LE' GRELOT
PRIME GRATUITE
Toute personne de la province qui s'abon-
nera à un des journaux ci-après, par l'entre-
mise de M. Madrk, directeur-gérant du Grelot,
77, rue Neuve-des-Petits-Ghamps, à Paris,
aura droit à un abonnement gratuit au jour-
nal le GRELOT, savoir :
Pour un abonnement d'un an : 6 mois au GRELOT.
— — de sii mois : 3 mois —
— — de trois — : 1 mois 1/2 —
L'abonnement à plusieurs journaux dou-
blera, triplera la durée de l'envoi gratuit du
UUUliUX,
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Les prix qui précèdent sont, bien entendu,
les prix fixé3 par les administrations de cha-
cun de ces journaux.
LA SEMAINE
Si les Français sont le peuple le plus spiri-
tuel de la terre, on peut aviser, sans crainte
d'être démenti, qu'ils en sont le plus mala-
droit.
Aucune leçcn ne nous profite.
Exemple :
Voilà M. Paul de Oassagnac qui s'avise de
prononcer àBdleville un speech destiné cer-
tainement à faire un tort considérable a son
parti.
Vite, le Gaulois s'empresse de reproduire
le susdit speech, ce qui ne pouvait qu'aggraver
la situation.
Que fait le gouvernement en cette occur-
rence?
Au lieu de laisser les bonapartistes se man-
ger entre eux, il se dépêche de faire de la sé-
vérité, d'appeler sur leurs têtes la rigueur des
lois, de leur confectionner enfin une petite
auréole à treize que les nigauds considérèrent
avec respect.
Le Pays et le Gaulois passent devant le jury,
qui, naturellement, les acquitte, et voilà com-
ment, "de champions d'une cause furieuse-
ment discréditée, ces messieurs deviennent
martyrs, ce qui est la plus belle situation pour
des hommes politiques en quête de suffrages
électoraux.
Pas de zèle / disait M. de Talleyrand.
Quand donc le mot du spirituel évêque d'Au-
tun deviendra-t-il la devise des gouverne-
ments?
Ah I les maladroits !
*
* *
Le nez du centre droit continue à s'allonger
tous les jours.
• Pauvre centre droit !
Infortunés orléanistes !
! Non, jamais, de mémoire de centre droi-
tier, on ne vit teste pareille.
Les voles se suivent pour eux et se ressem-
blent aussi parfaitement que les frères Lionnet.
Leurs candidats au Sénat tombent comme
des capucins de carte, et ce qui est au moins
aussi amusant que le.ur désespoir, ce sont les
réflexions des journaux qui les soutiennent.
Le Français écume/
Pauvre Français/
Qu'une chose au moins vienne consoler no-
tre infortuné confrère.
Le Grelot a dé< idé qu'on lui achèterait pour
ses étrennes une muselière toute neuve.
En présence de l'allure nydroph ibique de
la famille orléaniste, cette précaution ne nous
a pas semblé inutile.
* *
Paris - Journal nous paraît également ré-
jouissant.
« La façon dont les élections sénatoriales
se manœuvrent dans l'Assemblée, murmure
M. de Pêne d'une voix éteinte, cause à l'é-
tranger et en France une sorte de stupeur. »
(Est-ce que vous avez remarqué cela, cher»
lecteurs ?)
Mais continuons :
« ... Et amènera sans doute de la part des
électeurs une réparation vigoureuse. »
(Pour ça, je n'en doute pas. La France com-
plétera le mouvement commencé et affirmera sé-
rieusement ses convictions républicaines.)
«... C'est là l'espoir dans lequel se réfu-
gient tous ceux qui font passer l'intérêt du
pays avant les calculs personnels et les trafics
de parti pris. »
(Celle-là nous la connaissons. Elle n'est pas
neuve.)
Il y en a comme cela trois colonnes !
Si ca ne fait '^as de bien aux lecteurs du
Paris-Journal, ça ne peut pas leur faire de mal
non plus, n'est-ce pas?
Dmc, pleurez, cher confrère, pleurez.
Pt prenez-en votre parti.
C'est le plus sage.
*
* *
Peur passer à un ordre d'idées plus folâtre,
qu'il me soit permis, ô mes bien-aimés lec-
teurs de vous faire part d'une nouvelle qui
m'a inondé de la joie la plus pure.
Une nouvelle qui...
Une nouvelle que..,
■—Mais enfin, achevez!...
Eh bien, voiàl la chose.
Les bals masqués ont commencé et ont fait
un jour presque aussi corsé que celui du cen-
tre droit.
— Pas possible I
— C'est comme j'ai l'honneur de vous le
dire.
— En vérité ?
— Mon Dieu oui. Les portes de Valentino,
de Frascati et du Théâtre-Taitbout se soni
ouvertes samedi dernier, croyant livrer pas-
sage à un torrent de paillasses, de chicards et
de chienlits.
Bernique 1
Il n'est venu personne.
Que quelques centaines de messieurs en
habit noir, lesquels se promenaient, funèbres
et désespérés, attendant avec une anxiété pé-
nible à voir l'occasion d'ébaucher une intrigue
avec une femme du monde ou de lever une dé-
bardeuse.
Rien ! rien t rien !
Au bout de deux heures d'évolutions, les
habits noirs sont passés au vestiaire, ont repris
leurs paletots et sont rentrés chez eux, en se
promettant bien qu'on ne les y prendrait
plus !
«
* *
On les y reprendra bien encore, j'en suis
convaincu, mais il n'en est pas moins vrai que
le temps des mascarades ridicules est passé,
ce qui me fait un sensible plaisir.
J'avoue que les lamentations des restaura-
teurs, des costumiers et des filles de joie ne
touchent médiocrement et ce n'est pas parce
qu'on aura mangé le samedi quelques écre-
visses bordelaises de moins que le commerce
périclitera.
Il faut faire justice de ces rengaines.
Et je crois que sans vivre comme des trap-
pistes, nous avons mieux à faire qu'à nous
costumer en polichinelles età payer des huîtres
à des drôlesses.
NICOcAS FLAMMÈCHE.
LE JOLI MENAGE
Un des grands arguments que les sauveurs
de sociétés ont l'habitude d'employer contre
l'émancipation du peuple,
C'est celui qu'ils tirent du peu de respect
du peuple pour la famille.
A les en croire, tous les gens du peuple
passent à battre leurs femmes le temps qu'ils
ne dépensent pas au cabaret;
Ils rentrent régulièrement saoûls comme la
bourrique à Robespierre, — que je regarde
décidément comme un animal calomnié,
Et ils donnent à leurs enfants les exemples
les plus dangereux, étant eux-mêmes sans
morale, sans religion et s:insmœurs.
Voità qui va bien 1
Malheureusement pour les sauveurs de so-
ciété, les tribunaux retentissent peu souvent
des affaires de famille des gens du peuple, —
qui ne trouvent pas nécessaire de faire savoir
à loute.la terre que leur femme les trompe,
Et qui préfèrent régler leurs comptes, eux-
mêmes, les portes fermées et les rideaux tirés.
Cela vaut bien assurément la méthode du
ménage Bauffreinont, qui, depuis sept ans et
plus, déballe devant le public, ses paquets de
linge sale.
Entre ces deux époux, plaignants et défen-
deurs tour à tour, on ne sait auquel en-
tendre et lequel choisir ;
Les voici qui aujourd'hui se disputent en-
core une fois leurs enfants, qui (ce n'est pas
pour dire), auront pour eux un jour une fière
estime.
Et nous allons avoir une fois de plus les
oreilles déchirées des plaidoiries scanda-
leuses de leurs avocats I
Franchement, défenseurs de l'ordre, de la
famille et de la propriété, un peu moins de
vanité : en voici qui sont des vôtres, et là,
franchement, il n'y a pas de quoi en être fier#
ZED.
-^^r^^X^T^5stoc~.-
FEUILLES AU VENT
Il y a des gens qui ont de la chance et qui
ne la méritent guère.
Ce Gaston Tissanlier, par exemple.
Au commencemeut de cette année, il monle
en ballon avec deux de ses amis, afin de faire
des expériences sur la raréfaction de l'air.
L'expédition est si malheureuse que le Zé-
nith ne descend des hauteurs de l'atmosphère
qu'en ramenant les deux cadavres des infor-
tunés Sivel et Crocé-Spinelli.
Quant à Tissandier, il en est quitte pour la
peur.
Un autre s'en serait tenu là.
Lui, point.
Le voilà qui ces jours-ci, fait une nouvelle
ascension sur l'Univers.
Même fortune presque que pour le Zénith'
Tous ses compagnons ont qui le bras cassé,
qui l'épaule démise, qui les côtes enfoncées.
Lui?
Il a une forte contusion.
Et savez-vousde quoi il se plaint?
De n'avoir pu continuer la série de ses ex-
périmentations qui commençaient à marcher
très- bien !
Cela ne rappelle-t-il pas le couvreur qui
tombe d'un cinquième étage sur la capole
d'un cabriolet, tue l'individu qui se trouvait
dedans, et ne se remet sur ses jambes que
pour fouiller dans sa poche et s'assurer que
sa pipe n'est pas cassée.
* *
Ce couvreur m'en remet un autre en mé-
moire.
Celui-ci tombe aussi du haut d'un toit,
Et si heureusement qu'il se trouve assis sur
la tête d'un individu qu'il assomme net.
La famille du mort réclame,
Et le fils fait, procès au couvreur, — lui de-
mandant réparation, indemnité, etc.
— Ma foi, dit le bonhomme arrivé devant
le tribunal, —écoutez, je n'ai pas le sou, puis-
que je dois travailler pour vivre, mais j'avoue
que je dois une réparation, et je veux bien la
donner... Que cet homme monte sur le toit
où j'étais!... je me mettrai à la place de la
rue où se trouvait son père quand je l'ai tué...
Et alors qu'il se laisse tomber sur moi : s'il
me tue, nous serons quittes...
*
* *
Ce couvreur n'était-il pas un honnête
homme,
Et la réparation qu'il offrait ne valait-elle
pas bien celle que le malheureux fou de Saint-
Omer vient d'obtenir du sous-préfet Ritt et du
substitut Van Casselî
Ah! le joli pays que celui où, pour cin-
quante francs d'amende, on peut tirer tout à
son aise sur les gens qui vous déplaisent.
En Suisse, on a pour les crétins une sorte
de pitié respectueuse : quoi qu'ils fassent, on
se garderait de leur faire le moindre mal.
Dans tous les pays, on n'éprouve qu'une
profonde commisération pour ces aliénés dans
lesquels l'antiquité ne voyait que des victimes
ou des favoris de la divinité, — et on se con-
tente de les traiter comme une variété parti-
culière de malades auxquels on ne doit que
des soins empressés et spéciaux.
Chez nous, on fait tirer sur eux quarante et
quelques coups de fusil, et à peu près autant
de coups de révolver,
Et ça ne coûte que la bagatelle de cinquante
francs t
Ce n'est pas la peine que les imbéciles s'en
passent 1
*
* *
C'était dans un collège départemental.
Le professeur de seconde n'était point un
classique,—• comme la plupart de ses collè-
gues.
Il était, au contraire, un adorateur pas-
sionné du romaniisme,
Et il savait par cœur des tirades intermina-
bles d'Hugo et de Lamartine.
Or, comme il faisait lui-même des vers,
Cette lecture assidue de nos grands poêles
modernes avait fortement déteint sur lui,
Et il lui arrivait d'avoir souvent dans ses
propres poésies des réminiscences qui, si l'on
n'eût connu son honnêteté, eussent pu passer
pour des plagiats.
Mais '1 avait trop de mémoire,
Et voilà tout!
Un jour donc qu'il se promenait de long en
large dans sa cia-se, il lui arriva de réciter
une pièce de sa composition où il avait, à son
insu, enchâ-sé des vers entiers de l'auteur de
focelyn. '
Un de ses élèves qui, lui aussi, avait lu les
Méditation?,, les Harmonies et le reste, recon-
nut aussitôt certains vers au passage, et s'é-
cria d'un air convaincu :
— Mais c'e-tcu Lamartine,cela, monsieur!
Le professeur s'arrêta court;
Et, se méprenant sur le sens de l'interrup-
tion, il murmura en souriant d'un air mo-
deste :
— Flatteur!
*
* *
On causait devant une jeune fille encor
très-naïve d'un personnage trop connu, « don
la femme tst un ange, » qui ne l'ignore pas
plus que le public et qui en profite avec un
sans-gêne à donner la chair de poule à Mar-
io ri.
— En voilà un qui en porte! dit étourdi-
ment quelqu'un.
La jeune fille, ne sachant de quoi il s'agis-
sait, demanda tout bas à son voisin :
— Que poite donc ce monsieur dont ou
parle, je vous prie?...
— Des cornes, répondit le voisin.
— Des cornes?...
— Oui, mademoiselle, des cornes — d'a-
bondance!
*
* *
Le fait suivant est historique.
Il s'est passé en Suisse, et je pourrais citer
l'endroit et donner le nom au héros de l'aven-
ture.
Un voyageur de commerce, blagueur comme
ils le sont tous, et doué de l'aplomb de l'illus-
tre Gaudissart, apprend que, dans la petite
ville de la Suisse française où il se trouvait, il
y avait une société d'Allemands qui tenait ses
séances dans un café.
— Parions, dit-il à un de ses amis, que je
vais chez ces dmiches, et que je leur fais un
discours en allemand...
— Mais tu ne sais pas l'allemand!
— Eh! non, parbleu, c'est pour cela que
ce sera bien [dus drôle.
— Mais on te mettra à la porte.
— Pas du tout;—ils applaudiront à tout
rompre.
— Allons donc!
— Je te parie deux déjeuners au Champagne
pour demain.
— Soit.
Ils se rendirent à la société allemande
comme ils en étaient convenus.
La salle était comble.
Tous les vidages étaient animés par suitedu
nombre de chopes précédemment absorbées.
Un orateur était à la tribune.
Quand il eut fini, notre farceur se dirLrea
vers lui, lui serra la main avec force et monta
à son tour à la tribune,
Et, comme il l'avait dit, il commença à pro-
noncer un discours composé de syllabes gut-
turales prises au hasard, ayant une certaine
analogie avec les mots allemands, et qu'il ac-
compagnait de grands gestes solennels.
De temps en temps il lâchait un mot réelle-
ment allemand, à la fin d'une phrase, — mot
qui ne signifiait, du reste, absolument rien.
Par moments, les Allemands saisissaient un
centralbahn, un zwitzerland un vaterland,
Et c'était tout.
II resta à la tribune un bon quart d'heure,
sans que personne s'aperçût qu'il n'avait pas
dit une seule phrase allemande,
Et quand il en descendit, il l'ut effective-
ment applaudi à outrance.
— Ah! disait-il en sortant à son ami, tu
croyais que les Allemands comprenaient leur
langue, toi !
*
Deux Gascons se lisputaient à propos de
leur force physique :
— Moi, dit l'un, je suis d'une force, —
mais d'une force !...
— Pas tant que moi, fit l'autre.
— Bast !... reprit le premier, moi, une fois,
je me disputais avec un individu qui m'em-
bêtait... Tout à coup je prends mon élan, et
je lui donne dans le derrière un tel coup de
pied qu'il fut au moins deux minutes en
l'air...
— Sandieu ! dit le second, ce n'est qu'un
jeu d'enfant!... Moi, je donnai un jour à un
individu un coup de pied... aussitôt, il dispa-
rut dans les airs, — et depuis, on ne l'a plus
revu.
*
• *
C'était ces jours passés.
Il faisait un froid de loup.
Un homme d'un âge mûr arrive dans un
salon où un certain nombre de dames se te-
naient autour d'un feu très-ardent.
Ou savait le nouvel arrivant d'un caractère
fort timide :
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Toute personne de la province qui s'abon-
nera à un des journaux ci-après, par l'entre-
mise de M. Madrk, directeur-gérant du Grelot,
77, rue Neuve-des-Petits-Ghamps, à Paris,
aura droit à un abonnement gratuit au jour-
nal le GRELOT, savoir :
Pour un abonnement d'un an : 6 mois au GRELOT.
— — de sii mois : 3 mois —
— — de trois — : 1 mois 1/2 —
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blera, triplera la durée de l'envoi gratuit du
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Les prix qui précèdent sont, bien entendu,
les prix fixé3 par les administrations de cha-
cun de ces journaux.
LA SEMAINE
Si les Français sont le peuple le plus spiri-
tuel de la terre, on peut aviser, sans crainte
d'être démenti, qu'ils en sont le plus mala-
droit.
Aucune leçcn ne nous profite.
Exemple :
Voilà M. Paul de Oassagnac qui s'avise de
prononcer àBdleville un speech destiné cer-
tainement à faire un tort considérable a son
parti.
Vite, le Gaulois s'empresse de reproduire
le susdit speech, ce qui ne pouvait qu'aggraver
la situation.
Que fait le gouvernement en cette occur-
rence?
Au lieu de laisser les bonapartistes se man-
ger entre eux, il se dépêche de faire de la sé-
vérité, d'appeler sur leurs têtes la rigueur des
lois, de leur confectionner enfin une petite
auréole à treize que les nigauds considérèrent
avec respect.
Le Pays et le Gaulois passent devant le jury,
qui, naturellement, les acquitte, et voilà com-
ment, "de champions d'une cause furieuse-
ment discréditée, ces messieurs deviennent
martyrs, ce qui est la plus belle situation pour
des hommes politiques en quête de suffrages
électoraux.
Pas de zèle / disait M. de Talleyrand.
Quand donc le mot du spirituel évêque d'Au-
tun deviendra-t-il la devise des gouverne-
ments?
Ah I les maladroits !
*
* *
Le nez du centre droit continue à s'allonger
tous les jours.
• Pauvre centre droit !
Infortunés orléanistes !
! Non, jamais, de mémoire de centre droi-
tier, on ne vit teste pareille.
Les voles se suivent pour eux et se ressem-
blent aussi parfaitement que les frères Lionnet.
Leurs candidats au Sénat tombent comme
des capucins de carte, et ce qui est au moins
aussi amusant que le.ur désespoir, ce sont les
réflexions des journaux qui les soutiennent.
Le Français écume/
Pauvre Français/
Qu'une chose au moins vienne consoler no-
tre infortuné confrère.
Le Grelot a dé< idé qu'on lui achèterait pour
ses étrennes une muselière toute neuve.
En présence de l'allure nydroph ibique de
la famille orléaniste, cette précaution ne nous
a pas semblé inutile.
* *
Paris - Journal nous paraît également ré-
jouissant.
« La façon dont les élections sénatoriales
se manœuvrent dans l'Assemblée, murmure
M. de Pêne d'une voix éteinte, cause à l'é-
tranger et en France une sorte de stupeur. »
(Est-ce que vous avez remarqué cela, cher»
lecteurs ?)
Mais continuons :
« ... Et amènera sans doute de la part des
électeurs une réparation vigoureuse. »
(Pour ça, je n'en doute pas. La France com-
plétera le mouvement commencé et affirmera sé-
rieusement ses convictions républicaines.)
«... C'est là l'espoir dans lequel se réfu-
gient tous ceux qui font passer l'intérêt du
pays avant les calculs personnels et les trafics
de parti pris. »
(Celle-là nous la connaissons. Elle n'est pas
neuve.)
Il y en a comme cela trois colonnes !
Si ca ne fait '^as de bien aux lecteurs du
Paris-Journal, ça ne peut pas leur faire de mal
non plus, n'est-ce pas?
Dmc, pleurez, cher confrère, pleurez.
Pt prenez-en votre parti.
C'est le plus sage.
*
* *
Peur passer à un ordre d'idées plus folâtre,
qu'il me soit permis, ô mes bien-aimés lec-
teurs de vous faire part d'une nouvelle qui
m'a inondé de la joie la plus pure.
Une nouvelle qui...
Une nouvelle que..,
■—Mais enfin, achevez!...
Eh bien, voiàl la chose.
Les bals masqués ont commencé et ont fait
un jour presque aussi corsé que celui du cen-
tre droit.
— Pas possible I
— C'est comme j'ai l'honneur de vous le
dire.
— En vérité ?
— Mon Dieu oui. Les portes de Valentino,
de Frascati et du Théâtre-Taitbout se soni
ouvertes samedi dernier, croyant livrer pas-
sage à un torrent de paillasses, de chicards et
de chienlits.
Bernique 1
Il n'est venu personne.
Que quelques centaines de messieurs en
habit noir, lesquels se promenaient, funèbres
et désespérés, attendant avec une anxiété pé-
nible à voir l'occasion d'ébaucher une intrigue
avec une femme du monde ou de lever une dé-
bardeuse.
Rien ! rien t rien !
Au bout de deux heures d'évolutions, les
habits noirs sont passés au vestiaire, ont repris
leurs paletots et sont rentrés chez eux, en se
promettant bien qu'on ne les y prendrait
plus !
«
* *
On les y reprendra bien encore, j'en suis
convaincu, mais il n'en est pas moins vrai que
le temps des mascarades ridicules est passé,
ce qui me fait un sensible plaisir.
J'avoue que les lamentations des restaura-
teurs, des costumiers et des filles de joie ne
touchent médiocrement et ce n'est pas parce
qu'on aura mangé le samedi quelques écre-
visses bordelaises de moins que le commerce
périclitera.
Il faut faire justice de ces rengaines.
Et je crois que sans vivre comme des trap-
pistes, nous avons mieux à faire qu'à nous
costumer en polichinelles età payer des huîtres
à des drôlesses.
NICOcAS FLAMMÈCHE.
LE JOLI MENAGE
Un des grands arguments que les sauveurs
de sociétés ont l'habitude d'employer contre
l'émancipation du peuple,
C'est celui qu'ils tirent du peu de respect
du peuple pour la famille.
A les en croire, tous les gens du peuple
passent à battre leurs femmes le temps qu'ils
ne dépensent pas au cabaret;
Ils rentrent régulièrement saoûls comme la
bourrique à Robespierre, — que je regarde
décidément comme un animal calomnié,
Et ils donnent à leurs enfants les exemples
les plus dangereux, étant eux-mêmes sans
morale, sans religion et s:insmœurs.
Voità qui va bien 1
Malheureusement pour les sauveurs de so-
ciété, les tribunaux retentissent peu souvent
des affaires de famille des gens du peuple, —
qui ne trouvent pas nécessaire de faire savoir
à loute.la terre que leur femme les trompe,
Et qui préfèrent régler leurs comptes, eux-
mêmes, les portes fermées et les rideaux tirés.
Cela vaut bien assurément la méthode du
ménage Bauffreinont, qui, depuis sept ans et
plus, déballe devant le public, ses paquets de
linge sale.
Entre ces deux époux, plaignants et défen-
deurs tour à tour, on ne sait auquel en-
tendre et lequel choisir ;
Les voici qui aujourd'hui se disputent en-
core une fois leurs enfants, qui (ce n'est pas
pour dire), auront pour eux un jour une fière
estime.
Et nous allons avoir une fois de plus les
oreilles déchirées des plaidoiries scanda-
leuses de leurs avocats I
Franchement, défenseurs de l'ordre, de la
famille et de la propriété, un peu moins de
vanité : en voici qui sont des vôtres, et là,
franchement, il n'y a pas de quoi en être fier#
ZED.
-^^r^^X^T^5stoc~.-
FEUILLES AU VENT
Il y a des gens qui ont de la chance et qui
ne la méritent guère.
Ce Gaston Tissanlier, par exemple.
Au commencemeut de cette année, il monle
en ballon avec deux de ses amis, afin de faire
des expériences sur la raréfaction de l'air.
L'expédition est si malheureuse que le Zé-
nith ne descend des hauteurs de l'atmosphère
qu'en ramenant les deux cadavres des infor-
tunés Sivel et Crocé-Spinelli.
Quant à Tissandier, il en est quitte pour la
peur.
Un autre s'en serait tenu là.
Lui, point.
Le voilà qui ces jours-ci, fait une nouvelle
ascension sur l'Univers.
Même fortune presque que pour le Zénith'
Tous ses compagnons ont qui le bras cassé,
qui l'épaule démise, qui les côtes enfoncées.
Lui?
Il a une forte contusion.
Et savez-vousde quoi il se plaint?
De n'avoir pu continuer la série de ses ex-
périmentations qui commençaient à marcher
très- bien !
Cela ne rappelle-t-il pas le couvreur qui
tombe d'un cinquième étage sur la capole
d'un cabriolet, tue l'individu qui se trouvait
dedans, et ne se remet sur ses jambes que
pour fouiller dans sa poche et s'assurer que
sa pipe n'est pas cassée.
* *
Ce couvreur m'en remet un autre en mé-
moire.
Celui-ci tombe aussi du haut d'un toit,
Et si heureusement qu'il se trouve assis sur
la tête d'un individu qu'il assomme net.
La famille du mort réclame,
Et le fils fait, procès au couvreur, — lui de-
mandant réparation, indemnité, etc.
— Ma foi, dit le bonhomme arrivé devant
le tribunal, —écoutez, je n'ai pas le sou, puis-
que je dois travailler pour vivre, mais j'avoue
que je dois une réparation, et je veux bien la
donner... Que cet homme monte sur le toit
où j'étais!... je me mettrai à la place de la
rue où se trouvait son père quand je l'ai tué...
Et alors qu'il se laisse tomber sur moi : s'il
me tue, nous serons quittes...
*
* *
Ce couvreur n'était-il pas un honnête
homme,
Et la réparation qu'il offrait ne valait-elle
pas bien celle que le malheureux fou de Saint-
Omer vient d'obtenir du sous-préfet Ritt et du
substitut Van Casselî
Ah! le joli pays que celui où, pour cin-
quante francs d'amende, on peut tirer tout à
son aise sur les gens qui vous déplaisent.
En Suisse, on a pour les crétins une sorte
de pitié respectueuse : quoi qu'ils fassent, on
se garderait de leur faire le moindre mal.
Dans tous les pays, on n'éprouve qu'une
profonde commisération pour ces aliénés dans
lesquels l'antiquité ne voyait que des victimes
ou des favoris de la divinité, — et on se con-
tente de les traiter comme une variété parti-
culière de malades auxquels on ne doit que
des soins empressés et spéciaux.
Chez nous, on fait tirer sur eux quarante et
quelques coups de fusil, et à peu près autant
de coups de révolver,
Et ça ne coûte que la bagatelle de cinquante
francs t
Ce n'est pas la peine que les imbéciles s'en
passent 1
*
* *
C'était dans un collège départemental.
Le professeur de seconde n'était point un
classique,—• comme la plupart de ses collè-
gues.
Il était, au contraire, un adorateur pas-
sionné du romaniisme,
Et il savait par cœur des tirades intermina-
bles d'Hugo et de Lamartine.
Or, comme il faisait lui-même des vers,
Cette lecture assidue de nos grands poêles
modernes avait fortement déteint sur lui,
Et il lui arrivait d'avoir souvent dans ses
propres poésies des réminiscences qui, si l'on
n'eût connu son honnêteté, eussent pu passer
pour des plagiats.
Mais '1 avait trop de mémoire,
Et voilà tout!
Un jour donc qu'il se promenait de long en
large dans sa cia-se, il lui arriva de réciter
une pièce de sa composition où il avait, à son
insu, enchâ-sé des vers entiers de l'auteur de
focelyn. '
Un de ses élèves qui, lui aussi, avait lu les
Méditation?,, les Harmonies et le reste, recon-
nut aussitôt certains vers au passage, et s'é-
cria d'un air convaincu :
— Mais c'e-tcu Lamartine,cela, monsieur!
Le professeur s'arrêta court;
Et, se méprenant sur le sens de l'interrup-
tion, il murmura en souriant d'un air mo-
deste :
— Flatteur!
*
* *
On causait devant une jeune fille encor
très-naïve d'un personnage trop connu, « don
la femme tst un ange, » qui ne l'ignore pas
plus que le public et qui en profite avec un
sans-gêne à donner la chair de poule à Mar-
io ri.
— En voilà un qui en porte! dit étourdi-
ment quelqu'un.
La jeune fille, ne sachant de quoi il s'agis-
sait, demanda tout bas à son voisin :
— Que poite donc ce monsieur dont ou
parle, je vous prie?...
— Des cornes, répondit le voisin.
— Des cornes?...
— Oui, mademoiselle, des cornes — d'a-
bondance!
*
* *
Le fait suivant est historique.
Il s'est passé en Suisse, et je pourrais citer
l'endroit et donner le nom au héros de l'aven-
ture.
Un voyageur de commerce, blagueur comme
ils le sont tous, et doué de l'aplomb de l'illus-
tre Gaudissart, apprend que, dans la petite
ville de la Suisse française où il se trouvait, il
y avait une société d'Allemands qui tenait ses
séances dans un café.
— Parions, dit-il à un de ses amis, que je
vais chez ces dmiches, et que je leur fais un
discours en allemand...
— Mais tu ne sais pas l'allemand!
— Eh! non, parbleu, c'est pour cela que
ce sera bien [dus drôle.
— Mais on te mettra à la porte.
— Pas du tout;—ils applaudiront à tout
rompre.
— Allons donc!
— Je te parie deux déjeuners au Champagne
pour demain.
— Soit.
Ils se rendirent à la société allemande
comme ils en étaient convenus.
La salle était comble.
Tous les vidages étaient animés par suitedu
nombre de chopes précédemment absorbées.
Un orateur était à la tribune.
Quand il eut fini, notre farceur se dirLrea
vers lui, lui serra la main avec force et monta
à son tour à la tribune,
Et, comme il l'avait dit, il commença à pro-
noncer un discours composé de syllabes gut-
turales prises au hasard, ayant une certaine
analogie avec les mots allemands, et qu'il ac-
compagnait de grands gestes solennels.
De temps en temps il lâchait un mot réelle-
ment allemand, à la fin d'une phrase, — mot
qui ne signifiait, du reste, absolument rien.
Par moments, les Allemands saisissaient un
centralbahn, un zwitzerland un vaterland,
Et c'était tout.
II resta à la tribune un bon quart d'heure,
sans que personne s'aperçût qu'il n'avait pas
dit une seule phrase allemande,
Et quand il en descendit, il l'ut effective-
ment applaudi à outrance.
— Ah! disait-il en sortant à son ami, tu
croyais que les Allemands comprenaient leur
langue, toi !
*
Deux Gascons se lisputaient à propos de
leur force physique :
— Moi, dit l'un, je suis d'une force, —
mais d'une force !...
— Pas tant que moi, fit l'autre.
— Bast !... reprit le premier, moi, une fois,
je me disputais avec un individu qui m'em-
bêtait... Tout à coup je prends mon élan, et
je lui donne dans le derrière un tel coup de
pied qu'il fut au moins deux minutes en
l'air...
— Sandieu ! dit le second, ce n'est qu'un
jeu d'enfant!... Moi, je donnai un jour à un
individu un coup de pied... aussitôt, il dispa-
rut dans les airs, — et depuis, on ne l'a plus
revu.
*
• *
C'était ces jours passés.
Il faisait un froid de loup.
Un homme d'un âge mûr arrive dans un
salon où un certain nombre de dames se te-
naient autour d'un feu très-ardent.
Ou savait le nouvel arrivant d'un caractère
fort timide :