien à redouter de ces gens dans la mo-
deste position que j'occupe, et croyant utile de faire
connaître les procédés auxquels ils ont recours, j'ai
l'honneur de vous communiquer ci-après la lettre qui
vient de m'être adressée de Londres par un monsieur
Muraired'Alaveine. Il me semble inutile d'expliquer
ensuite comment il m'est impossible de devoir quoi
que ce soit à ce personnage, n'ayant pas plus été pro-
priétaire de La Situation de Londres que je n'ai
l'honneur d'être le secrétaire intime du Président de
la République.

Veuillez agréer, etc.

G. HlIGELMANN.

Ptiris. 47, rue de Rennes.
Paris, septembre 1S72.

Londres, le 6 septembre 187Î.

Monsieur 6. Hugelmann, à Paris.

On est sur le point de publier, à dix mille exem-
plaires, un opuscule sous forme de Faction, avec le
titre suivant :

Extraits du journal La Situation, publié à Londres
en 1870-1871, pouvant éclairer M. Thiers sur le compte
du sieur G. H., son secrétaire intime, etc., etc.

Rien n'a été oublié dans cet étrange et très-instruc-
tif recueil, ni votre article sur l'inceste du Président
de la République, ni celui où vous le jugez à peine
digne de couvrir ses épaules ne la camisole du forçat,
après l'avoir désigné à la vindicte publique, eomme
traître, parjure et infâme, etc.

On n'a pas omis non plus vos violentes attaques
contre M. Jules Simon, actuellement ministre des
Cultes, et contre tous ceux que vous encensez aujour-
d'hui.

Il y a aussi quelques lignes très-vraies sur l'exis-
tence que vous avez menée à Londres, et sur les rela-
tions que vous y aviez formées.

Enfin, c'est un petit ouvrage Irès-complet, dans le-
quel vous apparaissez, non-seulement comme coupable,
mais encore comme votre propre accusateur, puisque
toutes les pièces à conviction y portent votre signature.

J'ajoute que toutes les mesures sont prises pour que
cette révélation écrite soit sérieusement mise sous les
yeux de M. Thiers, et communiqué» à ses ministres;
et pour qu'une copie en soit remise à chaque député.

Soyez bien convaincu, Monsieur, que rien ne
pourra empêcher cela... à moins que vous n'étouffiez
avec de l'argent ce cri puissant de l'indignation pu-
blique, tout prêt à éclater sur vous, comme une très-
sévère, mais très-juste imprécation.

Vous avez fait assez de cliantage en votre vie de pu-
bliciste, pour qu'il soit permis de vous faire un peu
chantée aujourd'hui, à votre tour...

Donc, Monsieur, jouons cartes sur table, combien
donnez-vous pour empêcher la publication de l'opus-
cule?

Pas de somme ridicule, s'il vous plaît; et surtout ne
traitez pas ici par intermédiaire ; vous me comprenez,
n'est-ce pas?

Vous voudrez bien me communiquer directement
vos intentions; je suis spécialement chargé de cette
affaire, étant possesseur et propriétaire des articles
accusateurs.

Lors de mon dernier voyage à Paris, j'avais en po-
che la première épreuve ; tout était prêt pour la pu-
blication. Mais, malgré les instructions précises que
j'avais reçues, j'ai cru devoir, en présence du cadavre
de votre femme et du deuil de vos enfants, retarder
l'accomplissement du mandat qui m'avait été con-
fié.

Aujourd'hui, il n'y a plus à hésiter; il me faut
lancer le trait, ou bien recevoir le prix qu'on est en
droit d'attendre en retour de la destruction, ou même
de la livraison des pièces à conviction. Ce prix, je le
répète, doit être assez élevé; il doit être en rapport
avec votre situation actuelle, qui Vous permet, j'en ai
toutes les preuves, de vous livrer aux dépenses les plus
inutiles et les plus extravagantes...

Mais hâtez-vous; conseillez à payer, sinon la publi-
cation aura lieu immédiatement. — N'espérez pas
qu'on s'arrête devant aucune considération. C'est une
affaire d'argent; voilà tout.

11 n'y a pas là de pression coupable ; on tient en main
vos forfaits de publiciste par votre cynisme d'écrivain
•t d'homme public; on considère comme une injure
à la morale politique, la fortune que vous a conquise
votre audace, et l'on veut vous démasquer, voilà tout,
— je le répète, ou bien vous faire payer l'intérêt de
v«tr* réussite et lie vos «uceèa.

i Réfléchissez, monsieur, et surtout ne boudez pas

I contre vos intérêts, car il me semble impossible que,
malgré ses préférences, le Président de la République
t puisse vous garder auprès de lui après une teUe pubti-
i cation.

Donc, hâtez-vous; je vais attendre vos communiea-
1 fions.

j II va sans dire que j'entends prendre et garder la
I responsabilité do ma lettre et cela en toute occasion.
J'ai l'honneur de vous saluer.
Signé : Muraihe D'ALAVEINE.
| Écrivez-moi à : 98, Carlotte Street

Fitzerot Square.

London. "W.

P. S. Je vous rappelle que vous me devez encore
personnellement quatre livres sterling, soit cent francs;
me les enverrez-vous?

Paris. Imp. A.-E. Rocbette.

Après avoir lu l'attaque et la réponse, n'avons-
nous pas le droit de dire à M. Hugelmann, dont
nous connaissons de longue date l'effronterie.
Que signifie cetle comédie?

N'avons-nous pas le devoir de demander à
M, Thiers s'il connaissait, quand il l'a pris à
son service, le monsieur qu'il emploie, et s'il
le connaissait, pourquoi il l'a pris?

Serons-nous, dans huit jours, des indiscrets,
si nous demandons encore à M. Thiers ce qu'il
a fait du sieur Hugelmann, à présent qu'il ne
peut pas ne pas le connaître?

Ce cri du cœur était sous presse lorsque la nou-
velle nous parvient que M. Hugelmann venait d'être
remercié de ses obligeants services par M. Thiers.
Nos lecteurs trouveront donc ensemble la demande et
la réponse.

LA VÉRITÉ

LE CAS DU PRINCE

Le Grelot ne tient pas seulement à. intéresser
ses lecteurs, il prétend aussi constituer avec
le temps de sérieuses archives qui puissent
être offertes aux médilations des historiens de
l'avenir.

Dans cette intention, il a recueilli avec un
soin minutieux tous les détails de nature à
éclairer ce fait politique important qui prendra
rang dans nos annales sous ce titre : Le cas du
prince Plonplon.

Le premier point était, bien entendu, de sa-
voir comment l'attention du gouvernement
avait pu être dirigée sur les faits et gesles du
prince.

Nous avons pu constater que la veille du jour
où le mandat d'expulsion a été signé, M. le
ministre de l'Intérieur'recevait la lettre sui-
vante, tracée d'une main un peu émue. Natu-
rellement si nous avions élé demander cette
lettre au ministre pour l'insérer dans nos co-
lonnes, nous pouvons nousaltendre à une jolie
veste; mais ce n'est pas pour rien que l'ima-
gination a été donnée à l'homme.

Profilant d'un moment où la fenêtre de M. le
ministre était ouverte, nous avons fait vive-
ment braquer par un photographe, du haut
d'une maison voisine, un objectif dans la di-
rection de sa table. Le succès le plus complet
a couronné cet acte d'indélicatesse. Nous som-
mes aujourd'hui en possession, non-seulement
des termes, mais du fac-similé de la lettre en
question.

Elle est ainsi conçue :

« Monsieur le ministre,
» Je croirais manquer à mes devoirs de ci-
toyen français, si je ne vous signalais pas la
conduite anti-palriotique de l'ex-prince Na-
poléon. Ce personnage, que je ne qualifierai
pas par respect pour ma plume, n'est entré en
France que dans le seul but d'y agiter les
esprits.

« Je vous invile, et au besoin je vous somme,
comme Français, de le faire immédiatement
reconduire jusqu'à la frontière. Vous le trou-
verez à Mermillont, chez son ami Richard
(rien du Constitutionnel). Si vous aviez besoin
de preuves... »

— Inutile, aura pensé le gouvernement; ce
qui serait invraisemblable, ce serait qu'un Bo-
naparte ne conspirât pas.

Et immédiatement il a opéré comme vous
savez. (Voir pour les considérations comiques,
tous les journaux sérieux de la semaine).

Maintenant, à qui attribuer la lettre ci-des-
sus? Tel était le mystère que votre sagacité
devait s'exercer à rechercher.

Est-il besoin d'ajouter qu'elle nous a aussi
permis de la résoudre.

Mais il importe, avant de révéler le mot de
cette énigme, de retracer, d'après les fidèles
indications de nos reporters, une seène désor-
mais historique.

Trois hommes sont assis 'devant un excel-
lent feu.

L'un, gras, replet, la main appuyée, par ha-
bitude peut-être, sur le premier bouton de sa
culotte, est le noble exilé. Les deux autres
sont deux illustres, les deux étoiles du règne,
Routier et Dugué de la Fauconnerie.

Tout à coup le masque du cousin de Sedan
s'anime d'une lueur exquise, et se frottant les
mains avec verdeur :

— Je vais donc les revoir, ces bichettes ! AM
mes amis, il n'y a de femmes qu'en France!

Un dédaigneux silence répond à cette pro-
vocation , et les deux auditeurs échangent un
froncement de sourcil.

—Vous vous taisez ! Est-ce que tout ce qu'il
y a d'aimahle et de galant aurait franchi avec
nous la frontière?...

-*=■ II s'agit b'en de cela! fit Rouher.
Et Dugué se penchant à l'oreille de monsei-
gneur :

— Nous attendons bien autre chose de
vous!

Le prince, visiblement inquiet. — Quoi donc?
(Il se lève comme une personne mal à l'aise.)

nuGUÉ. — Écoutez, le parti bonapartiste est
très-fort. On ne se doute pas h quel point le
parti bonapartiste est fort. Pour le savoir, il
faudrait pouvoir le compter. Pour le compter,
il faudrait un de ces hommes supérieurs qui
rallient en un instant, autour de leur nom res-
pecté, tous les membres épars de la grande
famille.

le peince, cherchant à.détourner la conversa-
tion. — Voyez donc, je crois que la lampe
file.

roueer. — Cet homme, pourquoi ne serait-
ce pas vous !

dugué, lui prenant le bras. — Oui, vous, gé-
néral.

le prince, troublé. — Ne m'appelez pas gé-
néral !

dughé. C'est que vous, au moins, vous êtes
militaire. C'est une force, cela. Vous vous te-
nez bien en selle, hein?

robher. —■ Si on vous plantait sur un che-
val?

dugué. _ Si on vous mettait sur la tête un
plumet?
roiiher. — Et si on vous disait...
dugué. — Marchez devant, général 1
le prince, dont les jambes flageolent, — Ne
m'appelez donc pas général !

dugué. — Ah 1 je ne dis pas qu'il n'y aurait
aucun danger à courir...

rouher. — Qu'on serait à l'abri des ho-
rions.

ijugué. — Qu'il n'y aurait pas à se l'aire
casser la tête, mais quoi de plus entraînant...
( Voyant le prince fléchir, ses deux interlocuteurs
se précipitent vers lui ; mais ils se reculent in-
stinctivement, comme pourraient faire des gens
dont l'odorat serait désagréablement affecté.)
le prince, dont le visage contracté un moment
a repris sa placidité. — Ce n'est rien, mes-
sieurs, laissez-moi... J'ai besoin... d'être seul...
de réfléchir.

( Les deux interlocuteurs sortent en s'inclinant
respectueusement.)

Une fois seul, le prince, nous dit-on, s'ap-
proi ha lentement de la table, y prit une plu-
me, du papier — et sans s'asseoir — écrivit...

Ecrivit quoi? Un vague soupçon nous en-
vahit. Pour le changer en réalité, il n'y avait
qu'une chose à faire : prendre la plume à notre
tour et écrire au prince.

C'est ce que nous fîmes, avec une eanail-
lerie rare, dans les termes suivants :

« Monseigneur,

n Possesseur d'un permis de voyage circu-
laire, avec défense de s'arrêler nulle part,
mais malheureusement dans l'impossibilité
d'en faire usage, permettez à un de vos ad-
mirateurs passionnés de vous l'adresser sous
pli comme un faible témoignage de l'estime
que vous lui inspirez comme prince autant I
que comme voyageur. »

Et j'ajoutai sur le permis cette dédicace :

« A celui qu'un trône appelle. »

L'eifet ne manqua pas. Le lendemain je re-
cevais de Genève ce seul mot autographe du
prince :

« Merci. »

Ce n'était pas beaucoup, mais c'était assez.
Je n'eus rien de plus pressé que de mettre en
regard de la letlre qui m'était adressée, celle
qui signalait le prince comme un homme dan-
gereux, à éloigner promptement. Je ne m'étais
pas trompé...

C'était bien la même écriture l

Et le lendemain la presse bonapartiste chan-
tait en chœur :

« Le prince expulsé a été comme il son or-
dinaire superbe de courage et de fermeté. La
façon mâle dont il a dit à la personne chargée
de lui signifier son ordre de départ : « C'est
o bien, monsieur, je m'en vais puisqu'on
« l'exige, » est digne de l'admiration géné-
rale. »

Chut.

ERNEST ET ARTHUR

ou

LE FRATRICIDE PAR PATRIOTISME

DRAME EN UN ACTE

A Monsieur Morea-u-Sainli, directeur de
l'Ambigu-Comique.

Paris, 17 octobre 1872.
Mon cher ami,

hii^T'^T1.01 d'USer de Ia fOTmidable pu-
hlicité du Grelot pour vous recommander chau
dément le drame A'Ernest et Arthur, ou le Fra
triade par patriotisme, qu'un inconnu a glissa
hier dans mon pain de quatre livres

Je l'ai lu avec l'émotion la plus vive, et bien
que je ny puisse reconnaître le style d'A
lexandre Dumas fils, il m'est impossible de ne
pas croire cependant qu'il est dû aune plume
des plus autorisées. v e

Je crois que le théâtre qui montera cette
œuvre aura là ce que nous autres lettrés nous
appelons un succès bœuf.

Avis à vous, cher ami, qui êtes un homme
de goût et d'expérience.

Cordialités sincères,
NICOLAS FLAMMÈCHE.

P. S. A propos... ne dites rien de ma nart
à votre associé, le père Billon. Sa prodigalité
et son orthographe me dégoûtent !

PBBSONNAOES :
Ernest, ambassadeur de France à Bruxelles
Arthur, son frère, jeune ambitieux, d'une laideur
extrême et d'un caractère grincheux.

Note de Vauteur. L'acteur chargé de représenter le
personnage d'Arthur n'est nullement tenu d'y met-
tre de la distinction... au contraire. Mais il lu faut
un gilet blanc!... su à peu près.

Le cqhinet de travail de l'ambassadeur français
à Bruxelles.

Ernest, l'ambassadeur, est occupé à ranger six
chaussettes et une demi-dousaine de faux-cols
dans un sac de nuit. Il paraît s'intéresser vive-
ment à ce travail, qui, disons-le, au premier
abord et même au second, n'a rien de diplo-
matique.

SCÈNE I".

ERNEST, Seul.

Non, on n'a pas d'idée de ce que Je métier
d'ambassadeur est fatigant!... Ah! sapristi, si
je l'avais su!... et puis, avouons-le, le séjour
de Bruxelles n'a rien de bien folâtre I... heu-
reusement... Allons, bon !,.. encore une trouée
au talon... Heureusement, riis-je, je suis l'au-
teur d'une invention qui ne peut manquer d'a-
voir un succès complet chez tous mes collè-
gues; j'ai trouvé un moyen facile d'adoucir
leur situation et la mienne : c'est de traiter
toutes les affaires de nos ambassades à Paris
même. Comment cela? me diront quelques in-
crédules. Comment,messieurs?... Rien déplus
simple. Donnez-vous la peine de regarder et
vous comprendrez.

(Il va à une armoire, l'ouvre et pousse, non sans
peme, au milieu de la chambre un long objet cou-
vert d'un voile de serge verte.)

Ceci, messieurs, vous représente un autre
moi-même. Un mannequin fait à mon effigie ,
vêtu de mes habits, porteur de mon ventre et
qui m'a coûté un prix fort élevé.

Eh bien, voici ce que j'ai imaginé.

Quand je pars pour Paris, ce qui a lieu tous
les deux jours, je colle mon mannequin dans
mon fauteuil, je lui imprime l'attitude de la
méditation — il est à ressort, — je pousse
le boulon de cette porte secrète, je prends ma
valise et je saute dans le train.

Or,qu'arrive-t-il?

Supposez qu'un compatriote ait besoin de
mon assistance.

Il entre à l'ambassade,

— Ernest est-il là?

— Parfaitement, répond le portier. Mon-
sieur l'ambassadenr est toujours là.

— Bon, fait le compatriote.
Et il monte.

Arrivé à mon cabinet, il est arrêté d'un
geste par l'huissier, qui a le mot.

— Ernest est-il là? demande-t-il.

— Chut!... fait l'huissier. Son Excellence
travaille.

— Quelle blague !

— Tenez, voyez plutôt.

L'huissier entr'ouvre doucement la porte et
montre mon mannequin, toujours dans l'atti-
tude de la méditation.

— C'est pourtant vrai ! Je ne l'aurais jamais
cru.

— Si monsieur veut revenir à la même
heure?

Et le compatriote, qui, la plupart du temps,
n'est qu'une mouche du petit papa Thiers, s'en

i singe1'

Non, pas '
frère I

Pitié!

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